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Michel Castellani : « Notre victoire constituerait un message politique adressé au gouvernement »


Nicole Mari le Dimanche 14 Mai 2017 à 14:18

C’est sur la place Saint Nicolas à Bastia, entourés d’une équipe jeune et déterminée, en présence du maire Pierre Savelli et de son équipe municipale, du président de l’Exécutif de Corse, Gilles Simeoni, et des élus de la majorité territoriale, que Michel Castellani et sa suppléante, Juliette Ponzevera, ont officialisé leur candidature à l’élection législative de juin prochain dans la 1ère circonscription de Haute-Corse. Partant sous l’étiquette Pè a Corsica, ce professeur des Universités en économie, adjoint au maire de Bastia, délégué à l'urbanisme et à la planification stratégique, élu d’Inseme per Bastia, entend bien capitaliser sur la victoire des Nationalistes en mars 2014 et décembre 2015 et sur l’état de grâce, qui entoure toujours le nouveau pouvoir, pour décrocher une nouvelle place forte. Il explique, à Corse Net Infos, l’enjeu de ce scrutin : défendre directement les intérêts de la Corse à l’Assemblée nationale, sans passer par le prisme déformant et contraignant d’élus de l’opposition. Avec une idée forte : faire pression sur Paris pour traiter la question corse de manière globale et sortir l’île de son sous-développement chronique.



Michel Castellani, conseiller municipal, adjoint au maire de Bastia, et sa suppléante, Juliette Ponzevera, conseillère territoriale, candidats à l'élection législative de juin prochain dans la 1ère circonscription de Haute-Corse sous l'étiquette Pè a Corsica..
Michel Castellani, conseiller municipal, adjoint au maire de Bastia, et sa suppléante, Juliette Ponzevera, conseillère territoriale, candidats à l'élection législative de juin prochain dans la 1ère circonscription de Haute-Corse sous l'étiquette Pè a Corsica..
- Pourquoi vous présentez-vous aux législatives ?
- Il y a une logique dans notre candidature. Les Nationalistes ont longtemps été une force utile de dénonciation des injustices faites à la Corse. Nos idées se sont maintenant fortement enracinées, et nos mouvements avec. Nous avons formalisé nos réflexions, mûri, approfondi notre analyse. De force de dénonciation, nous sommes devenus force de proposition et d’impulsion. Notre crédibilité s’en est trouvée renforcée, et nos résultats électoraux aussi. L’heure est venue maintenant d’élargir notre influence politique et d’être directement représentés au cœur même du système institutionnel, c'est à dire à la chambre des députés, de faire vivre nos idées à travers nos propres représentants et non plus, j’allais dire, par délégation.
 
- Est-ce l’enjeu de ce scrutin pour les Nationalistes ?
- Oui ! L’heure est venue de fortifier l’action de l’Exécutif territorial en plaçant un relais auprès du pouvoir central. Il en va de l’intérêt collectif. Et ce n’est pas en envoyant des opposants à Paris que l’on confortera l’action positive de la majorité territoriale.
 
- Le choix de votre suppléante, Juliette Ponzevera, a-t-il posé problème ?
- Non ! Ce choix s’est imposé sans difficulté. Juliette est une jeune femme fortement implantée dans le Nebbiu et le Cap. Elle est élue de la majorité territoriale et elle fournit un gros travail à la Collectivité. Son dynamisme fait beaucoup de bien à notre campagne.
 
- Vous avez choisi de vous entourer d’une équipe jeune et déterminée. Quelle campagne ferez-vous ?
- J’ai été surpris par l’ampleur des retours à l’annonce de ma candidature. Je suis porté par une équipe à l’engagement inépuisable. Enormément de gens se sont spontanément mobilisés, dans toutes les régions de la circonscription. Je les remercie car, sans eux, je ne suis rien, et, avec eux, nous portons haut notre idéal pour la Corse.
 
- Quels seront, d’après vous, les critères de choix privilégiés par les électeurs ?
- Les Corses ont largement compris la nécessité du changement. Lors de son allocution de départ, le Préfet Thirion a dit qu’il quittait le département le plus pauvre de France. Imaginez ce que cela signifie : des jeunes sans emploi, des vieux sans ressources, des familles à la dérive ! Les partis, dont se réclament nos concurrents, ont tout eu en main : les mairies, les Conseils Généraux, la région, les députés, les sénateurs. Ils ont eu le pouvoir sans partage. Ils ont eu des dizaines et des dizaines d’années pour prendre la mesure des problèmes et influer sur le cours des choses. Ils ne l’ont pas fait ! Ils nous ont amené au dernier rang des départements français.
 
- Que comptez-vous faire ?
- Nous n’avons pas de baguette magique ! Nous ne disons pas : « Votez pour nous et tout ira bien ». Nous disons : « élisez nous et nous travaillerons à poser la question corse là où elle doit être posée ». Nous travaillerons à mettre le gouvernement devant ses responsabilités de gouvernement. Nous travaillerons avec la volonté de sortir la Corse de ses misères, et de lui rendre la vitalité et la dignité auxquelles elle a droit ! Après tant de désastres, tant d’espoirs déçus, la société corse aspire au progrès. Au développement maîtrisé. A l’assainissement des conditions sociales. Au rayonnement d’une culture qui fait sa personnalité. Elle aspire à la maîtrise de son destin.

