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Maria Guidicelli : « Le statut de résident, tel qu’il est défini, ne me convient pas »


Nicole Mari le Mardi 6 Août 2013 à 00:34

Elue du Front de gauche, conseillère exécutive en charge, notamment, de l’élaboration du PADDUC (Plan d’aménagement et de développement durable de la Corse) qui sera débattu à l’automne à l’Assemblée de Corse (CTC), Maria Guidicelli revient, pour Corse Net Infos, sur le débat des Ghjurnate di Corti auquel elle a participé. Favorable à une évolution institutionnelle, elle s’affirme personnellement opposée au statut de résident défini par dix ans d’ancienneté.



Maria Guidicelli, élue du Front de gauche et conseillère exécutive en charge de l’élaboration du PADDUC.
Maria Guidicelli, élue du Front de gauche et conseillère exécutive en charge de l’élaboration du PADDUC.
- - Qu’est-ce qui vous a incité à participer à ce débat ?
- C’est très clair dans mes propos. Je suis en charge du PADDUC. J’ai mené pendant trois ans une démarche de concertation sur cet enjeu majeur pour l’avenir de la Corse. Nous allons y définir le modèle de développement que nous voulons pour cette île et pour ceux qui y résident. J’ai, donc, accepté l’invitation de Corsica Libera pour simplement expliquer comment ce PADDUC se construit et pour répondre à une demande de dialogue. Je suis venue dialoguer et donner la position de la conseillère exécutive, mais également de l’élue du Front de Gauche que je suis.
 
- Justement, vous avez pris position contre le statut de résident. Pourquoi ?
- Le statut de résident, tel qu’il est défini aujourd’hui, c’est-à-dire qualifiant les personnes résidant sur cette île au regard d’une antériorité de résidence, ne me convient pas. Je ne partage pas l’approche qui consiste à dire que l’on doit justifier de dix ans d’ancienneté de résidence, ou même moins, sur le territoire pour acquérir un bien. Je regarde vers l’avant et pas vers l’arrière. Je considère que toute personne, qui pose le pied sur cette île pour y vivre, doit pouvoir avoir accès à un droit fondamental qui est le droit au logement. Aujourd’hui, nous devons garantir ce droit fondamental aux personnes qui arrivent chez nous, qui s’engagent dans un projet de vie et qui élèvent leurs enfants.
 
- Dans ce cas, pourquoi avez-vous pris en charge ce dossier ?
- Parce que le Président du Conseil Exécutif a voulu qu’il n’y ait aucun tabou. Partant de là, j’ai piloté la démarche de réflexion et l’expertise prévue par la feuille de route validée par la CTC. Cette expertise fait plusieurs propositions que j’ai évoquées. Il n’empêche que, dans leur mise en œuvre, les choses ne sont pas tranchées. Le débat va se faire dans l’hémicycle sur la base du dossier technique que j’ai piloté et qui est une simple contribution ouvrant sur différentes hypothèses. La décision se prendra à l’Assemblée de Corse.
 
- Quand ?
- Il faudra que le Président de l’exécutif organise le calendrier. Je pense que cela devrait se faire dès la rentrée ou, en tous cas, durant le dernier semestre 2013.
 
- Par contre, vous êtes favorable à une évolution institutionnelle. Pour quelles raisons ?
- Je considère que la Corse doit pouvoir être identifiée comme région ayant des spécificités. En plus, la mention de la Corse dans l’article 72-5 de la Constitution me paraît être souhaitable et positive pour répondre à des objectifs de rééquilibrage social. Mais, en même temps, je suis fortement attachée au fait que la Corse fait, avant tout, partie de la République française. C’est un élément qu’il m’a paru important de mettre en avant dans les débats.
 
- En quoi la réforme est-elle indispensable ?
- La réforme institutionnelle ne peut pas être un préalable ou une fin en soi. Il faut, d’abord, répondre à la question : pourquoi la faire et pour quels objectifs ? La réforme doit être un outil, un mode de réponse à des difficultés que nous avons identifiées. Nous voulons atteindre un objectif social, par exemple faciliter l’accès au logement pour les plus modestes, et inverser des mécanismes spéculatifs. A partir de là, nous pouvons actionner un certain nombre de leviers, comme le levier fiscal. Mais, en l’état actuel du droit et de la place de la Corse dans la Constitution, ce n’est pas possible. Reconnaître la place de la Corse dans la Constitution lui ouvre les voies d’outils nouveaux. C’est cela qui est essentiel !
 
- Cette évolution n’est-elle pas aussi un moyen de sécuriser le PADDUC ?
- Oui. Il faut que le PADDUC soit applicable. Or, aujourd’hui, c’est le seul exercice de ce type en France. Il est hors du droit commun. Il risque d’être frappé d’inconstitutionnalité. Il faut donc le consolider et faire en sorte qu’il ne soit pas inconstitutionnel. C’est pour cela qu’il faut inscrire la Corse dans la Constitution comme aussi un moyen de sécuriser notre futur PADDUC.
 
- Pensez-vous convaincre le gouvernement ?
- Le gouvernement attend de la Corse qu’elle fasse des propositions que nous sommes, aujourd’hui, en train de construire. Lorsque cette proposition sera aboutie, nous devrons la porter auprès du gouvernement et du Président de la République.
 
Propos recueillis par Nicole MARI

Maria Guidicelli, lors du débat des Ghjurnate di Corti.
Maria Guidicelli, lors du débat des Ghjurnate di Corti.