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"Rennu c'est une histoire d’amour" : après 38 ans de mandat Joselyne Mattei-Fazi quitte la mairie


Livia Santana le Mercredi 15 Septembre 2021 à 09:50

Après 38 ans à la tête du village de Rennu, Joselyne Mattei-Fazi a quitté son siège pour le laisser à Xavier Luciani.
Dans un entretien accordé à CNI, l'élue de droite qui comptabilise sept mandats revient sur les raisons qui l'ont poussée à passer le témoin



Photo : Michel Luccioni
Photo : Michel Luccioni
- Un départ en cours de mandat après 38 ans à la tête de la mairie de Rennu, cela peut surprendre ? 
- Cela faisait un moment que j'y avais pensé. En 2018, j'ai décidé de ne pas demander le renouvellement de mon mandat. J'avais imaginé que mon conseiller, Xavier Luciani me succéderait. Mais en 2020, j'ai été contrainte de mener le combat car l’opposition a réussi à séduire l’un des nôtres (ndlr; Gérard Villanova). S’il y avait un combat à livrer, c'était à moi de le faire car il m'a trahi. Ensuite, nous avons gagné les élections et là j'ai pu passer la main. 

- C'était l'heure ? 
- Vous savez, j'ai été élue mairesse pendant 38 ans, puis présidente de l'association des maires de Corse-du-Sud pendant 20 ans, j'avais aussi un métier à côté : contrôleur du travail pendant 42 ans. Des fois, je travaillais 18 heures par jour, je pense que c'est assez. J'ai aussi eu un fils et construit un homme. A présent, j'avais envie de voir autre chose, de vivre comme tout le monde, de voyager et d'être libre.

- Avant vous ne l'étiez pas ? 
- La liberté a toujours géré ma vie. On ne m’a jamais tirée par la manche, on connaît mes idées et je pense ne jamais avoir trahi et menti. J'ai toujours gardé cette phrase en moi : "pour dire la vérité il faut avoir du courage et pour mentir de la mémoire."

- Xavier Luciani vous a succédé, c'était le bon candidat ? 
- Il est jeune (40 ans), brillant, a fait de grandes écoles, il est directeur adjoint aux travaux de la ville d’Ajaccio. Il s’intéresse à la chose publique et c'est rare. Surtout, il aime le village, alors j'ai jeté mon dévolu sur lui et les gens de Rennu ne vont pas perdre au change.

- Que représente ce village pour vous ? 
- Rennu c'est une histoire d’amour. J’ai décidé d’être maire quand j’avais 5 ans. Quand je suis arrivée à la mairie j'ai voulu moderniser le village, tout faire pour ne pas augmenter l’impôt pour les gens de Rennu. J’aime les gens, je n’ai pas de haine, dans la vie j’ai choisi l’amour et ceux que je préfère ce sont les miens. On dit souvent que le maire est le mal-aimé mais dans cette expression vous savez il y a quand même la notion d’amour.

- Si vous deviez retenir une action de votre mandat de mairesse ?
- Je suis fière que l’impôt soit si bas, cela a été difficile à réaliser. Je ne veux pas que les gens de ma commune aient à choisir entre la maison patrimoniale, celle de leur racine et leur résidence principale à Ajaccio. Je suis aussi très fière d’avoir mis la modernité dans un village de montagne. J'ai voulu montrer que même à 960 mètres d’altitude, nous pouvions avoir tout le confort que la commune pouvait se payer. Par exemple, je pense avoir bien fait de ne pas installer de tout-à-l'égout car trop onéreux pour le relier aux 5 hameaux. J’ai géré ma commune plus durement que mon budget personnel et c'est pour cela que je ne laisse pas de dettes. 
 
- Avec du recul, il y a une action que vous auriez aimé changer ? 
-  Non, j'aurais aimé que ce soit encore plus parfait, avoir un peu plus d’argent pour ma commune. Je ne sais pas avoir de regrets, bien ou mal quand j'ai fait quelque chose, je l’ai fait.

- Qu'est-ce qui vous manquera le plus ? 
- J’ai fait mon temps, si cela devait me manquer je resterais. 

- Vous avez été présidente de l’association des maires de Corse-du-Sud, quels ont été les plus gros enjeux durant ces années ? 
- Nous avions de gros problèmes concernant le financement des équipements structurants. A l'époque, ils étaient seulement subventionnés à 80%, ce qui handicapait les petites communes qui, avec les taxes, avaient une avance de 30% à faire. J’ai obtenu des améliorations sur ce plan, aujourd'hui en Corse c'est 90%. J'ai aussi œuvré pour le devenir des maires des petites communes en essayant de faire changer la loi montagne pour permettre la construction. Aujourd’hui, nous demandons une retouche du Padduc et je ne désespère pas que nos gouvernants le changent.

- Et maintenant, qu’allez-vous faire ? 
- Je reste au conseil municipal pour ne pas avoir à provoquer de nouvelles élections puis je vais garder ma délégation au Parc naturel pour défendre les zones défavorisées de l’intérieur. Je garde aussi mes fonctions au syndicat d’énergie car le programme me tient à cœur. Il consiste à enfouir toutes les lignes qui dévisagent nos villages.