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Dermatose : Le monde agricole corse demande la mise en œuvre immédiate de mesures de protection


Nicole Mari le Mardi 29 Juillet 2025 à 19:47

Dans une délibération prise le 25 juillet, la Chambre d’agriculture, les syndicats agricoles et les organisations professionnelles demandent la mise en œuvre immédiate de mesures de protection contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC). La première est l’instauration d’une interdiction temporaire d’introduction de bétail sur l’île. La seconde est le classement prioritaire de la Corse dans le plan national de vaccination contre la DNC, avec un calendrier précis, une logistique dédiée, et une dotation suffisante en doses pour permettre la protection intégrale du cheptel bovin insulaire.



Dermatose : Le monde agricole corse demande la mise en œuvre immédiate de mesures de protection
Lors d’une réunion qui s’est tenue le 25 juillet 2025 à Altiani, à l’initiative de la DRAAF afin de faire le point sur l’évolution préoccupante de la Dermatose Nodulaire Contagieuse (DNC), la Chambre d’agriculture, les syndicats agricoles représentatifs - FDSEA 2A, FDSEA 2B, JA 2A, JA 2B, Via Campagnola, Mossa Paisana, Coordination Rurale -, les organisations professionnelles, le Groupement de Défense sanitaire (GDS), la MSA et Inter Bio Corse, ont rédigé une délibération commune pour demander la mise en œuvre immédiate de mesures de protection contre la dermatose nodulaire contagieuse (DNC).
 
La délibération
Les cosignataires font d’abord un état des lieux de la situation sur le continent et en Sardaigne :
  • « Vu les 34 foyers confirmés en Savoie, Haute-Savoie et Sardaigne dont plusieurs dans le Nord de l’île, à moins de 60 kilomètres de la Corse, et la progression rapide de la maladie, constituant un danger direct pour me cheptel insulaire ;
  • Vu le classement de la Sardaigne en zone règlementée DNC, interdisant les mouvements de bovins vers l’extérieur de l’île, et la possibilité de transport passif des insectes vecteurs (taons, stomoxes) par des espèces animales non sensibles (ovins, caprins, porcins, équins) à bord de véhicules ou de navires, notamment dans un contexte estival marqué par plus de 20 rotations maritimes quotidiennes entre la Corse, la Sardaigne et le continent ;
  • Vu les données scientifiques établissant que les insectes vecteurs de DNC restent contaminants jusqu’à 24 heures après ingestion virale, durée compatible avec les traversées maritimes, et le risque confirmé de contamination indirecte par les chevaux, prisés de ces insectes et fréquemment transportés lors de manifestations hippiques estivales ;
  • Vu l’instauration récente de la vaccination obligatoire dans les seules zones réglementées (Savoie, Haute-Savoie depuis le 19 juillet 2025, et la Sardaigne depuis le 21 juillet 2025) ;
  • Vu l’absence de planification ou de dotation vaccinale en Corse à la date du 25 juillet 2025. »
 
