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Jean Baggioni : "Il faut, au minimum, deux à trois listes de droite au 1er tour des élections territoriales !"


Nicole Mari le Dimanche 12 Juillet 2015 à 21:47

S’il s’est retiré de la gestion des affaires publiques, Jean Baggioni n’en demeure pas moins très présent sur la scène politique. L’ancien président du Conseil exécutif de l’Assemblée de Corse, ancien maire de Ville-di-Pietrabugno, accompagne, depuis sa création, le mouvement de droite, « Une nouvelle Corse », et son leader, Jean-Martin Mondoloni, en course pour les élections territoriales de décembre prochain. Il explique, à Corse Net Infos, qu’il est choqué par la guerre des chefs qui déchire la droite du Sud et inquiet de l’absence de vrais leaders au Nord. Partisan d’une offre libérale plurielle au 1er tour, il affirme la nécessité absolue de l’union au 2nd tour pour accéder à la victoire.



Jean Baggioni, aux côtés du leader de la Nouvelle Corse, Jean-Martin Mondoloni, et d'Anne Moretti qui fait partie de la démarche.
Jean Baggioni, aux côtés du leader de la Nouvelle Corse, Jean-Martin Mondoloni, et d'Anne Moretti qui fait partie de la démarche.
- Que vous inspire la guerre qui déchire la droite en Corse-du-Sud ?
- Vous voulez la vérité ! Je suis profondément choqué par ce qui se passe à droite en Corse-du-Sud, non par la question des hommes, mais par la situation créée qui semble conditionner la suite des évènements préparatoires des élections régionales. Cela me désole ! D’abord, la Corse, c’est autre chose que les élections départementales de Corse-du-Sud. Ensuite, la chicaya, qui a été volontairement installée, traduit des attitudes que je réprouve.
 
- Lesquelles ?
- Ce n’est pas une démarche politique de faire ce qu’on a fait au président Panunzi ! Ce n’est pas une démarche politique que d’instruire, chaque jour, par voie de presse, des querelles du style : « Mais, on va vous donner ceci… On va vous donner cela… ». Je suis révolté par la droite qui, dans cette démarche-là, ne fait preuve, ni de dignité, ni de réalisme, ni de sagesse.
 
- Que pensez-vous de l’attitude de la droite en Haute-Corse ?
- En Haute-Corse, je suis désolé de constater qu’il ne se passe rien !
 
- La droite du Nord a une tendance manifeste à retourner sa veste et à rallier Paul Giacobbi. Ce n’est pas rien ?
- C’est vrai, mais je ne parlais pas de ralliement ! Je dis qu’il n’y a rien parce qu’il n’y a pas de leaders, pas d’organisation, pas de convictions, pas d’honnêteté intellectuelle, pas de politique ! J’observe, et vous avez raison de le souligner, la faiblesse de la droite face au pouvoir exercé par la majorité dirigée par Paul Giacobbi. Cette faiblesse ne les conduit même pas à protester contre les mensonges et les absurdités que l’on voit et que l’on entend ! Quelqu’un en Corse est-il persuadé que ça va bien ? Il n’y a que ceux qui gouvernent pour nous dire que ça va bien ! Tous les autres se rendent compte que ça va mal ! L’opposition de droite est chloroformée et ne dit rien ! J’attends qu’elle se manifeste. Quand elle se manifestera, j’apprécierai !
 
- Ne craignez-vous pas les conséquences électorales de ces retournements ?
- Les électeurs gardent leur liberté, leurs convictions et leurs valeurs et ne sont pas disposés à suivre ceux qui se donnent ou se vendent ! La droite devrait y réfléchir. Les jours passent. Il y aura des élections territoriales. D’autres échéances électorales suivront. Pour l’heure, il y a la nécessité urgente et absolue de rassembler les hommes et les femmes qui ont des convictions et des valeurs. C’est pour cela que je suis aux côtés de Jean Martin Mondoloni, qui a une vraie démarche. Nous, nous travaillons auprès des électeurs.
 
- Que pensez-vous de l’affrontement entre José Rossi et Camille de Rocca Serra pour conduire la liste UMP ?
- Camille s’installe dans une observation attentiste qui me paraît un peu trop longue et trop lente. José fait des offres parce qu’il voudrait bien sortir de cette difficulté dans laquelle l’ont mis les Ajacciens en créant le clash des élections départementales. Ce n’est pas réjouissant !
 
- Etes-vous partisan d’une offre libérale plurielle ou d’une liste d’union dès le 1er tour ?
- Non ! Non ! Une liste d’union ne va jamais marcher ! Jamais ! Il faut, au minimum, deux à trois listes de droite au 1er tour. La divergence n’est pas une division, c’est une diversité d’offres qui, au contraire, permettra de réfléchir et de séparer le bon grain de l’ivraie pour avoir la sagesse d’aller à une victoire.
 
