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Inauguration de la rue Antoine Sollacaro à Ajaccio : La famille, l’émotion, l’amitié


José Fanchi le Samedi 3 Février 2018 à 17:26

Avec l’inauguration de la rue portant son nom, Antoine Sollacaro fait désormais partie du patrimoine ajaccien. La cérémonie s’est déroulée samedi en fin de matinée dans l’ancienne rue Marboeuf située devant le siège de la Communauté d’Agglomérations du Pays Ajaccien (CAPA). La rue Antoine Sollacaro va rejoindre le boulevard Dominique Paoli dès lors que les travaux du Baptistaire Saint Jean seront achevés



Inauguration de la rue Antoine Sollacaro à Ajaccio : La famille, l’émotion, l’amitié
Il y avait foule, de parents, d’amis, de proches, des anonymes, des avocats des barreaux d’Ajaccio, Bastia et Nice, des élus bien sûr, beaucoup d’élus pour cette cérémonie qui avait pour but de rendre hommage à l’ancien avocat assassiné le 16 octobre 2012. La  cérémonie était chargée d'émotion notamment lorsque la plaque portant le nom d’Antoine Sollacaro fut dévoilée par sa petite fille, en présence de la famille, Jeannine sa veuve, Paul et Anna-Maria, ses enfants.
"Plus que la mort tragique d'Antoine Sollacaro, c'est l'homme qu'il fut que j'ai voulu honorer. C'était un grand avocat, qui a marqué son époque. Qui a transmis la passion de ce métier aux jeunes générations et à ses enfants. C'était également un homme de convictions. Fervent nationaliste, il militait pour les droits de l'homme. L'hommage que nous lui rendons a du sens" a déclaré Laurent Marcangeli, qui avait pris cette initiative lors d’un conseil municipal de l’année dernière.


Un métier chevillé au cœur et au corps…
Le maire a salué au préalable tous les politiques et institutionnels venus assister à l’inauguration de la rue, ainsi que la veuve et les enfants d’Antoine Sollacaro qui étaient à ses côtés devant le siège de la CAPA. Le maire a rappelé qu’il n’était pas fréquent de changer le nom d’une rue :
« C’est très important en effet de changer un nom de rue qui a d’ailleurs fait l’objet d’un consensus au conseil municipal de la ville et a été adopté, il y a près d’un an, à l’unanimité. J’ai eu la chance de connaître Antoine personnellement et suis particulièrement lié à sa famille. Antoine Sollacaro, c’est un métier, avocat, qui a suscité bien des vocations. Il avait cette charge reliée au cœur et au corps d’une profession qui a bercé sa vie et continue de bercer la vie de ses enfants. Son métier c’était défendre et lorsqu’il entrait en défense, Antoine allait jusqu’au bout, il fonçait, décortiquait les dossiers méticuleusement. Il a exhorté les jurys avec passion, talent, engagement qu’il tenait de ses premières années de faculté. Il s’est engagé dans la mouvance nationaliste et en était l’un des piliers, puis l’un des défenseurs avec toujours autant de passion et de détermination. Il y avait aussi l’engagement humaniste, un militant des droits de l’homme au quotidien mais aussi associatif, ayant été représentant au niveau local et national de la Ligue. Aujourd’hui, la ville d’Ajaccio lui rend hommage en donnant son nom à une rue. Il entre désormais dans le patrimoine de notre ville. C’est un grand moment. Antoine Sollacaro est une personnalité de notre temps. C’est avec émotion et fierté que nous allons procéder à cette inauguration. »  

