Député sortante, Marie-Christine Vergiat, tête de liste du Front de Gauche dans le Sud-Est aux élections européennes du 25 mai prochain.
- Qu’est-ce qui vous pousse à briguer un nouveau mandat sous la bannière Front de gauche ?
- Je suis, comme en 2009, une candidate d’ouverture, symbole de la volonté du Front de gauche de s’ouvrir à d’autres composantes que les siennes. Ce pari est réussi puisque nous rassemblons, aujourd’hui, 8 formations politiques contre 3 à l’époque. Le Front de gauche doit continuer de s’ouvrir à ceux qui ont envie de porter d’autres politiques de gauche au niveau local, national et européen. Je suis très fière en tant que candidate citoyenne, n’appartenant à aucun parti du Front de gauche, de conduire, de nouveau, cette liste et que mes amis politiques m’aient renouvelé leur confiance. Ce qui m’intéresse, c’est la démarche globale.
- Pourquoi vous ont-ils renouvelé leur confiance ?
- J’ai bataillé depuis 5 ans. J’ai appris beaucoup de choses, y compris de mes camarades des autres pays, membres de la gauche unitaire européenne. J’ai démontré, et mon bilan est là pour le prouver, qu’on pouvait mener des batailles et qu’il est important qu’il y ait des députés de résistance. Je suis sûre qu’au soir du 25 mai, nous serons plus forts et que le Front de gauche apportera sa pierre au renforcement de la gauche unitaire. Nous devrions être la 3ème, sinon la 4ème force politique du Parlement européen.
- Les sondages prédisent une abstention record. Votre 1er adversaire n’est-il pas l’absence d’intérêt des électeurs français pour le scrutin européen ?
- Je ne dirai pas que cette élection n’intéresse personne, plutôt que les gens sont résignés. Il faut dire qu’à longueur de temps, on leur explique que tout est la faute de Bruxelles, que les décisions européennes s’imposent à nous et qu’on ne peut rien y faire ! C’est pour cela que j’insiste sur le fait qu’on peut mener des batailles. Au Front de gauche, nous disons qu’il faut rompre avec les actuels traités européens parce qu’ils ont, en leur cœur, les principes de la concurrence libre et non faussée et de la compétitivité tous azimuts. Il faut savoir désobéir aux traités.
- La France peut-elle le faire ?
- D’autres le font. Les Anglais ne sont pas forcément un modèle, mais ne prennent dans l’Union européenne (UE) que ce qui les intéresse. Alors que la France est le meilleur élève de la classe en matière de transposition, comme nous le démontre Manuel Valls (1er ministre) avec son pacte de responsabilité. Ce pacte n’est rien d’autre que les transpositions des recommandations de la Commission européenne concernant le Traité budgétaire voulu par les Etats-membres. D’autres politiques sont possibles à l’intérieur de l’Europe. Il faut les proposer.
- Que proposez-vous ?
- D’abord, d’arrêter de dire qu’il n’y a pas d’argent ! L’UE est la 1ère puissance économique mondiale quand on totalise ses PIB (Produit intérieur brut). A l’intérieur de cet espace régional, les écarts entre les plus riches et les plus pauvres ne cessent d’augmenter. On taxe les ménages au bénéfice des entreprises sans la moindre contrepartie. Les multinationales font du dumping fiscal et social et de l’optimisation fiscale en profitant de toutes les niches existantes à l’intérieur, comme à l’extérieur de l’UE. Il faut lutter contre l’évasion fiscale qui représente 1000 milliards € par an, soit l’équivalent du budget de l’UE pour 7 ans. On n’arrive pas à travailler sur ces questions, ni taxer la spéculation financière.
- Pourquoi ?
- En 2010, le Parlement européen, qui n’est pas un endroit de Gauchistes écervelés et échevelés, a proposé une taxation peu élevée, à 0,01%, qui devait rapporter 200 milliards €. Ce projet a été voté par une majorité de parlementaires. Il y a une semaine, le Conseil des ministres de l’Economie de l’UE a massacré ce projet en le reportant au 1er janvier 2016 et en en excluant les produits dérivés, c’est-à-dire les produits les plus spéculatifs. Le rendement de cette taxe ne devrait, après le travail des Etats-membres, rapporter que 4,6 milliards € ! D’autres politiques peuvent, aussi, arrêter d’opposer en permanence les uns aux autres et d’ouvrir tous azimuts les frontières de l’UE aux capitaux, aux marchandises et aux services alors qu’on transforme l’espace européen en une forteresse.