- L’union au 1er tour n’a pas marché dans un système droite/gauche. Mais, dans le système tripartite actuel, droite/gauche/nationaliste, n’est-ce pas prendre le risque d’être distancé et affaibli ?
- Pourquoi ? Pensez-vous que les Nationalistes sont unis ? Personne ne le pense ! Personne ne le croit ! Personne n’imagine qu’il n’y aura qu’une seule liste nationaliste ! On sait compter ! Ils n’ont aucune chance d’arriver en tête ! Je ne dirai pas dans quel ordre se fera l’arrivée, mais je ne pense pas que les Nationalistes pourront arriver en tête, s’ils ne sont pas sur une seule liste. Et il n’y aura pas une seule liste ! Vous imaginez que Jean-Christophe Angelini et Gilles Simeoni partagent les mêmes idées et les mêmes objectifs et qu’à eux-deux, ils partagent avec Jean-Guy Talamoni, ces mêmes idées et objectifs ? L’amour de la Corse est un fait qui réunit tout le monde ! Dire que la droite est libérale donne l’impression qu’on réunit tout le monde, mais la réalité est autre.
 
- Dans ce cas, une union des forces de droite au 2nd tour est-elle réalisable ?
- Oui ! Il faudra bien s’entendre au soir du 1er tour des élections territoriales ! Ce sera la solution sine qua non et unique pour que la droite puisse redémarrer ! A ce moment-là, il y aura un espoir de reconquête, non pas du pouvoir, mais d’une certaine autorité et d’une certaine sympathie auprès de notre électorat.
 
- Croyez-vous possible une victoire de la droite?
- Oui ! La victoire est possible !
 
- Vous semblez très inquiet pour la prochaine mandature qui durera deux ans. Pourquoi ?
- Je suis inquiet pour ce que pourra devenir la collectivité. Pendant deux ans, il ne se passera rien ! La collectivité territoriale de Corse va réfléchir à ce que sera la collectivité unique, une fois que la fusion des trois collectivités, l’actuelle et les deux départements, sera effectuée. Elle va réfléchir à la mutualisation et à l’unicité d’une politique. Elle sera paralysée par les problèmes d’organisation administrative et institutionnelle, de fusion de budgets et de moyens… Cela entrainera, à mon avis, un certain blocage de l’économie insulaire. Ce qui ne sera pas facilement supportable pour la Corse. Je suis inquiet pour la Corse et pour les acteurs économiques.
 
- Estimez-vous cette réforme inopportune ?
- Je dis que cette réforme institutionnelle improvisée ne tient pas compte des réalités économiques qui peuvent être dangereusement impactées par ces évolutions et ces précipitations. Pour l’heure, c’est une coquille vide. Les ordonnances ne disent pas quel en sera le fonctionnement, comment se fera la fusion des patrimoines, des personnels, comment faire disparaître les doublons… Il y a déjà pléthore de fonctionnaires pour servir une même collectivité dans l’unicité d’un programme ! Croyez-vous que l’addition 1 + 1 + 1 sera égale à l’efficacité ? Non ! Elle n’est proche, ni de l’efficacité, ni de ce qui est attendu, ni du réalisme !
 
- En tant qu’ancien président de l’Exécutif, pensez-vous que la tâche sera particulièrement dure pour la majorité qui sortira des urnes en décembre ?
- La situation n’est dure que quand on est faible ! Pas quand on est fort, qu’on a des convictions et de la volonté ! Des hommes déterminés, qui auront le courage de parler et d’agir clairement, pourront surmonter certaines difficultés. Mais, je ne pense pas que nous en prenions le chemin ! Nous sommes dans les chicayas politiciennes. Je n’entends pas beaucoup de discours et de propositions pour la prise à bras-le-corps des problèmes économiques et sociaux qui s’annoncent graves dans le contexte national et européen, et accentués dans le contexte insulaire nouvellement conçu. Je ne vois pas, dans l’état d’esprit qui anime les acteurs politiques, cette détermination à aborder les problèmes avec sérieux et pugnacité. Ceux, qui sont aux affaires, se félicitent de ce qu’ils font ! Ceux, qui veulent y accéder, ne font aucune proposition ! Ils vont à décembre 2015, comme si c’était une échéance banale, alors que c’est une échéance essentielle, capitale ! On va s’engager, le 1er janvier 2016, dans une évolution qui est une véritable révolution. Il faudra de la sagesse, de l’effort, du courage et de l’application pour résoudre les problèmes. Je ne suis pas certain que ceux-ci soient présents dans le débat !
 
Propos recueillis par Nicole MARI.