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Continuité territoriale : La loi spéciale n’octroie que 42,94 millions € au lieu des 60 millions € nécessaires


Nicole Mari le Mardi 23 Décembre 2025 à 19:53

La Loi spéciale, qui a été adoptée à l’unanimité des votants à l’Assemblée nationale, ne prévoit qu’un rattrapage de 42,94 millions € de la Dotation de continuité territoriale alors que la Corse a besoin d'une rallonge de 60 millions € pour financer le coût du service public. Le député Michel Castellani a obtenu l’assurance de Matignon que le montant serait rectifié dans la prochaine loi de finances, qui sera de nouveau débattue en janvier. En attendant, l’inquiétude demeure.



La Corse obtiendra-t-elle la rallonge de 60 millions € nécessaire pour assurer la continuité territoriale ? Rien n’est moins sûr pour l’instant puisque la Loi spéciale, qui a été adoptée à l’unanimité des votants, ce 23 décembre, pour sortir temporairement la France de l’impasse budgétaire dans laquelle elle s’englue, ne prévoit qu’un rattrapage de 42,94 millions € de la Dotation de continuité territoriale (DCT). Ce nouveau rebondissement dans le long et usé feuilleton de la DCT a été révélé par un tweet du député Femu a Corsica de la 1ère circonscription de Haute-Corse, membre du groupe LIOT, Michel Castellani, qui ne cesse de ferrailler en Commission des finances et dans l’hémicycle pour arracher, sécuriser et pérenniser cette rallonge. Il ne cache pas son dépit et sa lassitude : « La loi spéciale ne prévoit qu'un rattrapage à 42,94 millions € de la DCT malgré l'adoption de mon amendement à 60 millions. La contrainte pour la CdC sera énorme. Il faudra encore se battre lors du PLF 26, mais ce combat permanent (pour une Île !) est pénible. A quand un statut fiscal ? ». La Loi spéciale est, en l’absence de Loi de finances, un outil législatif qui permet d’assurer la continuité de l’Etat et de ses missions de service public. « La Loi spéciale est une roue de secours qui permet d’avancer contre vents et marées », précise Michel Castellani. Elle permet de prélever les impôts, d’emprunter de l’argent et de reconduire les crédits au mois à l’euro près. Elle gèle tout le reste et remet, donc, en cause les financements promis par le gouvernement et, bien évidemment, les amendements budgétaires votés lors du long débat sur le projet de loi de finances 2026.
 
Un coût intenable
Côté corse, c’est la consternation. Le budget de la Collectivité de Corse (CdC), déjà fort contraint par la conjoncture défavorable, supporterait difficilement cette charge supplémentaire. « Il manque 17 millions € par rapport à ce qui était attendu. Si on doit les mettre, c’est tout le budget qui serait déséquilibré. C’est une contrainte supplémentaire sur un niveau de sur-contraintes déjà sans équivalent. On serait, à ce moment-là, dans une véritable impasse budgétaire, non seulement pour les délégations de service public (DSP) maritime et aérien, mais de façon générale », réagit le président du Conseil exécutif, Gilles Simeoni. La dotation, qui est versée à la Collectivité de Corse pour assurer la continuité territoriale aérienne et maritime, est gelée à 187 millions d’euros depuis 16 ans, c’est-à-dire qu’elle n’intègre pas l’explosion des prix, notamment du carburant et des taxes. « On ne demande pas 60 millions € pour obtenir 50 millions ! On demande 60 millions € parce ça coûte 60 millions ! C’est le coût de la DSP et des contrats, sans compter les ETS (Emission Taxes system), la taxation carbone, qui se rajoutent en plus. Sans les ETS, c’est 60 millions € sur un périmètre de service public que l’Etat a validé. Il ne peut pas valider le périmètre qui correspond à un vrai besoin de service public et refuser le montant de financement équivalent », martèle le président Simeoni. Tout est calculé à l’euro près. Les ETS, c’est-à-dire la fiscalité écologique, représentent 14 millions € par an sur le maritime et 12 millions € sur l’aérien. « Nous avons demandé un moratoire sur les ETS et une mise en œuvre spécifique, vu le caractère insulaire », ajoute-t-il. Les ETS, joints aux 17 millions manquants, le solde à payer s’élèverait à 43 millions €. « Ce serait intenable ! », conclut-il.
 
Une promesse à tenir
La France étant dans l’obligation de voter un budget, le projet de loi de finances (PLF) reviendra en discussion les 8 et 9 janvier 2026 à la Commission des finances de l’Assemblée nationale. C’est la dernière mouture votée par le Sénat qui sera examinée, elle contient, l’amendement des 60 millions €. « Je reste adossé au vote qu’il y a eu en novembre. Je vais reprendre les mêmes termes de l’amendement, les mêmes causes entraineront les mêmes effets. Il n’y a pas de raison qu’il y ait un changement de vote des députés. Il faudra malgré tout batailler, ce n’est pas simple, il faut toujours recommencer les mêmes choses, c’est accablant ! », estime Michel Castellani. Le député bastiais reste confiant. Il s’est entretenu dans l’après-midi à Matignon pendant plus d’une heure avec David Carmier, le nouveau Monsieur Corse désigné par Sébastien Lecornu, et obtenu la promesse d’un rectificatif dans la prochaine loi de finances. « Parmi les sujets que j’ai discutés cet après-midi à Matignon, il y a eu cette affaire de la Dotation de continuité territoriale. J’ai prévenu que je redéposerai, entre autres, le même amendement pour les 60 millions €. J’ai reçu l’assurance que cet amendement sera examiné avec bienveillance par le Premier ministre, malgré les difficultés budgétaires », révèle Michel Castellani. Tout se joue désormais à l’Assemblée nationale. Mardi après-midi, le Premier ministre a demandé aux parlementaires de « trouver la voie d’un compromis » pour « voter un budget en janvier » et rappelé que « la loi spéciale ne permet à l’Assemblée nationale et au Sénat que de continuer la discussion et à l’Etat de percevoir l’impôt et de faire fonctionner les services publics. Chaque jour de Loi spéciale sera un jour de trop ! ». C’est encore plus vrai pour la Corse !
 
N.M.