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Jean-Félix Acquaviva et Petr'Anto Tomasi en binôme dans la circonscription de Corte-Balagne


Nicole Mari le Jeudi 11 Mai 2017 à 20:17

A moins d'un mois du premier tour de scrutin, la crise semble, enfin, résolue pour les Nationalistes dans la seconde circonscription de Haute-Corse. Ce sera finalement le tandem Jean-Félix Acquaviva - Petr'Anto Tomasi qui portera les couleurs de la majorité territoriale sous l'étiquette Pè à Corsica aux élections législatives de juin. Le conseiller exécutif, élu de Femu à Corsica, président de l'Office des transports et maire de Lozzi, et le président du groupe Corsica Libera à l'Assemblée de Corse, entendent bien ravir un siège laissé vacant par le député sortant, et porter le premier Nationaliste au Palais Bourbon. Jean-Félix Acquaviva explique, à Corse Net Infos, toute la détermination du mouvement national à renforcer sa légitimité démocratique pour défendre l'intérêt de la Corse et obtenir des avancées notables.



Jean-Félix Acquaviva
Jean-Félix Acquaviva
- Le suspense est terminé, vous avez obtenu gain de cause. Dans quel état d'esprit êtes-vous ?
- J'ai toujours dit qu'il fallait raisonner politiquement par rapport à cette élection. Il était important que la majorité territoriale et la démarche Pè à Corsica se donnent les moyens de remporter ce scrutin pour donner un signal fort, historique et politique à Paris. Ceci, dans un contexte de renouvellement politique de la République française et dans un contexte de dialogue éventuel à renforcer, suite au dégel des relations de la mandature nationaliste avec le gouvernement précédent, Jean-Michel Baylet en particulier. Il fallait choisir le candidat le mieux placé, selon les retours d'acteurs économiques et politiques et selon l'avis de la majorité territoriale. La majorité territoriale a décidé de faire en sorte que je sois candidat dans la 2eme circonscription.

- Pourquoi êtes-vous resté aussi silencieux pendant toute la crise ?
- Il fallait que les discussions aillent jusqu'à leur terme. Aujourd'hui, c'est le cas. Nous allons aborder ce scrutin avec l'intention de donner au nationalisme corse et à la Corse les premiers députés qui permettront de défendre uniquement l'intérêt du peuple corse, et pas autre chose ! 

- Les tensions avec le PNC (Partitu di a Nazione corsa) et Jean-Christophe Angelini sont-elles apaisées ?
- Il y a eu plus de discussions en termes de débat démocratique que de tensions ! Il y a eu un large choix assumé du président du Conseil exécutif, des mouvements de la majorité territoriale, des élus, du président de l'Assemblée de Corse.. d'aller dans ce sens. Jean-Christophe Angelini a dit qu'il ferait tout pour que les candidats de Pè a Corsica gagnent cette élection, y compris dans la 2eme circonscription. Tout le monde est, aujourd'hui, sur le pont, toute la force militante, adhérente, est motivée pour enraciner l'espoir et, après décembre 2015, confirmer cette révolution démocratique que nous vivons depuis deux ans. Nous savons que les Corses attendent que nous envoyons un message fort à Paris afin d'obtenir le saut qualitatif nécessaire pour garantir un avenir à notre île.

- Vous partez finalement en binôme avec Corsica Libera. Est-ce la reconduction de l'accord politique du 2nd tour des territoriales ?
- Oui ! C'est un accord politique global d'équilibre général sur l'ensemble des circonscriptions. Les candidats se dévoileront les uns après les autres de manière unie sous la bannière Pè a Corsica. C'est elle qui a gagné la révolution démocratique de 2015, qui continue d'être en responsabilité à l'Assemblée de Corse et qui s'inscrit dans la durée.