- Qu’entendez-vous par là ?
- L’émigration clandestine a fait 20000 morts en mer Méditerranée en 20 ans. Ce chiffre ne cesse d’augmenter. Juste sur la période du 5 au 12 mai, il y a eu 3 drames qui ont fait 400 morts. Comment peut-on continuer dans ces logiques mortifères ? Les migrants ne sont que des boucs-émissaires. C’est très facile de vouloir désigner l’étranger à la vindicte populaire ! Au 19ème siècle, c’étaient les Bretons qui envahissaient Paris ! Aujourd’hui, les migrants ! Ça suffit ! Arrêtons d’opposer les uns aux autres ! Construisons des politiques de solidarité dignes de ce nom qui s’appuient sur les richesses existantes à l’intérieur de l’UE !
- La Gauche européenne peut remporter le scrutin. Vu la politique menée par la Gauche en France, que peut-on attendre de cette alternance ?
- C’est quoi la Gauche ! J’entends, effectivement, les Socialistes et Vincent Peillon (tête de liste PS dans le Sud-Est) dire qu'ils veulent une Europe de gauche et que l’UE est, aujourd’hui, dirigée par la Droite. En disant une chose pareille, ils se font insulte à eux-mêmes ! Ils savent très bien que les institutions européennes sont cogérées par la Sociale Démocratie et par le Parti populaire européen (PPE) dans lequel siègent les représentants de l’UMP. 17 Etats-membres sur 28 ont des ministres socialistes au gouvernement dans des configurations variables. La Commission européenne compte des Libéraux, mais aussi des Socialistes (PSE). 75% des textes votés par le Parlement européen le sont grâce à une majorité PPE-PSE. De qui se moque-t-on ?
- Estimez-vous qu’il y a un consensus politique au sein de l’UE ?
- Oui ! Il faut casser ce consensus. Margaret Thatcher (ancienne 1er ministre anglaise, surnommé la Dame de fer, ndlr) n’avait pas raison dans les années 80 quand elle disait qu’il n’y avait pas d’alternative. Les Socialistes ont raté un tournant historique au moment de l’effondrement du bloc soviétique. Ils avaient un boulevard devant eux pour proposer d’autres politiques. Qu’ont-ils fait ? Ils se sont ralliés au libéralisme ! Je dis aux électeurs : « Si vous voulez une Europe de gauche, ne vous trompez pas de bulletin, votez Front de Gauche. Là vous serez sûr que d’autres politiques seront portées ! ».
- Est-ce cette bataille-là que vous comptez engager au Parlement européen, si vous êtes réélue ?
- Oui ! Nous avons des espoirs de construire d’autres perspectives, notamment avec la Confédération européenne des syndicats, qui, pour la 1ère fois de son histoire, a refusé un traité européen. Des mobilisations sociales s’organisent partout en Europe, notamment dans les pays du Sud les plus frappés par la crise, comme la Grèce, l’Espagne ou le Portugal. Il faut casser cette chape de plomb qui fait croire aux gens qu’il n’y a plus d’argent, que la France est au bord de la faillite. Ce sont des plaisanteries ! Elles servent à imposer des politiques de façon unilatérale et à faire croire qu’il n’y a pas d’autres voies possibles.
- Votre 2ème adversaire, le Front national (FN) est donné, par les sondages, grand vainqueur du scrutin en France et dans votre circonscription. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
- J’ai envie de dire aux électeurs : « Ne vous trompez pas de colère ! Votez pour des gens qui vous respecteront, qui respecteront votre vote et qui ont bataillé à l’intérieur de l’UE pour faire entendre votre voix ! ». Dans tous les classements faits sur les députés européens, les députés FN occupent la toute dernière place. Ils ne sont jamais là ! Plus exactement, ils ne sont là que 3 jours par mois, le mardi, le mercredi et le jeudi, au moment des votes, pour ne pas voir leurs indemnités parlementaires réduites de moitié.