Gilles Simeoni, président de l'Exécutif de Corse.
Gilles Simeoni, président de l'Exécutif de Corse.
- Sur quels thèmes ferez-vous campagne ?
- Le grand mérite des Nationalistes a été de promouvoir l’idée que la question corse est globale et, donc, la solution globale. Les approches sectorielles se sont toujours heurtées au mur des institutions communes et ont conduit à la consternante situation actuelle. La question de la langue bute sur l’article 2 de la Constitution. Celle sur la spéculation se heurte au droit commun des lois de marché. La dévolution fiscale est retoquée par le Conseil d’Etat au motif que les entrées fiscales doivent être versées au budget général. Le Conseil Constitutionnel a décidé que le Peuple Corse n’existe pas… Nous sommes dans une cage institutionnelle et la conclusion est limpide : il faut, soit délayer le peuple corse dans le droit commun, soit faire évoluer ce droit. Sceglite voi. Noi avemu sceltu ! La Corse ne doit plus dépendre d’un cadre législatif visiblement inadapté à sa situation. Elle doit être dotée d’une infrastructure institutionnelle qui lui permet de se prendre en main, de donner des réponses efficaces à ses problèmes. Et si la Corse, à travers son vote, exprime clairement sa volonté d’avancer, si le gouvernement s’érige en partenaire loyal, alors elle pourra s’engager dans une paix sociale durable, dans une voie de reprise économique, de règlement naturel de la question des prisonniers politiques.

- Pensez-vous que la victoire d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle influencera le résultat des législatives locales, comme l’espèrent certains ?
- A la marge seulement. De plus en plus de Corses ont pris conscience de la nécessité de défendre nos intérêts, et ce, quelque soit le gouvernement. L’élection se jouera ici, non sur le soutien ou pas au nouveau Président, mais sur la défense spécifique ou pas de notre communauté.
 
- Le député sortant Sauveur Gandolfi-Scheit est très serein sur sa réélection. Qu’en pensez-vous ?
- Il est toujours de bon ton d’afficher des certitudes. Je me contenterai de dire que ce sont les électeurs qui choisiront. J’espère qu’ils choisiront la voie de progrès pour la Corse.
 
- Pensez-vous être au 2ème tour ?
- Je vois mal comment nous pourrions ne pas être au deuxième tour. Quant au résultat final, c’est aux électeurs de trancher. En attendant, je reçois, de toutes parts des encouragements, et suis reçu partout avec énormément de sympathie.
 
- Si vous êtes élu, comment vous inscrirez-vous dans une assemblée nationale où vous ne pourrez pas vous appuyer sur une majorité pour faire passer vos propositions ?
- Aujourd'hui, tout le monde peut apprécier combien le contenu politique a changé à la Collectivité territoriale (CTC). Dans la façon d’impulser les choses, la volonté forte de porter des solutions aux problèmes budgétaires, à la question de la Collectivité unique, des transports maritimes, de l’insertion de la Corse dans son environnement méditerranéen, de la fongibilité de l’enveloppe de continuité territoriale, du statut fiscal, de l’aménagement, de la montagne, de la langue… C’est là que j’aurai à intervenir, si je suis élu. J’aurai à promouvoir, auprès du pouvoir central, les solutions que nous préconisons. L’objectif sera naturellement de faire partager nos points de vue, nous pouvons largement jouer gagnant-gagnant. Nous devrons faire comprendre au gouvernement qu’il n’a pas à s’enfermer dans des postures timorées ou hostiles, qu’au contraire il sortirait grandi d’une solution par le haut de ce qu’il est convenu d’appeler depuis des lustres le « problème Corse ».
 
- Ne craignez-vous pas de ne pas être audible ?
- Non ! On nous objecte quelquefois la faible marge d’intervention qu’aurait un (ou quelques) élus. Il ne s’agit pas de révolutionner l’Assemblée Nationale ! Un député, relayant directement l’action de la majorité territoriale, est évidement légitime à parler au nom de la Corse. Je dirai même que le travail de représentation sera particulièrement aisé. Mais, il y a plus important encore. Notre victoire constituerait un message politique adressé au gouvernement. Le corps électoral, s’il décide de m’élire, validera la politique de la majorité territoriale, choisira le mouvement positif, et fermera la porte aux politiques du passé. De ce point de vue, cette élection serait un plébiscite.
 
- Si vous êtes élu, que ferez-vous en priorité en tant que député ?
- Je prendrai mes marques à Paris. Je verrai avec l’Exécutif territorial les questions à ouvrir en priorité, et je travaillerai à faire avancer les choses. Nous serons une force de proposition, positive et pragmatique. Nous ne désirons pas faire de la réforme pour la réforme, et encore moins déstabiliser les institutions. En toute hypothèse, toute étape d’évolution doit relever d’un processus démocratique. Nul ne peut avoir la prétention de porter la Corse à l’aventure, et, en tout cas, pas nous. Ce sont les Corses qui ont et qui auront à déterminer à tout moment là où ils veulent aller.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.

Michel Castellani : « Notre victoire constituerait un message politique adressé au gouvernement »