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Jacqueline Gourault et le Contrat de Cahors : « Instaurer un dialogue de confiance entre l’Etat et les collectivités »


José Fanchi le Mardi 10 Juillet 2018 à 22:00

Proposé par le gouvernement lors de la Conférence nationale des territoires à Cahors en décembre 2017, le « Contrat de Cahors » est le pacte financier entre l’Etat et collectivités. Cette contractualisation concerne 322 collectivités locales les plus importantes représentant plus de 80% des dépenses publiques. Avec 92,757 millions de dépenses réelles de fonctionnement constatées au compte de gestion de 2017, la commune d’Ajaccio est donc concernée ainsi que celle de Pietrosella, 17e volontaire, comme l’a souligné la ministre au moment de la signature du contrat de Cahors



(Photo M. L)
(Photo M. L)
Le dispositif financier vise à réduire les déficits publics inscrits dans la loi de finances 2018-2022. Parmi les mesures, les collectivités locales doivent limiter l’augmentation de leurs coûts de fonctionnement de 1,2% par an. Depuis 2014 et les conclusions de l’audit financier, la Ville s’est engagée dans la voie du désendettement et de la réduction de ses dépenses de fonctionnement. A travers cette démarche volontariste, la commune entend ainsi poursuivre son effort de maîtrise financière.
De plus, pour la Ville d’Ajaccio, le gel, puis la baisse des dotations depuis 2014, a engendré une perte financière cumulée de 11,5 millions d’euros. Si la Ville avait bénéficié d’un même contrat depuis 2014, aucune baisse ne lui aurait été appliquée et la Ville aurait constaté en 2017, 5 millions d’euros d’épargne supplémentaire avec un encours de dette qui aurait baissé de 11 millions d’euros depuis 2014.
 

Dépenses de la ville
La loi de programmation des finances publiques prévoit un dispositif de contractualisation avec les principales collectivités territoriales et intercommunalités. Il est ainsi prévu que la participation des collectivités locales au redressement des comptes publics, à compter de 2018, ne se traduira plus par une baisse de la dotation globale de fonctionnement (DGF), mais par un « engagement d’économies ».
Il s’agit de faire réaliser 13 milliards d’économies aux collectivités d’ici 2022.


L’objectif de contribution à l’effort de réduction du déficit public et maîtrise de la dépense publique se déploie sur les 3 exercices budgétaires 2018, 2019, 2020.
Après plusieurs réunions de négociations tenues entre les services de l’Etat et les services de la Ville, il est acté dans le contrat de partenariat 2018-2020, un encadrement des dépenses réelles de fonctionnement de la Ville dans la limite de 1,35% d’augmentation par an, ainsi que la poursuite du désendettement.
L’article 13 prévoit que les dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales et de leur groupement à fiscalité propre, progresseraient de 1,2% par an. Et prévoit également une réduction annuelle du besoin de financement de 2,6 Md€. L’article 29 concerne les mesures destinées à assurer le respect de ses objectifs.
En fonction du respect ou non du seul objectif contractuel de fonctionnement de la Ville, un système de malus sera appliqué.
 

 
Un long travail de négociations…
Jacqueline Gourault s’est félicitée de cette venue à Ajaccio et n’a pas caché une certaine fierté de voir la cité Impériale signer ce contrat. Ce qu’elle a fait également pour la commune de Pietrosella, le 17e volontaire signataire :
 « C’est en effet à Cahors qu’a été signé le principe des contrats, au moment même où un certain nombre de critiques ont fusé sur ce sujet. Tout a été négocié et cela a fait l’objet d’une loi. Je tenais à vous rappeler que -  le maire d’Ajaccio l’a souligné précédemment -  c’est au fond une rupture dans les relations financières entre l’Etat et les collectivités territoriales. En effet, la logique de la contribution du redressement des finances publiques, qui étaient en place sous le précédent quinquennat, a fait que dix milliards d’euros ont été prélevés ces quatre dernières années. Nous avons choisi une autre méthode, qui est la méthode de la contractualisation avec les communes, en leur demandant de limiter la progression des dépenses de fonctionnement. Il ne s’agissait pas de demander une baisse mais simplement d’essayer de limiter les dépenses de fonctionnement à plus 1,2%  d’augmentation.
« L’objectif collectif est d’essayer de limiter les dépenses collectives, pas seulement des collectivités territoriales, mais aussi de l’Etat et de la sécurité sociale. La loi de programmation des finances publiques, qui crée des contrats, prévoit des efforts de même ampleur voire plus, pour les deux autres branches, c'est-à-dire la sécurité sociale  et l’Etat. Il faut également ajouter que le gouvernement a pris le pari, en parallèle, de maintenir la hausse des aides de l’Etat sur le plan des subventions d’investissement. C’est important dans la mesure où la dotation de solidarité de soutien à l’investissement local et la DETR ont été maintenues à un niveau très élevé avec une augmentation de 5%. « 


