Christine Malfroy, militante depuis une vingtaine d’année, c’est aujourd’hui votre première candidature, pourquoi cet engagement pour ces législatives ?
D’abord, parce que je suis une insoumise depuis longtemps. Quand on voit les résultats des politiques diverses et variées qui ont appauvri les gens depuis plus de trente ans, le programme de l’Avenir en commun apporte selon moi de réelles réponses. Il correspond à l’avenir que je souhaite pour le monde et les travailleurs.
Jacques Casamarta ?
Je crois que l’on doit réellement reconstruire une Gauche qui s’appuie sur ses vraies valeurs, et capable de tirer des enseignements des dérives. Je fais allusion aux dérives dans les pays de l’Est, mais aussi à celles du Parti Socialiste, parce que quand on épouse les thèses du libéralisme, on a besoin de redonner du sens à la Gauche. Malheureusement, vous le voyez, le PS est en train de disparaître. Les forces qui ont porté la Gauche au 20ème siècle sont aujourd’hui en grande difficulté. Cette Gauche de transformation sociale et écologique peut remplir cette mission. C’est une nouvelle manière de faire de la politique, beaucoup plus citoyenne, en tenant compte de ces difficultés, et en essayant de proposer des mesures qui tiennent compte de l’intérêt général humain : un intérêt selon moi balloter depuis longtemps. Il n’y a qu’à regarder notre île : 66.000 personnes en dessous du seuil de pauvreté c’est extrêmement grave.
Vous êtes allés, durant la campagne, à la rencontre des citoyens de votre circonscription : quel bilan dressez-vous ?
Avec Christine, nous avons fait le tour de toutes les communes de l’intérieur, en partant de Osani jusqu’à la vallée de la Gravona. On y a vu un désarroi très important, une réelle forme de désespérance, et des gens qui vivent dans des conditions très difficiles. Ils ont souvent de très petites retraites, et n’ont pas accès, dans leur village, à l’intégralité des services publics. Je pense à la Poste, mais aussi au boulanger, à l’épicier, au boucher, et à tous les aspects médicaux qui se posent …
Quelles sont les grandes lignes de votre programme visant à endiguer ces phénomènes ?
Christine Malfroy : Nous sommes pour augmenter le Smic à 1300 € nets par mois. Dans le même temps, nous souhaitons faire une vraie révolution fiscale : qu’il n’y ait plus cinq mais quatorze tranches, qui permettront aux petits revenus d’être exonérés d’impôt, tandis que les gros payeront davantage. C’est totalement normal pour nous : c’est ce qui s’appelle la solidarité nationale, et celle-ci a un coup dans l’aile aujourd’hui, il faut la réhabiliter.
Nous voulons aussi le remboursement à 100% des frais médicaux et de santé. Il faut impérativement garantir le Droit au logement, et que ce ne soit pas seulement des mots ! Nous voulons l’institutionaliser pour que cela devienne une réalité. Vous savez que pour ceux qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, leur loyer représente 56 % de leurs revenus. Comment voulez-vous vivre décemment avec ce qui reste ?
Nous voulons absolument l’abrogation de la loi El Khomri : évidemment notre combat contre E. Macron prend ici tout son sens. Nous souhaitons protéger et généraliser l’économie sociale et solidaire, en s’appuyant sur une agriculture biologique, saine et créatrice d’emplois. Enfin, le service public est une de nos priorités : nous ne voulons pas supprimer d’emplois, mais en rajouter, notamment dans l’Education et la Santé.
Cette campagne a débuté aux lendemains de la Présidentielle : quelles sont vos impressions sur cette campagne éclaire ?
Jacques Casamarta : Jean-Luc Mélenchon a réalisé une très belle élection. En Corse, nous avons gagné un peu plus de 6000 voix dans l’île et progresser d’un peu plus de 5 %, ce qui est très important. On pense que le programme qui est le nôtre a de l’avenir, et on dit aux gens : « ne vous trompez pas de colère ». Macron n’est en fin de compte que la continuation de François Hollande, donc il y a aujourd’hui une réelle importance à bien poser les questions politiques : ce « troisième tour » doit nous permettre d’aller vers une cohabitation, pour mettre en avant l’intérêt général humain. C’est capital : le vote est une arme, et il faut s’en servir. On a besoin aujourd’hui de plus de Droits en tant que citoyens, en termes de Santé, de logements, d’emploi, etc … et nous avons de nombreuses propositions à faire dans tous les domaines.
Concernant la Corse, on considère par exemple que fort de nos mille kilomètres de côtes, il y a de nombreux métiers d’avenir liés à la mer qu’il convient de développer : la France Insoumise avait fait la proposition d’une Université dévolue à l’apprentissage de ces métiers, pourquoi pas en Corse ? Notre jeunesse doit se tourner vers ces métiers d’avenir et les nouvelles technologies. Il faut sortir de la politique du tout-tourisme et proposer un développement différent, afin de sortir du marasme dans lequel nous sommes aujourd’hui.
Vous l’avez dit : une percée pour la France Insoumise à la Présidentielle, mais une percée aussi pour le Front National, particulièrement forte dans cette première circonscription. Aujourd’hui, avec un candidat porté par le député sortant, un FN fort de ses récents résultats, une candidate « En Marche ! » sponsorisée par le nouveau Président de la République et une candidature « d’union » des nationalistes, pour ne citer qu’eux, quelle place pour la Corse insoumise pour cette législative ?
Nous le disons : nous visons le second tour. On pense qu’il y a une place. Bien entendu il y a ici une droite très forte, et derrière, avec les forces que vous avez citées, je pense que l’on se tient tous dans un mouchoir de poche. C’est la raison pour laquelle on s’adresse aux électeurs et on leur dit : ne vous trompez pas de colère. Cela fait 50 ans que ça dure, un coup la Droite, un coup la Gauche … Aujourd’hui les nationalistes ont pris le pouvoir à l’Assemblée de Corse, mais fondamentalement, nous expliquons aux électeurs : si vous voulez changer votre vie, il va falloir des mesures extrêmement concrètes, et renégocier des traités européens, qui selon nous créent de l’austérité. Nous ne sommes d’ailleurs pas pour sortir de l’Europe, comme on nous l’a reproché pendant la Présidentielle. Nous pensons cependant qu’il faudra à termes sortir de cette cinquième République, et aller vers une sixième, où la Corse trouvera plus facilement sa place demain.
Ce que l’on a constaté, c’est que quand on rencontre les gens et qu’on parle de notre programme, je vous assure que l’on détourne les gens du vote FN. Quand on recentre les problèmes sur ce que le capitalisme a semé, les gens nous entendent. Enfin, quel que soit, le résultat, sachez que nous serons toujours présents, sur le terrain, pour faire cette éducation populaire que les médias ne font pas, et proposer d’autres choses que les pensées courtes et mondialistes que l’on entend partout. Nous serons toujours là pour expliquer aux gens que le voisin n’est pas l’ennemi : l’ennemi c’est le Capital.