- Qu'est-ce qui a motivé le choix de Petr'Anto Tomasi comme suppléant ?
- C'est un choix politique naturel. Il n'a suscité aucune discussion. Je suis ravi de ce choix dans la mesure où il permet de démontrer la complémentarité des forces politiques qui composent l'union Pè a Corsica, mais aussi par les qualités de Petr'Anto lui-même. Ses qualités politiques, son travail accompli à l'Assemblée de Corse, sa maturité, sa volonté de s'inscrire dans la durée font qu'il va donner un véritable sens à notre binôme. On ne choisit pas une personne pour faire office de deuxième, on choisit une personne qui donne une perspective politique d'avenir et qui démontre qu'il y aura d'autres générations qui viendront après nous. 

- Le 1er tour de scrutin est dans moins d'un mois. N'est-ce pas un peu tard pour partir en campagne ?
- Je ne pense pas, eu égard aux divisions très fortes de la droite et de la gauche ou de l'ancien système Giacobbiste. Il est évident que les Corses attendent qu'on leur offre une voie cohérente, une voie d'espoir. Ils attendaient que nous nous mettions en route pour relever le challenge et remporter ce scrutin dans l'intérêt collectif. Les échos, qui nous reviennent du terrain, sont très bons. Ce sont des échos de mobilisation, suite au travail accompli durant cette mandature. Nous sommes très sereins quant au jugement des Corses dans cette circonscription.

- Comptez-vous l'emporter ?
- Nous avons l'ambition de faire en sorte que ce scrutin soit historique pour la Corse et le nationalisme corse. Nous pensons qu'il a beaucoup d'échos pour que ce soit le cas. Nous ferons tout pour concrétiser cette ambition et ces échos. Nous sommes à fond dans la bataille avec l'ensemble des militants et des adhérents qui composent la démarche.

- Sur quels thèmes prioritaires ferez-vous campagne ?
- Sur deux grands thèmes. Le premier est, après 50 ans de combat politique qui ont amené les Nationalistes corses aux responsabilités, d'envoyer un message à Paris. La France est en pleine mutation depuis les élections présidentielles. La Corse doit atteindre un saut qualitatif, c'est-à-dire obtenir le pouvoir législatif de plein droit dans des domaines importants, obtenir le transfert de la compétence fiscale et d'autres compétences en termes de gestion, avancer de manière significative sur la coofficialité de la langue et sur le foncier avec le statut de résident. Enfin, clôturer les 50 ans de combat et de conflit par le rapprochement des prisonniers et l'amnistie.

- Quel est le second thème ?
- C'est la concrétisation d'un certain nombre de revendications et de sujets qui sont déjà en train d'être mis en œuvre. Par exemple, la zone fiscale prioritaire de montagne, suite à l'obtention du statut d'île montagne au Parlement. Ou encore, l'enveloppe de continuité territoriale en termes de dotation, et sa réévaluation, des adaptations réglementaires immédiates sur les normes de service public concernant la santé et l'éducation dans le rural et la montagne. Ces deux piliers vont de pair. Nous serons concrètement très actifs en faisant un lobbying permanent.

- Vos adversaires ne manqueront pas de rétorquer que, ne pouvant vous adosser à un parti national, vous aurez du mal à faire entendre votre voix. Que répondez-vous ?
- Si être affilié à un grand parti parisien apportait beaucoup d'avancées pour la Corse, ça se saurait ! On assiste, en Corse, à la course aux étiquettes : En Marche, Les Républicains... Ça n'a plus de sens ! Ça fait des décennies que les députés sont affiliés aux partis de droite et de gauche qui ont des lignes politiques monolithiques et n'intègrent pas la reconnaissance de notre spécificité. Jusqu'à aujourd'hui, les députés corses n'ont eu, ni la volonté politique, ni l'influence nécessaire pour obtenir le saut qualitatif qu'attendent les Corses. Preuve en est, notre travail sur les adaptations législatives, notamment l'île montagne, que nous avons mené à distance. Élire un député nationaliste engendrera un effet médiatique et politique très fort, de renforcer notre légitimité démocratique dans les discussions avec le gouvernement et de structurer une démarche avec d'autres députés pour peser en termes de rapport de forces politiques et obtenir ce que la Corse demande.