- Marine Le Pen explique qu’en tant que non-inscrits, les députés FN ne bénéficient que de la moitié des droits d’un parlementaire européen…
- Mais, pourquoi n’utilisent-ils pas cette moitié ? Chaque député a des droits individuels et la possibilité de mener la bataille, le FN ne l’a pas fait ! Que fera-t-il de plus lorsque ses élus auront un groupe, s’ils arrivent à le constituer car ils sont tellement divisés ? Leur seul leitmotiv, comme leur point commun, est d’être antieuropéen, de prôner le repli national qui n’a pas de sens dans une économie mondialisée et de plus en plus globalisée. La France ne s’en sortira pas toute seule ! Il faut constituer une force de résistance en utilisant le potentiel de l’UE et en faisant tout le contraire du grand marché transatlantique et de l’accord UE-USA qui sont en train d’être mis sur pied.
- Que reprochez-vous à ce marché ?
- Il n’a qu’un objectif : casser les normes sociales et environnementales européennes. Nous prenons des coups de boutoir, notamment en matière sociale. Néanmoins, l’UE reste l’espace régional le plus protégé. Mais les multinationales ont intérêt à casser ces normes. Elles sont organisées et, depuis 20 ans, mènent la bataille à l’intérieur des institutions. Au lieu d’ouvrir grandes les portes, nous préconisons de mettre des visas environnementaux et sociaux aux frontières de l’UE afin de protéger le marché communautaire de la concurrence des autres pays de monde et d’empêcher les délocalisations.
- Que sont ces visas ?
- Simplement une taxation européenne aux frontières de l’UE. Elle permettrait de taxer les produits d’importation ne respectant pas les normes et les ramènerait, ainsi, au niveau européen. Elle empêcherait les délocalisations et la concurrence de produits fabriqués dans les pays du Tiers-monde. Ce sont des choses concrètes que l’on peut mettre rapidement en œuvre, mais l’UE fait tout le contraire ! Elle multiplie les accords de libre-échange avec tous les pays du monde, y compris les pays du Sud à qui elle propose, maintenant, des partenariats économiques. Comme si les entreprises africaines étaient à jeu égal avec les entreprises européennes. Les politiques de coopération et de solidarité, y compris au niveau international, doivent être conduites dans l’intérêt des peuples. C’est possible !
- La dureté de la crise dans les pays du Sud peut-elle faire craindre un printemps des peuples social ?
- Peut-être faudrait-il un printemps des peuples ! Ce sont les revendications sociales qui les ont initiés… Il ne faut pas croire qu’il n’y a pas de résistance en Europe. Il y en a ! Avec 29% dans les sondages, nos amis de Syriza sont devenus la 1ère force politique en Grèce. Le peuple grec résiste. Dimanche prochain aura lieu à Thessalonique, suite à la bataille des habitants, un référendum sur la privatisation de l’eau. J’espère que l’issue en sera le refus de la privatisation, comme en Italie. Il faut donner plus la parole aux citoyens, qu’ils s’emparent des questions européennes. Ce n’est pas aussi compliqué qu’ils le croient ou qu’on cherche à leur faire croire.
- Est-ce le message que vous leur lancez ?
- Oui ! Entre 60% et 80% des décisions nationales sont impactées par le droit européen. Si les citoyens ne s’intéressent pas à l’Europe, l’Europe s’intéresse à eux ! A ceux qui se disent : « A quoi sert d’aller voter puisqu’en 2005, on a dit Non à l’Europe sans être entendu ! », je réponds : « J’ai besoin de vous pour continuer mon travail ». Moins il y aura de participation électorale, plus le Parlement européen perdra de sa légitimité, or il est la seule instance démocratique au sein de l’UE. Il faut que les citoyens s’en saisissent en votant pour des gens qui les défendent, qui se battent pour eux, comme j’ai essayé de le faire depuis 5 ans.