Gilles et Jean-Guy, les confrères, les amis

Inauguration de la rue Antoine Sollacaro à Ajaccio : La famille, l’émotion, l’amitié
Nous sommes ici au rendez-vous de la mémoire, de l’amitié et de l’amour. Le rendez-vous de l’émotion aussi et nous sommes heureux d’être là à vos côtés car nous vous aimons. Antoine était un homme de bien, profondément attaché à sa famille et il était jusqu’à la fin un militant politique défendant l’idée que ce peuple, notre peuple, à doit à la vie et à la reconnaissance. Antoine était un humaniste qui disait que les droits de l’homme devaient être au cœur de tous les choix de la société. Antoine était aussi et sur
tout un avocat, celui qui pour nous tous, d’Ajaccio et d’ailleurs, il était la figure de la défense. Dans cette assistance, je vois des femmes et des hommes qu’il a défendus et je pense à lui. Gardons au fond de notre cœur et de notre âme le souvenir de ses rires, de son œil amusé, de ses impertinences et de ses colères et de ses emportements que personne n’oubliera. Je me rappelle d’un coup de colère d’Antoine, un matin en lisant le journal qui traitait d’un article élogieux à son égard mais il ne retenait de l’article ni les compliments ni même les éloges, il avait retenu qu’on disait de lui qu’il était en avocat nationaliste. Il m’a regardé et m’a dit : « c’est totalement faut ! Je ne suis pas un avocat nationaliste. Je suis nationaliste. Et je suis avocat ! »


Le président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, également avocat, a rappelé, non sans une certaine émotion la perte cruelle du père, de l’avocat, du militant nationaliste :
«Antoine était l’un des avocats les plus talentueux de l’île, il exerçait son métier avec brio et courage. Il était un homme bienveillant, plein d’humour et il était parmi les défenseurs des premiers nationalistes à comparaître devant la Cour de Sureté de l’Etat à la fin des années soixante-dix. Aujourd’hui, Antoine Sollacaro manque cruellement à toute la Corse. Il manque parce que la défense de notre pays est une cause qui lui tenait à cœur tout au long de sa vie. Il manque parce qu’il était un militant infatigable des droits de l’homme, combattant sans relâche l’injustice, l’arbitraire, l’exception, luttant inlassablement pour le respect des libertés fondamentales et pour que son idéal, notre idéal à tous, devienne en Corse une réalité. »
Jean-Guy Talamoni s’est ensuite adressé à Laurent Marcangeli pour saluer cette remarquable initiative en hommage à Antoine Sollacaro :
«  Un hommage qui a du sens, qui est lourd de sens. Choisir de débaptiser la rue Marboeuf, un militaire répressif pour lui donner le nom d’un fervent défenseur des droits de l’homme prouve, s’il en était besoin, que la Corse est en train d’écrire une belle page de son histoire, qu’elle se tourne résolument vers l’avenir et que plus que jamais sans doute, elle marche sur une voie nouvelle. »
D’autres hommages ont été rendus par ses confrères du barreau d’Ajaccio et de la Ligue des droits de l’homme, représentés  par Marc Maroselli, ancien bâtonnier  et André Paccou, président de la LDH Corsica
« Antoine était l’un des plus illustres de nos pères, si ce n’est le plus illustre. Un véritable professionnel, avocat combatif, tempétueux, fin juriste, un stratège redoutable et aussi et surtout un orateur de talent. Qu’il soit honoré aujourd’hui est parfaitement légitime, valorisant pour le barreau. Beaucoup de ceux qui sont présents savent quel homme il fut, quelles étaient ses qualités humaines, que j’ai pu mesurer à titre personnel. Altruisme, qualités de cœur, comment oublier l’accueil qu’il m’a réservé en tant que jeune avocat. Antoine, cette rue porte ton nom parce que tu étais un homme hors normes, extra-ordinaire. De là où tu es, tes yeux pétillent et un sourire un tantinet moqueur barre ton visage. On ne t’a pas oublié  » a conclu Marc Maroselli.


André Paccou, président en tenant la Ligue des Droits de l’Homme s’est exprimé à son tour :
«L’émotion et la douleur sont toujours présentes mais il nous faut aller au-delà et répondre ainsi aux silences de l’institution judiciaire. Il nous faut aller plus loin, veiller à transmettre ce qu’Antoine nous a légués. Son incessant combat contre l’arbitraire, de la Cour de Sureté de l’Etat à la loi anti-terroriste. Etre avocat était pour lui protéger les plus faibles, qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs. Le racisme lui était insupportable et lorsque certains fantasmaient sur une Corse pure, alors il se mettait à gronder. Ses plaidoiries interpellaient les consciences bien au-delà du prétoire. Tel fut le sens de son engagement dans la cité et à la LDH dont il fut le président. Antoine était un homme libre, éclairé et généreux, c’était aussi un ami, avec ce que cela signifie de fidélité, d’amour, et de liens profonds et sincères. »  
J. F

Inauguration de la rue Antoine Sollacaro à Ajaccio : La famille, l’émotion, l’amitié