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Bastia : hommage aux victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et aux « Justes » de France


Philippe Jammes le Dimanche 19 Juillet 2020 à 19:31

Devant le monument aux morts, place Saint Nicolas à Bastia, François Ravier, préfet de Haute-Corse, a présidé dimanche en soirée la cérémonie de commémoration de la Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France.




Cette cérémonie a eu lieu en présence d'élus, d’autorités civiles et militaires et de représentants d’associations : Michel Castellani, député de la Haute-Corse, Lauda Guidicelli, conseillère exécutive, Ivana Polisini et Philippe Peretti, adjoints au maire de Bastia, le colonel Paul Biancardini, délégué départemental militaire adjoint,  associations d’anciens combattants, association culturelle et cultuelle Israélite.
Après un discours de Daniel Bueno, membre de la communauté israélite de Bastia, le préfet a lu le message de la ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants, Geneviève Darrieussecq. Ce message (voir ci-dessous) rappelle les circonstances des rafles du 16 et 17 juillet 1942, aussi appelée symboliquement « rafle du Vel d’Hiv », dont ont été victimes des milliers de personnes, et rend hommage aux « Justes », hommes et femmes anonymes qui ont sauvé des centaines d’enfants en les cachant.
Lors de cette cérémonie des gerbes ont été déposées au pied du monument aux morts.
 
Journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’État français et d’hommage aux « Justes » de France
Instituée en 1993, cette Journée nationale  est fixée autour du 16 juillet, la date correspondant aux rafles des 16 et 17 juillet 1942, au cours desquelles près de 13.000 personnes juives furent arrêtées dans Paris et sa banlieue.  8.000 d'entre elles furent regroupées au Vélodrome d'Hiver (le Vél' d'Hiv) avant d'être internées dans les camps de Pithiviers et de Bonne-la-Rolande dans le Loiret, puis déportées. L’occasion aussi d’évoquer la mémoire des 76.000 déportés de France, dont 3.943 seulement sont revenus.


Un Vel'd'Hiv de sinistre mémoire
En signant l’accord «Oberg » le 2 juillet 1942, René Bousquet, secrétaire d’État à la Police autorise  la déportation de 100.000 juifs pour 1942 et charge la police française de l’arrestation des juifs dans la zone nord et dans la zone sud. Pierre Laval propose aux allemands la déportation des enfants de moins de 16 ans. À Paris, la rafle du Vel d’Hiv des 16 et 17 juillet 1942 se traduit par l’arrestation de 13.152 juifs dont 5.919 femmes, 3.118 hommes et 4.115 enfants. Puis le 26 août 1942, après un accord de collaboration policière, le gouvernement du Maréchal Pétain accepte de livrer 10.000 juifs de la zone sud. Des rafles conduites par la gendarmerie française ont lieu partout en province : Bordeaux, Limoges, Lyon, Montpellier, Nancy, Tours, Rouen, Toulouse…  


Message de Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants.
« 16 juillet 1942. « Il est 4 heures du matin. Ils sont venus nous chercher. Je vous dis adieu. »
16 juillet 1942. « Je te fais écrire ces mots. La police est venue nous arrêter, avec tous les Juifs de la maison. On nous a enlevés, moi et mes deux enfants. Je t’écris pour te dire que nous allons être transportés au Vélodrome d’Hiver. »
Ces mots sont écrits aux aurores d’une tragédie, au petit matin d’une journée douloureusement inscrite dans notre histoire, comme une plaie vive dans notre mémoire nationale.
Ces mots sont ceux d’une adolescente de 16 ans et d’une mère de deux enfants. Ces mots écrits dans la précipitation de l’arrestation, dans la confusion de l’incompréhensible, sont à la fois simples et terribles. Ils disent la surprise, l’inquiétude et l’écroulement des certitudes. Ils disent ce que fut la Rafle du Vel d’Hiv : l’irréparable commis par l’Etat français contre des femmes, des hommes et des enfants qui avaient fait confiance à la patrie des Droits de l’Homme.
Il y a 78 ans, la France se trahissait elle-même. La police française, sur ordre de l’occupant, emmenait sans distinction les hommes, les femmes et même les enfants. Ils n’étaient coupables de rien. Ils furent traqués, arrêtés, enfermés au Vélodrome d’Hiver et à Drancy.
Avec le régime de Pétain, la folie criminelle de l’occupant avait trouvé un auxiliaire zélé. Dans Paris et sa banlieue, 13 152 personnes ont été raflées. Pour eux, l’horreur commençait pour ne s’achever qu’à Auschwitz. Aucun enfant ne revint des camps de la mort.
La Rafle du Vel d’Hiv est devenue le symbole de toutes les autres, l’emblème des persécutions menées contre les Juifs en France. En entretenant la flamme du souvenir, nous saluons la mémoire de toutes les victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français. Nous pensons également aux populations tziganes, homosexuelles, handicapées et à tant d’autres.
Lorsque l’humanité semble s’écrouler, des héros anonymes se pressent pour la redresser. Ce jour-là, des Parisiens ont sauvé des centaines de personnes. En maints endroits de France, des familles et des gens ordinaires ont accompli l’exceptionnel, en cachant et en sauvant des juifs de la persécution. Bravant les risques, ils ont incarné nos valeurs les plus précieuses. Ils sont, anonymes ou révélés, des « Justes parmi les Nations ». Cette journée nationale leur est aussi dédiée.
Dans le chemin tracé par Jacques Chirac et suivi par le Président de la République, notre pays regarde son histoire en face, avec clarté et vérité. C’est parce que la République connait son histoire, qu’elle sait d’où elle vient, qu’elle sera intraitable face au racisme, à l’antisémitisme et aux discriminations.
Deux dangers nous guettent et doivent sans cesse être combattus : l’oubli et la haine.  Parce que l’oubli mène à l’indifférence, parce que la haine mène à l’affrontement, nous devons opposer à ces maux la vigilance, la connaissance et la transmission. Il y a des combats pacifiques à mener contre le négationnisme, le révisionnisme et le complotisme.
Cette journée nationale y contribue. Mais ce combat est aussi celui du quotidien, de chaque citoyen attaché aux valeurs de la République. L’esprit de vigilance doit nous animer, il doit être celui d’une jeunesse éclairée et consciente du passé ».