Propos recueillis par Nicole MARI
- Je suis, comme en 2009, une candidate d’ouverture, symbole de la volonté du Front de gauche de s’ouvrir à d’autres composantes que les siennes. Ce pari est réussi puisque nous rassemblons, aujourd’hui, 8 formations politiques contre 3 à l’époque. Le Front de gauche doit continuer de s’ouvrir à ceux qui ont envie de porter d’autres politiques de gauche au niveau local, national et européen. Je suis très fière en tant que candidate citoyenne, n’appartenant à aucun parti du Front de gauche, de conduire, de nouveau, cette liste et que mes amis politiques m’aient renouvelé leur confiance. Ce qui m’intéresse, c’est la démarche globale.
- Pourquoi vous ont-ils renouvelé leur confiance ?
- J’ai bataillé depuis 5 ans. J’ai appris beaucoup de choses, y compris de mes camarades des autres pays, membres de la gauche unitaire européenne. J’ai démontré, et mon bilan est là pour le prouver, qu’on pouvait mener des batailles et qu’il est important qu’il y ait des députés de résistance. Je suis sûre qu’au soir du 25 mai, nous serons plus forts et que le Front de gauche apportera sa pierre au renforcement de la gauche unitaire. Nous devrions être la 3ème, sinon la 4ème force politique du Parlement européen.
- Les sondages prédisent une abstention record. Votre 1er adversaire n’est-il pas l’absence d’intérêt des électeurs français pour le scrutin européen ?
- Je ne dirai pas que cette élection n’intéresse personne, plutôt que les gens sont résignés. Il faut dire qu’à longueur de temps, on leur explique que tout est la faute de Bruxelles, que les décisions européennes s’imposent à nous et qu’on ne peut rien y faire ! C’est pour cela que j’insiste sur le fait qu’on peut mener des batailles. Au Front de gauche, nous disons qu’il faut rompre avec les actuels traités européens parce qu’ils ont, en leur cœur, les principes de la concurrence libre et non faussée et de la compétitivité tous azimuts. Il faut savoir désobéir aux traités.
- La France peut-elle le faire ?
- D’autres le font. Les Anglais ne sont pas forcément un modèle, mais ne prennent dans l’Union européenne (UE) que ce qui les intéresse. Alors que la France est le meilleur élève de la classe en matière de transposition, comme nous le démontre Manuel Valls (1er ministre) avec son pacte de responsabilité. Ce pacte n’est rien d’autre que les transpositions des recommandations de la Commission européenne concernant le Traité budgétaire voulu par les Etats-membres. D’autres politiques sont possibles à l’intérieur de l’Europe. Il faut les proposer.
- Que proposez-vous ?
- D’abord, d’arrêter de dire qu’il n’y a pas d’argent ! L’UE est la 1ère puissance économique mondiale quand on totalise ses PIB (Produit intérieur brut). A l’intérieur de cet espace régional, les écarts entre les plus riches et les plus pauvres ne cessent d’augmenter. On taxe les ménages au bénéfice des entreprises sans la moindre contrepartie. Les multinationales font du dumping fiscal et social et de l’optimisation fiscale en profitant de toutes les niches existantes à l’intérieur, comme à l’extérieur de l’UE. Il faut lutter contre l’évasion fiscale qui représente 1000 milliards € par an, soit l’équivalent du budget de l’UE pour 7 ans. On n’arrive pas à travailler sur ces questions, ni taxer la spéculation financière.
- Pourquoi ?
- En 2010, le Parlement européen, qui n’est pas un endroit de Gauchistes écervelés et échevelés, a proposé une taxation peu élevée, à 0,01%, qui devait rapporter 200 milliards €. Ce projet a été voté par une majorité de parlementaires. Il y a une semaine, le Conseil des ministres de l’Economie de l’UE a massacré ce projet en le reportant au 1er janvier 2016 et en en excluant les produits dérivés, c’est-à-dire les produits les plus spéculatifs. Le rendement de cette taxe ne devrait, après le travail des Etats-membres, rapporter que 4,6 milliards € ! D’autres politiques peuvent, aussi, arrêter d’opposer en permanence les uns aux autres et d’ouvrir tous azimuts les frontières de l’UE aux capitaux, aux marchandises et aux services alors qu’on transforme l’espace européen en une forteresse.
