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Livres condamnés au pilon : Un retour en grâce ?


Jean Chiorboli le Samedi 7 Février 2015 à 18:44

L'esprit d'entreprise, la conscience professionnelle fait que souvent on s'identifie à une structure qui devient comme une seconde famille, une seconde nature. Ainsi certains personnels du CRDP de Corse se sont sentis personnellement attaqués par la diffusion de photos relatives au "malencontreux stockage provisoire" d’ouvrages "destinés au pilon".



Livres condamnés au pilon : Un retour en grâce ?

L'affaire a démarré sur twitter, s'est propagée et a suscité des centaines de réactions notamment sur la page Facebook du groupe dont je suis administrateur (https://www.facebook.com/groups/CorsicaScrivi/). C’est à ce titre que je me permets de réagir à mon tour.

Le CRDP a diffusé un communiqué de "mise au point", relayé par Corse Net Infos (http://www.corsenetinfos.fr/CRDP-Des-images-hors-contexte-sur-Facebook_a13600.html). Le "chapeau" (qu'on peut juger surprenant) précise que les ouvrages n'ont pas été "jetés sur la voie publique", mais étaient en réalité "destinés au pilon, c’est-à-dire à la destruction". On appréciera le distinguo. La méthode, ajoute-t-on, est "fréquente dans le monde du livre": s'il s'agit d'une tentative de justification, on peut estimer qu’elle est discutable.


Le communiqué évoque aussi "le déménagement et la mise à jour de ses stocks réalisées en urgence par le CRDP en décembre dernier suite à la demande de libération des locaux de stockage par leur propriétaire". Le propriétaire des "locaux de stockage" (était-il nécessaire de l’impliquer dans le communiqué?), les personnels du CRDP (qui se sont vraisemblablement limités à exécuter les consignes de leur hiérarchie) n'ont aucune raison de se poser en victimes, personne ne les a attaqués. Peut-on reprocher à des fonctionnaires d'appliquer le règlement de leur établissement?

Le problème, on voudra bien en convenir, ne tient donc pas aux exécutants qui doivent se plier, sans doute à contre-cœur, à certaines règles. Ils ne sont cependant pas tenus de les justifier ni de les trouver judicieuses au motif qu’elles sont « normales », d’autant que le CRDP de Corse n’est pas seul concerné (voir le document de France culture dont est tirée la photo jointe).

Je continue à recevoir de nombreux messages (privés bien entendu, chacun étant soumis au fameux "devoir de réserve") estimant que c'est surtout la "règle du pilon" qui est choquante, et la vision des ouvrages (de langue et culture corses en l’occurrence) gisant à terre. Ces messages émanent parfois des mêmes personnes qui, en un premier temps, se sont cru obligées d'affirmer que le "grand gaspillage" est la pratique habituelle, donc..."normale", et qui se sont déclarées choquées "par "L'EMBALLEMENT DES RÉSEAUX SOCIAUX" (où l’on on trouve en effet le meilleur et le pire, comme dans les poubelles...).

Autrement dit : malheur à celui par qui le scandale arrive.

Le nœud du problème est en réalité la règle inique qui, pour des raisons diverses et plus ou moins recevables, condamne à la destruction de nombreux ouvrages. Quelles que soient les contraintes techniques, quels que soient les intérêts, les exigences ou les états d'âme des différentes personnes, institutions ou lobbys impliqués, la condamnation au pilon ne doit pas être une règle absolue et imprescriptible.

Une solution pourrait être trouvée à condition que chacun soit prêt à un dialogue constructif. Le communiqué du CRDP évoque la "transparence" du service public. Le préalable à la recherche d'une solution pourrait être la publication en temps utile de la LISTE DES OUVRAGES DESTINÉS À LA DESTRUCTION.

Cela serait un premier pas, indispensable. Nul doute que cette mesure permettrait de rechercher les voies et moyens appropriés pour "sauver" au moins une partie des ouvrages listés. Dans ce but de nombreuses dispositions et mesures concrètes ont été évoquées. Leur faisabilité sera évaluée dès que sera acquis le principe de la PUBLICATION PRÉALABLE de la "liste des condamnés au pilon", à diffuser sur les réseaux sociaux, de manière officielle, ou confidentiellement auprès des institutions ou associations prêtes à gérer le problème.

Quelques personnes - étudiants, groupes et associations volontaires - ont, d'ores et déjà, proposé leurs services et leurs idées. Une représentation est  prête à rencontrer les responsables institutionnels concernés s’ils en sont d’accord. Pourquoi ne pas « tenter le coup » ?

Jean Chiorboli, professeur à l’Université de Corse 06/02/2015