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Le préfet Pascal Lelarge attaque le nouveau règlement intérieur de l’Assemblée de Corse


Nicole Mari le Mercredi 23 Février 2022 à 19:22

Dernier cadeau d’adieu en date de l’ex-Préfet de Corse, juste avant son départ, Pascal Lelarge attaque le nouveau règlement intérieur de l’Assemblée de Corse, adopté lors de la session de décembre. Profitant du contrôle de légalité, il met en cause l’article 1er dudit règlement, notamment l’expression « peuple corse » et l’utilisation de la langue corse dans les débats. Il demande la révision de l’article dans les meilleurs délais.



L’hémicycle de l’assemblée de Corse. Photo Michel Luccioni.
L’hémicycle de l’assemblée de Corse. Photo Michel Luccioni.

Décidément, le Préfet de Corse, Pascal Lelarge, ne digère pas son remplacement. Dans la lutte ouverte qu’il a mené sans concession et sans états d’âme contre le pouvoir nationaliste corse, le bouquet final est particulièrement croustillant ! Dans un courrier daté du 18 février, que CNI s’est procuré, et adressé à la présidence de l’Assemblée de Corse, il attaque, dans le cadre du contrôle de légalité, le nouveau règlement intérieur adopté à l’unanimité le 16 décembre dernier et appliqué en séance depuis le début de cette année. 

 

Pas de peuple corse

Posant le principe qu’un « règlement intérieur ne peut pas déroger aux règles de fonctionnement des assemblées délibérantes ou être contraire aux principes du droit », il dénonce l’article 1er du nouveau règlement corse qui stipule que « l’assemblée et le Conseil exécutif sont garants du peuple corse ». Pascal Lelarge écrit: « Au-delà de l’expression « peuple corse » qui fera l’objet d’un développement ultérieur, cette formulation apparaît en dehors du champ du règlement intérieur d’une assemblée, dans la mesure où elle porte aussi sur l’exécutif, qui n’est pas concerné par ce texte. Ainsi cette formulation empiète sur le champ de la définition des compétences de ces organes, lesquelles sont pourtant fixées par la loi. Or, un règlement intérieur ne peut comporter que des mesures concernant le fonctionnement interne de l’institution concernée ». Il ajoute que « le vocable utilisé est contraire à à la notion de République indivisible, inscrite à l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 ». Il cite une décision de 1991 du Conseil constitutionnel qui a « censuré la référence à un peuple corse on se fondant sur l’article 1er de la Constitution selon lequel « la France assure l’égalité de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion » pour considérer que la Constitution ne connaissait que le peuple français. Il en résulte que la notion du peuple corse utilisée est contraire à la décision du Conseil constitutionnel ». A un petit détail près, c’est que la référence au peuple corse est inscrite dans le PADDUC qui a fait l’objet d’une loi, et que cette référence y figure encore.

 

Pas de langue corse

Pascal Lelarge s’en prend, ensuite, à l’utilisation de la langue corse en séance plénière de l’Assemblée de Corse. Le nouveau règlement intérieur reconnaît les langues corse et française comme langue de débat. « Or, l’article 2 alinéa 1er de la Constitution dispose que « la langue de la République est le français », écrit-il. « En outre, l’article 1er de la loi 94–665 du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française précise qu’étant « langue de la République en vertu de la Constitution, la langue française est la langue de l’enseignement, du travail, des échanges et des services publics ». Il indique également que « le Conseil d’État a censuré par un arrêt du 29 mars 2006 l’article 15 du règlement intérieur de l’assemblée de la Polynésie française reconnaissant aux orateurs le droit de s’exprimer en séance plénière dans des langues autres que le français, langue officielle de cette collectivité d’outre-mer ». Et assène : « Cette autre modification est donc également irrecevable ». Là encore, à deux détails près : le règlement intérieur ne prévoit pas d’utiliser la langue corse dans les actes administratifs, et le bilinguisme est appliqué dans l’île. Le préfet conclut, donc, son courrier, que « l’alinéa 1er du règlement modifié est contraire à la Constitution et doit être révisé dans les meilleurs délais, en supprimant les mentions relatives au « peuple corse » et instituant la langue corse comme langue de débat ». Il précise que « ce courrier vaut recours gracieux et de ce fait, suspend les délais au contentieux ». Nul doute que ce dernier cadeau d’adieu de Pascal Lelarge sera abondamment commenté, jeudi matin, lors de la session de l’Assemblée de Corse.

 

N.M.