- Qu’entendez-vous par là ?
- L’émigration clandestine a fait 20000 morts en mer Méditerranée en 20 ans. Ce chiffre ne cesse d’augmenter. Juste sur la période du 5 au 12 mai, il y a eu 3 drames qui ont fait 400 morts. Comment peut-on continuer dans ces logiques mortifères ? Les migrants ne sont que des boucs-émissaires. C’est très facile de vouloir désigner l’étranger à la vindicte populaire ! Au 19ème siècle, c’étaient les Bretons qui envahissaient Paris ! Aujourd’hui, les migrants ! Ça suffit ! Arrêtons d’opposer les uns aux autres ! Construisons des politiques de solidarité dignes de ce nom qui s’appuient sur les richesses existantes à l’intérieur de l’UE !
- La Gauche européenne peut remporter le scrutin. Vu la politique menée par la Gauche en France, que peut-on attendre de cette alternance ?
- C’est quoi la Gauche ! J’entends, effectivement, les Socialistes et Vincent Peillon (tête de liste PS dans le Sud-Est) dire qu'ils veulent une Europe de gauche et que l’UE est, aujourd’hui, dirigée par la Droite. En disant une chose pareille, ils se font insulte à eux-mêmes ! Ils savent très bien que les institutions européennes sont cogérées par la Sociale Démocratie et par le Parti populaire européen (PPE) dans lequel siègent les représentants de l’UMP. 17 Etats-membres sur 28 ont des ministres socialistes au gouvernement dans des configurations variables. La Commission européenne compte des Libéraux, mais aussi des Socialistes (PSE). 75% des textes votés par le Parlement européen le sont grâce à une majorité PPE-PSE. De qui se moque-t-on ?
- Estimez-vous qu’il y a un consensus politique au sein de l’UE ?
- Oui ! Il faut casser ce consensus. Margaret Thatcher (ancienne 1er ministre anglaise, surnommé la Dame de fer, ndlr) n’avait pas raison dans les années 80 quand elle disait qu’il n’y avait pas d’alternative. Les Socialistes ont raté un tournant historique au moment de l’effondrement du bloc soviétique. Ils avaient un boulevard devant eux pour proposer d’autres politiques. Qu’ont-ils fait ? Ils se sont ralliés au libéralisme ! Je dis aux électeurs : « Si vous voulez une Europe de gauche, ne vous trompez pas de bulletin, votez Front de Gauche. Là vous serez sûr que d’autres politiques seront portées ! ».
- Est-ce cette bataille-là que vous comptez engager au Parlement européen, si vous êtes réélue ?
- Oui ! Nous avons des espoirs de construire d’autres perspectives, notamment avec la Confédération européenne des syndicats, qui, pour la 1ère fois de son histoire, a refusé un traité européen. Des mobilisations sociales s’organisent partout en Europe, notamment dans les pays du Sud les plus frappés par la crise, comme la Grèce, l’Espagne ou le Portugal. Il faut casser cette chape de plomb qui fait croire aux gens qu’il n’y a plus d’argent, que la France est au bord de la faillite. Ce sont des plaisanteries ! Elles servent à imposer des politiques de façon unilatérale et à faire croire qu’il n’y a pas d’autres voies possibles.
- Votre 2ème adversaire, le Front national (FN) est donné, par les sondages, grand vainqueur du scrutin en France et dans votre circonscription. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
- J’ai envie de dire aux électeurs : « Ne vous trompez pas de colère ! Votez pour des gens qui vous respecteront, qui respecteront votre vote et qui ont bataillé à l’intérieur de l’UE pour faire entendre votre voix ! ». Dans tous les classements faits sur les députés européens, les députés FN occupent la toute dernière place. Ils ne sont jamais là ! Plus exactement, ils ne sont là que 3 jours par mois, le mardi, le mercredi et le jeudi, au moment des votes, pour ne pas voir leurs indemnités parlementaires réduites de moitié.
