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CTC : La session tourne court après le retrait du plan Lingua 2020 en plein vote !


Nicole Mari le Samedi 14 Mars 2015 à 00:21

Après le clash du début de séance entre Femu a Corsica et Paul Giacobbi, la session de l’Assemblée de Corse de ce vendredi a tourné court après une bataille d’amendement sur le premier rapport examiné. Le Plan Lingua 2020, très attendu, présenté par Pierre Ghionga, conseiller exécutif en charge de la langue corse, a été brutalement retiré en plein vote des amendements par le président de l’Exécutif, pour manque de majorité suffisante et après le rejet d’un amendement communiste ! Le temps de voter deux dossiers de subventions au Sporting relatifs au déplacement de supporters à Paris pour la Coupe de la ligue, Paul Giacobbi annonce le clap de fin et renvoie à la session d’avril les dossiers en suspens.



Un hémicycle à moitié vide.
Un hémicycle à moitié vide.
Ce fut une bien étrange session qui s’est tenue ce vendredi 13 mars à l’Assemblée de Corse (CTC). D’abord raccourcie à une journée, elle débute par une violente prise de bec entre les Nationalistes modérés de Femu a Corsica (cf article) et le président de l’Exécutif, Paul Giacobbi, sur une parole malheureuse de ce dernier concernant l’absence de questions orales. Les esprits échauffés se calmant après une suspension de séance et une conférence de presse qui permet aux Modérés de vider leur sac, la session reprend avec l’examen du 1er rapport à l’ordre du jour : le plan Lingua 2020, plan pour la normalisation de la langue corse et le progrès vers une société bilingue. Ce plan, attendu depuis le vote du statut de coofficialité, l’an dernier, ne paraissait pas poser de problèmes particuliers. Chaque groupe politique n’ayant pas vraiment changer de position en un an !
 
Un débat bien amorcé
Pierre Ghionga, in lingua nustrale, présente un plan ambitieux tant sur les intentions que sur les moyens de normaliser la langue dans la vie quotidienne et sociale. Le débat s’amorce normalement. Les Nationalistes et une partie de la majorité territoriale approuvent. Le Groupe Gauche Républicaine redit son opposition à la coofficialité, la droite, son scepticisme en plaidant pour un « bilinguisme renforcé », les Communistes s’interrogent sur certaines dispositions relatives à la formation obligatoire, aux modalités de recrutement des professeurs des écoles et à la généralisation du corse à l’école maternelle. Des amendements sont déposés. Femu a Corsica demande la création d’un Office de planification linguistique et culturelle, comme il en existe dans tous les pays dotés d’un statut de coofficialité, l’introduction du corse au compte personnel de formation des salariés et dans les organismes de formation.
 
Un amendement communiste
Les amendements sont examinés par la Commission culture après la pause déjeuner. Une majorité se dégage sur des amendements jugés litigieux, mais achoppe sur d’autres plus anodins. La crise se noue, dans un hémicycle même pas à moitié plein, autour d’un amendement, déposé par les Communistes et soutenu par Paul Giacobbi, qui veut abaisser le niveau requis de langue de C1 à B2. Estimant qu’il s’agit d’une régression par rapport au statut de coofficialité, Femu a Corsica vote contre, la droite et le groupe de la Gauche républicaine lui emboîtent le pas. La majorité territoriale est mise en minorité et l’amendement est rejeté. L’Exécutif demande une suspension de séance, mais revient sans avoir convaincu sa majorité. Les Communistes refusent de retirer leur amendement et menacent de voter contre le rapport final.
 
Un vote interrompu
Brutalement, en plein vote de l’amendement, Paul Giacobbi interrompt le processus et déclare, ex abrupto, que le rapport est retiré. Pierre Ghionga, lui emboîte aussitôt le pas : « Je demande le retrait du rapport parce que je ne suis pas assez fin politique pour comprendre certaines manœuvres ». Le président Bucchini, qui ne s’y attendait pas, est pris de court. La surprise est générale. « J’ai le droit d’interrompre un rapport à tous moments quand je veux et tant que je veux », s’énerve Paul Giacobbi. Jean Biancucci, élu de Femu a Corsica, proteste : « Vous ne pouvez pas interrompre le vote ! ». Paul Giacobbi fait la sourde oreille : « Le rapport est retiré ! », scande-t-il ! La dispute s’envenime avec l’intervention d’Etienne Bastelica, président du groupe Communistes et Front de gauche. Paul Giacobbi n’en démord pas ! Jean Biancucci invoque le règlement intérieur interdisant le retrait d’un rapport en plein vote, Dominique Bucchini riposte avec un article de loi. Le rapport est retiré. « C’est la première fois, depuis 1982, depuis que l’assemblée de Corse existe, qu’un rapport est retiré en plein vote ! », remarque Femu a Corsica. Le plan Lingua 2020, reporté de mois en mois depuis octobre, est renvoyé à la session d’avril. Pierre Ghionga quitte l’hémicycle et regagne Corte.
 
Des aides au Sporting
Le président de l’Exécutif bouleverse l’ordre du jour et se saisit de trois dossiers urgents. Deux concernant deux subventions exceptionnelles au Sporting dans le cadre de la Coupe de la ligue qui se tiendra à Paris le 11 avril prochain. L’une concerne un jeu-concours et l’autre, le déplacement de 1500 supporters insulaires. Certains élus, comme Antoine Orsini, président de corse Social Démocrate, favorable aux aides, n’apprécient guère, cependant, les annonces prématurées du club : « On aurait apprécié que le club respectât le vote des élus et n’annonce pas avant que le vote soit fini ! ». Il déplore, également, comme Jean-Marie Poli de Corsica Libera ou Michel Stefani, élu communiste, le manque de critères sociaux sur le choix des spectateurs bénéficiaires de ces aides. Tous les groupes votent les subventions, à l’exception des Communistes qui s’abstiennent.
Le président de l’Exécutif embraye sur le rapprochement des détenus insulaires incarcérés sur le continent. Une fois, le rapport, plutôt consensuel, adopté, il lève la séance, annule les motions et renvoie, à avril, des dossiers en suspens depuis plusieurs mois.
Au final, une étrange et assez brève journée qui fleurait bon la campagne électorale en cours et celle à-venir. Et promet, pour les neuf prochains mois, d'autres sessions mouvementées.
 
N.M.