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Bastia : un portrait de Pascal Paoli bientôt mis aux enchères


Léana Serve le Mardi 9 Décembre 2025 à 13:03

Peint en 1798 par l’artiste britannique William Beechey, un portrait de Pascal Paoli sera présenté en fin de semaine à l’hôtel Ostella avant sa mise aux enchères samedi. Longtemps méconnu, le tableau n’avait plus été vu en Corse depuis plus d’un siècle.



Photo : Maison de ventes aux enchères Asta
Photo : Maison de ventes aux enchères Asta

Il n’avait plus été vu en Corse depuis plus d’un siècle. Ce samedi, au sein de l’hôtel Ostella à Bastia, la maison Asta mettra aux enchères un portrait de Pascal Paoli peint en 1798 par l’artiste britannique William Beechey. Un tableau réalisé lors de son second exil outre-Manche par l’un des peintres les plus réputés de l’époque. « C'est le peintre de la reine Charlotte depuis 1793 et il reçoit très régulièrement des commandes importantes », explique Vincent Bronzini de Caraffa, commissaire-priseur en charge de la vente. « C'est une année importante pour lui parce qu’il va peindre un portrait royal qui va lui permettre de devenir membre titulaire de la Royal Academy. À l’époque, devenir membre titulaire, c'est l'aboutissement de la carrière d'un peintre. On peut vraiment considérer que notre tableau a été peint l'année où William Beechey était au sommet de son art. »
 

Si les origines du tableau ne sont pas totalement connues, il aurait probablement été commandé par Pascal Paoli lui-même. « Dans une correspondance avec Maria Cosway, épouse de Richard Cosway, il parle de William Beechey et d'un tableau qui a été fait cette même année », poursuit le commissaire-priseur. « En 1798, et même l’année suivante, Pascal Paoli est très portraituré. Il fréquente des cercles artistiques, littéraires : c'est vraiment quelqu'un qui est inséré dans la vie sociale londonienne et qui rencontre des artistes, des écrivains. Il est très ami avec James Boswell, c'est bien connu, mais aussi avec plein d'autres personnalités illustres de son temps. Il a très probablement commandé ce portrait et ça corroborerait le fait que ce soit le plus beau portrait de Pascal Paoli, parce qu’il n'est pas forcément à l'aise avec tous les portraits qui ont été faits de lui. Il a peut-être voulu reprendre la main et laisser la trace qu'il a voulu dans l'histoire de son image. »
 

Dans le tableau de 1m26 de haut, Pascal Paoli est représenté assis, « vêtu comme un gentleman anglais », et tenant une feuille vierge dans les mains. Derrière lui, la ville de Corte, « pleine de symboles ». « C'est un homme vieux, qui a connu des victoires, des défaites. Sa carrière est derrière lui, mais on voit dans son visage la confiance et la sérénité d'un homme qui a tout donné et d'un homme qui croit en son idéologie, en ce qu'il a pu accomplir pour la Corse », précise Vincent Bronzini de Caraffa. « C'est un portrait qui le montre en homme des Lumières et qui est important à l'échelle de l'humanité, surtout à l'échelle européenne. Et c'est un tableau très important pour le peintre aussi. Il fait une signature très ostentatoire pour montrer que c'est un peintre royal. Ça a beaucoup de résonance pour les Anglais, c'est un tableau très important pour l'Angleterre et pour l'histoire de l'art. »
 

Un tableau visible à l’hôtel Ostella
 

D’abord présent au sein de la galerie Corsini à Florence, le portrait arrive ensuite dans la collection du comte Cipriani à Centuri. « C’est là qu'il conserve pour la dernière fois son identité. » Au fil du temps et des ventes qui s’accumulent, le tableau perd peu à peu son héritage et devient simplement un « portrait d’homme ». En 1994, il est vendu à Avignon et retrouve sa véritable identité, « de manière officieuse », probablement grâce à l’acheteur ayant reconnu l’homme politique corse. Aujourd’hui, le tableau s’apprête à être présenté « publiquement pour la première fois ». Visible jeudi et vendredi de 11h à 19h à l’hôtel Ostella, le portrait sera ensuite proposé aux enchères samedi à partir de 17h, clôturant une journée de ventes d’art corse.

Estimé entre 500 000 et 700 000 euros, le tableau est, selon le commissaire-priseur, « la représentation la plus importante de Pascal Paoli ». « Faire la vente en Corse, c'était un peu un devoir de mémoire. J'aurais pu la faire à Paris, ça m'aurait posé moins de contraintes, mais je voulais aussi donner l'opportunité aux gens de le voir en exposition. Il n'a jamais été exposé publiquement en Corse. Il s'est peut-être retrouvé dans la collection du comte Cipriani à la fin du XIXe ou début du XXe siècle, mais je ne pense pas que tout le monde pouvait le voir. On va terminer la journée en beauté avec ce très beau portrait. »