La Chambre d’Agriculture de Région Corse, les syndicats agricoles et les organisations professionnelles listent, ensuite, un certain nombre de considérant ayant trait au risque potentiel, à la spécificité et à la vulnérabilité du cheptel insulaire et aux épidémies qui ont déjà frappé la Corse, ces dernières années :
  • « Considérant la menace sanitaire imminente que représente l’introduction de la DNC en Corse ;
  • Considérant la proximité géographique immédiate des foyers actifs en Sardaigne et leur expansion rapide, ainsi que les liens maritimes et commerciaux étroits entre la Corse, la Sardaigne et le continent ;
  • Considérant les spécificités de l’élevage bovin corse, à forte valeur patrimoniale, génétique et territoriale ;
  • Considérant l’extrême vulnérabilité du cheptel corse en raison de son mode d’élevage extensif traditionnel ;
  • Considérant que l’introduction de la DNC entraînerait des pertes économiques et génétiques incalculables et irréversibles ;
  • Considérant que les insectes vecteurs (taons, stomoxes) peuvent être transportés sur de longues distances à bord de véhicules de transport d’animaux ou de passagers, même lorsque ces derniers ne sont pas eux-mêmes sensibles à la maladie (cas des chevaux, par exemple) et qu’ils restent contaminants le temps de la traversée Continent-Corse et a fortiori Sardaigne-Corse ;
  • Considérant que la plupart des épizooties importantes qui ont frappé la Corse ces dernières années sont arrivées par la Sardaigne, comme nous ne cessons de le rappeler et que la maladie explose actuellement sur l’île voisine ;
  • Considérant qu’il serait irresponsable et inacceptable d’attendre l’apparition du premier cas pour déclencher la vaccination en Corse, alors même que le risque est identifié, que les données épidémiologiques sont connues, et les foyers actifs sont géographiquement proches,
  • Considérant l’expérience douloureuse des premières épizooties de Fièvre Catarrhale ovine (FCO) ayant frappé la Corse au début des années 2000, et qui ont conduit à l’application de mesures extrêmement strictes, imposées par l’État français et les instances européennes, notamment l’interdiction totale de tout mouvement d’animaux de la Corse vers le continent, au nom de la protection du cheptel national,
  • Considérant que cette décision, bien qu’unilatérale et fortement pénalisante pour la filière corse, avait été acceptée par le sens des responsabilités, dans l’intérêt de la biosécurité française,
  • Considérant qu’il serait incohérent et injustifiable de refuser aujourd’hui d’interrompre temporairement les mouvements dans le sens inverse (continent et Sardaigne vers la Corse), alors même que la DNC est officiellement classée comme plus grave que la FCO, et qu’elle justifie une réponse sanitaire plus rigoureuse, fondée sur l’éradication immédiate et l’interdiction préventive de mouvements,
  • Considérant enfin la demande officielle de la profession agricole corse, formulée lors du CROPSAV du 4 juillet 2025, en faveur d’une interdiction temporaire d’introduction d’animaux vivants »
 
Ils demandent, après en avoir délibéré, 
  • « l’instauration immédiate d’une interdiction temporaire d’introduction sur le territoire corse de tout animal de rente ou de loisir (bovins, ovins, caprins, porcins, équins), en provenance de la Sardaigne du continent ou d’Italie, tant qu’une couverture vaccinale suffisante ne permet pas de protéger efficacement le cheptel bovin Corse ;
  • le classement prioritaire de la Corse dans le plan national de vaccination contre la DNC, avec un calendrier précis, une logistique dédiée, et une dotation suffisante en doses pour permettre la protection intégrale du cheptel bovin corse immédiatement après les zones déjà réglementées ». Avant d’ajouter : « Cette demande est d’autant plus légitime que la Corse dispose aujourd’hui de l’un des plus petits cheptels bovins de France »
 
Enfin, ils réaffirment
  • « avec la plus grande fermeté que la profession agricole n’acceptera aucun programme d’abattage de son cheptel en cas d’introduction de la maladie si aucune des mesures préventives demandées aujourd’hui ne sont mises en œuvre ;
  • que la Corse ne doit plus être sacrifiée une fois de plus sur l’autel de la lenteur administrative ou de l’oubli périphérique. L’anticipation est possible. Se contenter de gérer l’accident est donc impensable ;
  • qu’en cas de silence ou d’inaction éventuelle des pouvoirs publics, la profession se réserve le droit d’entreprendre toute action nécessaire pour défendre la survie de son cheptel, la préservation de son modèle d’élevage et la protection de ses intérêts fondamentaux ».

Un accord avec les compagnies maritimes

De son côté, dans un communiqué solitaire, la FDSEA de Haute-Corse affirme que « devant l'ampleur de la gravité d'une situation sanitaire qui empire en Savoie et en Sardaigne et ayant compris les difficultés de l'état central à fournir des vaccins et à geler les transferts d'animaux Continent/Corse ainsi que Sardaigne/Corse, afin de protéger notre cheptel bovin », elle a décidé « de régler le problème » en sollicitant les quatre Compagnies maritimes qui assurent les traversées avec la Corse « pour l'arrêt du passage des bétaillères arrivant en Corse » et assure avoir obtenu « leurs accords de principes pour les uns et leurs accords formels pour les autres. Ces 4 partenaires ont fait jouer à fond la solidarité avec les éleveurs Corse avec une spontanéité qui les honorent ». La FDSEA 2B ajoute qu’elle a demandé aux services de l'Etat « de travailler sur un protocole sanitaire sur la désinsectisation des vans pour que les chevaux puissent rentrer et ne pas rester coincés sur le continent ». Elle veillera « à obtenir des services de l'Etat les doses de vaccins rapidement, seule garantie pour se prémunir de cette maladie qui peut tuer toute une filière ».