Un taux de 1,2 à 1,35% !
La ministre s’est adressée directement au maire d’Ajaccio :
« Je tiens à féliciter le maire d’Ajaccio pour les efforts importants qui ont été entrepris. Ils n’ont pas commencé avec la signature de ce contrat. C’est une certaine officialisation de votre politique d’essayer de limiter les dépenses publiques et, bien sûr,  qui permet l’investissement car je sais que vous avez été très attentif aux négociations.
«Je peux remercier à la fois vos services, vos adjoints et bien sûr les services de l’Etat car c’est un travail très important. Au terme de la négociation qui a été menée, il a d’ailleurs été décidé d’appliquer la modulation favorable pour tenir compte de la situation particulière, soit un taux de 1,35% qui n’est pas appliquée uniformément. En effet, on tient compte d’un certain nombre de critères et de conditions pour signer ces contrats. Nous sommes attentifs à un certain nombre de points, notamment la capacité de désendettement de la commune qui est aujourd’hui d’un peu moins de vingt années. Elle est supérieure au plafond national de référence mais vous n’êtes pas responsable dans la mesure où vous avez un héritage. Vous avez néanmoins pris l’engagement, avec l’aide de cette politique, de limiter afin de revenir à un niveau d’endettement plus court. C’est tout à votre honneur et cela permet d’avoir une situation encore plus saine.
« Je rappelle enfin que ces contrats montrent la coresponsabilité dans la maîtrise des dépenses publiques  via une contractualisation  qui est adaptée aux spécialités et aux spécificités des territoires. Si  nous devions faire un vœu pour l’avenir, c’est celui d’un dialogue plus approfondi entre l’Etat et les collectivités locales, car ceux qui ne comprennent pas qu’il y a d es relations d’interdépendance, font fausse route ! Le prochain chantier, vous le savez, sera celui de la refonte de la fiscalité locale qui a été annoncé par le Président de la République  et qui sera l’occasion de moderniser le panier de ressources des collectivités territoriales. Il s’agit pour les communes de trouver les ressources qui vont remplacer la suppression de la taxe d’habitation. »
J. F

(Photos ML)
Pas de combat mais une relation positive…
- La signature d’un contrat avec une ville volontaire influe sur les relations entre l’Etat et les collectivités ?    
C’est très symbolique effectivement parce que la ville d’Ajaccio représente un symbole et fait partie des 322 communes appelées à signer le contrat. Le fait qu’une commune comme Pietrosella soit volontaire est un signe que beaucoup d’élus ont conscience que les rapports financiers entre les l’Etat et les collectivités locales ne doivent pas être un combat mais plutôt une relation positive au service des concitoyens

- Certaines villes signataires évoquent une mise sous tutelle de l’Etat ?
Il n’y a aucune mise sous tutelle de l’Etat, bien au contraire. Avant, Lorsqu’on décidait qu’on prélevait sur les 36 000 communes de France, sans tenir compte de leurs ressources, sans tenir compte d’aucun critère, qu’on leur prélevait arbitrairement des sommes sur la dotation globale de fonctionnement,  je ne suis pas sûre qu’il s’agissait d’ une autre liberté que celle que nous faisons aujourd’hui. Un contrat, il faut être deux, on signe ou on ne signe pas. Donc, c’est négocier, passer par la loi, cela correspond à une volonté de respecter un certain nombre de critères avec la situation financière de l’Etat qui doit être contrôlée pour ne pas dépasser nos engagements. Il ne faut pas que la dépense publique soit plus de 3% du PIB, ce que nous avons réussi cette année pour la première fois. Je crois que c’est au contraire une prise de conscience citoyenne que de signer ces contrats.

- La collectivité de Corse semble ne pas être d’accord avec la contractualisation. Est-ce un message ?
Je pense qu’il doit y avoir une majorité à Ajaccio pour le maire puisse signer. Non, ce n’est pas un message. La Collectivité de Corse n’a pas signé. Ceux qui sont à la tête de la collectivité le sont que depuis janvier dernier et ils ont peut-être porté davantage l’attention à la réforme constitutionnelle et qu’ils n’ont pas pris le temps pour envisager de signer un contrat. Lorsque j’ai dis ça tout à l’heure, je m’adressais d’une manière générale à ceux qui n’ont pas voulu signer… 
Propos recueillis par José FANCHI