- Marine Le Pen explique qu’en tant que non-inscrits, les députés FN ne bénéficient que de la moitié des droits d’un parlementaire européen…
- Mais, pourquoi n’utilisent-ils pas cette moitié ? Chaque député a des droits individuels et la possibilité de mener la bataille, le FN ne l’a pas fait ! Que fera-t-il de plus lorsque ses élus auront un groupe, s’ils arrivent à le constituer car ils sont tellement divisés ? Leur seul leitmotiv, comme leur point commun, est d’être antieuropéen, de prôner le repli national qui n’a pas de sens dans une économie mondialisée et de plus en plus globalisée. La France ne s’en sortira pas toute seule ! Il faut constituer une force de résistance en utilisant le potentiel de l’UE et en faisant tout le contraire du grand marché transatlantique et de l’accord UE-USA qui sont en train d’être mis sur pied.
- Que reprochez-vous à ce marché ?
- Il n’a qu’un objectif : casser les normes sociales et environnementales européennes. Nous prenons des coups de boutoir, notamment en matière sociale. Néanmoins, l’UE reste l’espace régional le plus protégé. Mais les multinationales ont intérêt à casser ces normes. Elles sont organisées et, depuis 20 ans, mènent la bataille à l’intérieur des institutions. Au lieu d’ouvrir grandes les portes, nous préconisons de mettre des visas environnementaux et sociaux aux frontières de l’UE afin de protéger le marché communautaire de la concurrence des autres pays de monde et d’empêcher les délocalisations.
- Que sont ces visas ?
- Simplement une taxation européenne aux frontières de l’UE. Elle permettrait de taxer les produits d’importation ne respectant pas les normes et les ramènerait, ainsi, au niveau européen. Elle empêcherait les délocalisations et la concurrence de produits fabriqués dans les pays du Tiers-monde. Ce sont des choses concrètes que l’on peut mettre rapidement en œuvre, mais l’UE fait tout le contraire ! Elle multiplie les accords de libre-échange avec tous les pays du monde, y compris les pays du Sud à qui elle propose, maintenant, des partenariats économiques. Comme si les entreprises africaines étaient à jeu égal avec les entreprises européennes. Les politiques de coopération et de solidarité, y compris au niveau international, doivent être conduites dans l’intérêt des peuples. C’est possible !
- La dureté de la crise dans les pays du Sud peut-elle faire craindre un printemps des peuples social ?
- Peut-être faudrait-il un printemps des peuples ! Ce sont les revendications sociales qui les ont initiés… Il ne faut pas croire qu’il n’y a pas de résistance en Europe. Il y en a ! Avec 29% dans les sondages, nos amis de Syriza sont devenus la 1ère force politique en Grèce. Le peuple grec résiste. Dimanche prochain aura lieu à Thessalonique, suite à la bataille des habitants, un référendum sur la privatisation de l’eau. J’espère que l’issue en sera le refus de la privatisation, comme en Italie. Il faut donner plus la parole aux citoyens, qu’ils s’emparent des questions européennes. Ce n’est pas aussi compliqué qu’ils le croient ou qu’on cherche à leur faire croire.
- Est-ce le message que vous leur lancez ?
- Oui ! Entre 60% et 80% des décisions nationales sont impactées par le droit européen. Si les citoyens ne s’intéressent pas à l’Europe, l’Europe s’intéresse à eux ! A ceux qui se disent : « A quoi sert d’aller voter puisqu’en 2005, on a dit Non à l’Europe sans être entendu ! », je réponds : « J’ai besoin de vous pour continuer mon travail ». Moins il y aura de participation électorale, plus le Parlement européen perdra de sa légitimité, or il est la seule instance démocratique au sein de l’UE. Il faut que les citoyens s’en saisissent en votant pour des gens qui les défendent, qui se battent pour eux, comme j’ai essayé de le faire depuis 5 ans.
Propos recueillis par Nicole MARI
Les élus communistes, Francis Riolacci, conseiller municipal de Bastia, et Michel Stefani, conseiller territorial, candidat suppléant, aux côtés de la député sortante, Marie-Christine Vergiat.