- Quels députés ?
- Des députés d'autres territoires qui ont des aspirations d'émancipation, comme les députés bretons, ou des députés pour qui la reconnaissance de la question Corse ne pose pas de problèmes en termes de spécificité ou de peuple corse. Les lignes bougent, y compris au sein du Palais Bourbon. Il n'y aura pas de majorité uniforme, mais une majorité très hétérogène avec des tendances. Nous avons l'opportunité, après avoir pris quelques contacts, d'avoir un poids beaucoup plus fort en s'alliant avec d'autres pour porter, d'une même voix, la reconnaissance des territoires, de leurs spécificités, dès communautés et des langues. La période, qui s'ouvre, créé des espaces d'opportunité qui n'ont jamais été aussi grands. Nous pensons que la conjonction de la légitimité démocratique, renforcée par les urnes, et le débat idéologique sur l'avenir de la République française issue des élections présidentielles, nous permettra, dans le dialogue, d'obtenir des avancées significatives et historiques.

- Quel sera, si vous êtes élu, votre première priorité ?
- Ce sera de structurer une démarche politique entre l'Exécutif territorial, l'Assemblée de Corse et les parlementaires corses et non-corses autour d'une plateforme programmatique qui pourrait faire rentrer de manière forte au Palais Bourbon : la reconnaissance du peuple corse et de sa langue, et la recherche d'une solution politique. Ce sera une priorité immédiate, dans les semaines qui suivront l'élection. Ce sera, à la fois, un travail médiatique et un travail politique de regroupement. On a vu, avec ce qui s'est passé en Guyane notamment, que les attentes des territoires ultramarins sont posés, aujourd'hui, de manière forte, non seulement en termes de retard d'infrastructures, mais aussi en termes d'autonomie. 

- Vous êtes président de l'Office des transports avec de lourds dossiers en attente. Comment allez-vous gérer ce double front pendant la campagne électorale ?
- Je travaille en même temps que je suis en campagne. Je présenterai, à la prochaine session des 1er et 2 juin, deux rapports importants. Le premier sur la compagnie maritime d'investissement et l'autre sur l'acquisition des deux navires, le Paglia Orbu et le Nicoli. Au mois d'octobre, seront présentés les propositions définitives concernant les deux SEMOP maritimes et le cahier des charges de la futur DSP (Délégation de service public) 2019-2029. Ces deux rapports sont quasiment prêts. Donc, je ne laisse rien au milieu du gué ! Je laisse, à mon successeur, une situation en voie de décision définitive. 

- Si vous élu, quels mandats conserverez-vous ?
- Contrairement à d'autres qui étaient des députés hors sol, je resterai, si je suis élu, un député ancré dans la réalité Corse et à proximité immédiate des territoires. Je resterai président du Comité de massif et je m'occuperai notamment de la mise en œuvre du Schéma d'aménagement et de développement de la montagne qui est très important pour les territoires de l'île. J'assurerai également le suivi des contrats de ruralité, des pôles d'équilibres des territoires ruraux (PETR) et des aides aux intercommunalités et aux communes rurales et de montagne notamment. Je ferai le lien de manière beaucoup plus forte entre le local et le contenu des adaptations réglementaires et législatives à proposer et à structurer. Je resterai conseiller politique et technique auprès du président de l'Exécutif et du prochain président de l'Office des transports dans le cadre du suivi des dossiers maritimes et aériens.

- Resterez-vous maire de Lozzi ?
- Je resterai maire de Lozzi au moins jusqu'en décembre. Ensuite, si je suis élu conseiller territorial, je choisirai de laisser la mairie à un de mes conseillers municipaux, sachant que j'ai une équipe jeune et dynamique à laquelle je peux transmettre le flambeau sans problème. 

Propos recueillis par Nicole Mari.

Petr'Anto Tomasi
Petr'Anto Tomasi