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​Jean-Charles Orsucci : « le risque maritime va aller croissant dans les bouches de Bonifacio »


Philippe Peraut le Samedi 26 Octobre 2019 à 11:09

Président du groupe « Andà per dumane » à l’Assemblée de Corse et maire de Bonifacio depuis 2008, Jean-Charles Orsucci commente les derniers événements survenus dans l’île et dans la Cité des Falaises…



- Vous étiez aux côtés des agriculteurs, ce jeudi à l’Assemblée de Corse. Que peut-on retenir de cette entrevue ?
- Il y a des tensions qui ont conduit la profession à réagir, on se doit de les prendre en compte. Les choses se tendent et il est de notre devoir, en tant qu’élus, de réagir. Nous sommes solidaires de la profession et de ceux qui sont aujourd’hui dans la difficulté. Mais je rappelle les conditions dans lesquelles je suis prêt à m’engager fortement et à aller jusqu’au bout à leurs côtés. C’est bien que l’on soit à l’aise et que l’on puisse défendre la profession du mieux possible. Pour cela, et pour éviter tout reproche de la part des responsables à l’échelle nationale, il est important, en amont, de veiller à éviter tout excès.

- L’accident du 12 octobre dernier survenu dans les bouches de Bonifacio nous rappelle que nous ne sommes pas à l’abri d’une grosse catastrophe en Corse. Inquiétant ?
- Maintenant que cela s’est bien terminé, on peut considérer que cet événement peut, effectivement être mis au crédit d’un cri d’alerte que l’on porte systématiquement vis-à-vis de l’opinion publique et des instances internationales en considérant que Bonifacio est dangereux de ce point de vue. Je rappellerais, toutefois, que Bonifacio, c’est la plus grande catastrophe maritime en Méditerranée avec le naufrage de la Sémillante qui fit 773 morts en 1855, le Fenes, échoué aux îles Lavezzi en octobre 1996 et aujourd’hui le Rhodanus. C’est une zone où il y a 200 jours de vent par an, une géologie dangereuse avec tous ces îlots et où le trafic monte en puissance. Au-delà de la crainte d’une grande catastrophe maritime, c’est celle de ce type de trafic qu’il faut appréhender correctement, on a pu le voir avec le bateau du rappeur Gims. On s’en est bien sorti car les vents étaient favorables, tout s’est bien passé mais on doit repenser les bouches de Bonifacio. Pour éviter qu’une grande catastrophe ne survienne. Il faudra et la ministre s’y est engagée,  obtenir la mise en place d’un pilotage automatique et d’un rail dans les bouches. En tant qu’élu de la Collectivité, je souhaiterais que cette démarche s’inscrive dans tout le canal de Corse, du côté de la Tyrrhénienne et pas seulement à Bonifacio. La catastrophe du Rhodanus s’est bien terminée mais le combat continue car le risque va aller croissant dans les bouches de Bonifacio.

- Faudrait-il revoir, en amont le trafic maritime ou du moins le gérer différemment ?
- Je pense qu’il faut poursuivre ce que nous faisons depuis longtemps avec l’Office de l’Environnement et les différents ministres. Il convient, à cet effet, de saluer le travail considérable effectué par Ségolène Royale. Il faut, aujourd’hui, qu’Elisabeth  Borne, qui en pris l’engagement, obtienne de l’organisation maritime internationale, ces types de pilotage parce que nous sommes dans une zone particulièrement vulnérable de Méditerranée. Nous avions obtenu, de l’Etat, de pouvoir inscrire  les bouches de Bonifacio soient inscrites au patrimoine mondial de l’Unesco. Cette zone est fantastique d’un point de vue faunistique et floristique. Il faut absolument la préserver. Et je reste persuadé que des consensus larges vont se dégager en Corse ou avec Paris afin d’aller vers davantage de protection.


- Toujours au niveau patrimonial, qu’en est-il des falaises, un joyau pour la cité ?
- La chute de pierres démontre et l’actualité récente l’a malheureusement confirmé, que nous n’étions guère à l’abri d’une catastrophe. Nous avons repris le travail avec l’Etat et les services concernés afin de poser des filets de protection. Il y a divers intervenants car les propriétaires peuvent être privés ou institutionnels, c’est le cas notamment de la Cdc. On peut améliorer les choses. Par ailleurs, l’Etat a lancé une étude importante sur les falaises du côté de la maison de Marie-José Nat, à laquelle je rends hommage. Les derniers éléments de  l’étude qui nous a été transmise ont démontré qu’il n’y avait pas de danger grave et imminent. On serait rassurés. Mais la problématique de la chute de pierres existera toujours, la géologie de Bonifacio est ainsi faite. C’est sa force et sa faiblesse. On travaille avec les différents services compétents pour limiter ce risque au maximum.

- Abordons le travail de la municipalité. Bonifacio ville ou gros village ? Une gestion particulière ?
- Il est que cette fracture des saisons entre un hiver calme et une période estivale très fréquentée est particulière. Je crois que s’il y a une commune en Corse où les choses compliquées, c’est bien à Bonifacio. Nous accueillons 2 millions de visiteurs par an. D’après nos estimations, nous avons 15000 personnes qui y résident en août, un passage de 30 000 personnes…et 3 000 habitants l’hiver. Plus qu’ailleurs, cette fracture est marquée à Bonifacio. En 2008, j’avais fait de la lutte contre cette fracture, un élément important. Je n’ai pas réussi sur le sujet et je l’ai même accentué malgré moi. En réussissant le pari économique relevé avec mon équipe lors des deux mandats écoulés, on a aggravé ce phénomène avec des commerçants qui travaillent de mieux en mieux l’été et ferment, de ce fait plus tôt en dehors de la saison. Pour autant, nous nous efforçons, avec l’équipe municipale et le tissu associatif de lutter contre ce phénomène en mettant en place des manifestations durant de novembre à février. Cette fracture, c’est notre faiblesse et en même temps notre force. Le budget de la commune de Bonifacio et les investissements réalisés depuis 12 ans correspondent à ceux d’une ville de 15 000 habitants et non 3 000.