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Jean-Guy Talamoni : « C’est un dérapage d’Emmanuel Macron ! C’est absurde ! »


Nicole Mari le Vendredi 5 Avril 2019 à 22:43

Un dérapage absurde. Le président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, tente sagement d’éteindre l’incendie et d’apaiser la vague de protestation qu’ont soulevé les nouvelles paroles malheureuses prononcées par Emmanuel Macron, à Cuzzà, jeudi, lors du grand débat. Le président de la République a accusé les Nationalistes de « faire bégayer l’histoire », exigé un acte de repentance collective et affirmé : « Rien ne peut progresser, si avec ceux qui veulent porter cette identité, on ne condamne pas aussi les crimes qui ont été commis ». Réaction pour Corse Net Infos.



Le président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni. Photo Michel Luccioni.
Le président de l'Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni. Photo Michel Luccioni.
- Comment réagissez-vous aux propos du président Macron concernant l’assassinat du préfet Erignac ?
- Je pense que c’est un dérapage. Le président de la République s’est laissé emporté par ses propres propos parce que sinon, ce serait inquiétant. Considérer que les Corses sont, de manière collective, responsables de ce qu’il s’est passé il y a 20 ans et considérer que cet événement est de nature à disqualifier les Corses pour ouvrir un dialogue et demander un certain nombre d’évolution de leur situation, paraît complètement absurde. Je suppose qu’Emmanuel Macron n’a pas dit cela de manière réfléchie. J’espère que nous allons dépasser cette position qui a, d’ailleurs, déclenché un certain nombre de réactions extrêmement défavorables, y compris de la part de Corses qui sont très loin de notre majorité.
 
- Les propos présidentiels semblent particulièrement viser les Nationalistes…?
- Les Corses, de manière collective, ne sont pas coupables de cet événement. Les Nationalistes, non plus ! Je rappelle qu’il y a eu des condamnations extrêmement lourdes, notamment celle d’un militant nationaliste qui a toujours contesté sa participation à ces faits. Yvan Colonna a été condamné sur la base d’un dossier extrêmement fragile. Sortir, aujourd’hui, cet argument pour justifier l’absence de volonté de dialogue, est, je le répète, complètement absurde ! Nous avons manifesté notre désapprobation totale concernant cet argument. Il est évident que, pour notre part, nous ne pouvons pas nous y arrêter. Il faut passer à autre chose !
 
- Et si c’était une vraie conviction du chef de l’Etat… que ferez-vous ?
- Si Emmanuel Macron insiste et maintient que c’est le vice rédhibitoire et définitif disqualifiant les Corses, il faudra, évidemment, prendre les choses autrement. Mais bon, à ce stade, je veux croire que c’est un simple dérapage. Nous allons réunir notre majorité pour envisager la suite des opérations et essayer de dépasser la situation créée par le refus du dialogue d’Emmanuel Macron. Nous l’avons invité à venir discuter devant l’Assemblée de Corse et il a refusé. Le refus du dialogue est clair.
 
- Emmanuel Macron a répliqué : « Je ne réponds pas à une convocation, ou alors c'est une perte de repères totale ».
- Ce n’était pas une convocation, mais une simple invitation. Il aurait du, dans le cadre de son déplacement en Corse, prendre, lui-même, l’initiative de venir débattre devant l’Assemblée de Corse. Cela aurait du être naturel de sa part ! C’est, d’ailleurs, ce qu’ont fait son prédécesseur, François Hollande et, avant lui, son Premier ministre Manuel Valls. C’est ce qu’avait fait Lionel Jospin en son temps. C’est ce que font les responsables de ce niveau qui arrivent en Corse. Ils s’adressent aux élus légitimes de la Corse dans leur diversité. Emmanuel Macron aurait rencontré notre majorité, également l’opposition, y compris des élus qui le soutiennent.
 
- Des élus d’opposition affirment avoir subi des pressions pour ne pas assister au débat de Cuzzà. Est-ce vrai ?
- C’est totalement faux ! Il n’y a pas eu de pression du tout pour ne pas aller au débat. Des pressions, il y en a eu, y compris sur des élus, mais c’était lors des mandatures qui ont précédé notre prise de responsabilités en décembre 2015. Avant, il y en a eu des pressions ! Nous, nous n’exerçons de pressions sur personne !
 
Propos recueillis par Nicole MARI.