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Ghjurnate di Corti : Kanaky, la longue marche vers le référendum d’indépendance


Nicole Mari le Samedi 4 Août 2018 à 23:01

C’est par un débat international sur la situation politique des peuples en lutte que se sont ouvertes, samedi après-midi, à l’ombre de la citadelle de Corti, les 37ème Ghjurnate internaziunale du mouvement indépendantiste Corsica Libera. A côté des habituelles délégations étrangères sarde, basque, catalane, Azawad… qui restent, année après année, fidèles au rendez-vous, deux invités d’honneur : la Kanaky-Nouvelle Calédonie et la Polynésie. Les deux territoires d’Outre-Mer sont sous les feux de l’actualité institutionnelle, notamment le premier qui prépare son référendum d’autodétermination prévu pour le 4 novembre prochain sur une question : « Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ? ». A Corti, Mickael Forrest, secrétaire permanent pour les relations extérieures du FLNKS (Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste), a expliqué la stratégie mise en œuvre pour ce scrutin. 165 ans après le début de la colonisation française, 34 ans après le soulèvement indépendantiste kanak, 30 ans après le drame d’Ouvéa, et 20 ans après les Accords de Nouméa, il réaffirme toute la détermination des Indépendantistes à obtenir la pleine souveraineté.



Les délégations étrangères aux 37ème Ghjurnate internaziunale.
Les délégations étrangères aux 37ème Ghjurnate internaziunale.
- Vous êtes en pleine campagne pour le Oui au référendum. Quel message êtes-vous venus délivrer aux Journées internationales ?
- Le message a trait au référendum. C’est important, pour nous, de pouvoir informer nos frères corses et l’ensemble des peuples sous domination coloniale sur la stratégie que nous avons adoptée depuis notre dernier congrès de février 2018 à Poum dans le Nord du pays. Nous faisons en sorte de battre campagne autour du projet politique que nous avons validé en mars 2017 et sur lequel nous avons, d’avril à novembre 2017, lancé une grande consultation populaire. En avril 2018, nous avons actualisé ce projet. Nous sillonnons le pays, les îles, les tribus, les villages, les quartiers pour l’expliquer aux populations, rassurer, convaincre et faire adhérer l’ensemble du peuple concerné par la consultation du 4 novembre. Notre objectif est aussi de présenter la nouvelle stratégie que nous avons mise en œuvre au niveau régional et international pour continuer à construire le réseau de solidarité avec l’ensemble des pays et des peuples qui nous soutiennent comme les peuples corse, basque, catalan…
 
- Quel regard portez-vous sur la situation politique corse ?
- Un regard empreint, d’abord, de beaucoup d’humilité. Tous les mouvements de libération dans le monde connaissent beaucoup de divisions, en tous cas de différences de lecture. On constate que le mouvement en Corse a su trouver une unité qui a permis de gagner les dernières élections démocratiques. C’est un exemple pour nous, pour pouvoir, dans le futur, mieux s’insérer dans les différentes élections, mais aussi dans les différentes politiques publiques pour faire en sorte que les besoins du peuple restent l’objectif prioritaire de ces politiques.
 
- Comment se présente le référendum ? Pas trop bien pour vous ?
- Le référendum se présente, en tous les cas, certainement, le 4 novembre ! Nous continuons notre travail sur les listes électorales. C’est un sujet crucial pour nous. Nous avons organisé des mobilisations, parfois dures, pour que l’Etat entende notre revendication et, surtout, reconnaisse notre droit. Il y a aussi le sujet des frères indépendantistes qui ont appelé à une non-participation au scrutin. Mais ce qu’il faut relever, c’est que ce référendum est le premier. Depuis 1853, c’est la première fois que nous avons cette opportunité-là ! Notre génération ne peut pas passer à côté de cet acte historique. C’est le travail de nos anciens, de nos pères et de nos grands-pères. Il faut respecter le sang qui a été versé pour que la Kanaky devienne indépendante.
 
- C’est, donc, une opportunité historique ?
- Oui ! C’est une opportunité historique, mais qui n’est pas unique puisque trois référendums sont prévues par l’accord. Le cadre est là. Notre dernier congrès, en février, a réaffirmé que notre unique objectif est la pleine souveraineté. Toute notre stratégie, aussi bien au niveau local, régional qu’international, se fait dans ce cadre-là.
 
- La venue du président Macron n’avait-elle pas pour but de torpiller le scrutin ?
- Depuis que nous avons obtenu le droit de vote en 1953 sous De Gaulle jusqu’à Mr Macron aujourd’hui, l’ensemble des chefs d’Etat français n’ont jamais eu qu’un seul objectif : que l’influence française dans le Pacifique demeure, même si nous avons signé des accords. Nous avons signé l’accord de Nouméa qui est un processus de décolonisation. Nous mettrons tous les moyens possibles à notre disposition, bien sûr dans un cadre démocratique, pour faire en sorte que le Oui massif l’emporte le 4 novembre prochain.
 
- Etes-vous confiants ?
- Oui ! Nous sommes confiants ! C’est, pour nous, une obligation, une responsabilité politique devant notre histoire de faire le travail, de respecter le travail de nos anciens, et d’honorer le combat de ceux qui sont tombés. Apporter aussi une nouvelle ère positive pour tous les peuples frères qui sont présents à Corte durant ces deux jours. La décolonisation, c’est un grand débat, une grande histoire, mais nos différents peuples ont toujours autant de difficulté à s’inscrire dans une dynamique qui puisse offrir un avenir meilleur aux populations. En tous les cas, offrir des perspectives claires en termes de développement économique, social, culturel, environnemental…
 
- Ce référendum n’est-il pas un test pour tous les peuples qui demandent plus de liberté ?
-  Oui, mais nous voyons la chose de manière différente puisque le référendum vient clôturer 30 ans d’accords politiques. Pour nous, ce n’est plus un test, mais un objectif ! Nous travaillons pour atteindre cet objectif.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.

Mickael Forrest, secrétaire permanent pour les relations extérieures du FLNKS (Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste).
Mickael Forrest, secrétaire permanent pour les relations extérieures du FLNKS (Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste).