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Hôpital de la Miséricorde d'Ajaccio : L’inquiétude dure et perdure !


José Fanchi le Mardi 23 Octobre 2018 à 21:50

Catastrophique, la situation financière de l’hôpital de la Miséricorde ! Le syndicat CFDT a, depuis longtemps, tiré la sonnette d’alarme, mais personne n’a rien vu venir. La situation s’est aggravée. La question se pose concernant l’ouverture du prochain hôpital d'Ajaccio avec, à la clé, une dette de 30 millions d’euros. Un beau cadeau d’ouverture ! Le vieil établissement manque de tout. Même de papier hygiénique ! L’ARS fait la sourde oreille ! Paris ne veut rien entendre.



« On va droit dans le mur », clame le syndicat CFDT de l’hôpital d’Ajaccio. Les difficultés sont nombreuses. Personne ne sait où donner de la tête et la situation se détériore au fil des jours et des mois. Tout cela à... six mois de l’ouverture du nouvel hôpital ! C’est du moins ce qu’affirme le directeur de la Miséricorde qui confirme que la date sera respectée.

La grosse inquiétude
Conférence de presse hier matin au siège de la CFDT pour faire le point sur la situation actuelle, à savoir le déficit structurel qui ne diminue pas, le déficit cumulé qui continue d’augmenter, la dette, l’ouverture du prochain établissement, les courriers sans réponse, les fournisseurs qui ne fournissent plus. Ce n’est pas la Berezina, mais presque… !
Manette Bruni, qui évoque la phase transitoire que traverse l’hôpital, ne cache pas que la situation devient inquiétante : « La première des inquiétudes vient de notre déficit structurel qui s’élève à 30 millions d’euros et qui ne baisse pas, malgré tous les efforts qui sont faits en interne. C’est vraiment inquiétant ! A l'époque, nous appelions cela des perfusions, mais nous constatons que les aides de l’Etat deviennent inférieures tous les ans. On devait recevoir 20 millions d’euros cette année, 11 seulement ont été versés. Les années passent, l’Etat se retire et la situation devient forcément plus catastrophique ».  

La preuve ?
« Aujourd’hui, le règlement des fournisseurs est passé de 240 à 365 jours. Résultat : ils ne veulent plus nous livrer. Nous manquons de tout dans l’établissement, de la petite aiguille aux gants, des serviettes au papier hygiénique. Les salariés se servent des draps pour essuyer les patients !  Ce qui nous étonne surtout, c’est le mutisme de l’Etat. Certes, le phénomène est national, le mode de financement ne correspond plus au déficit des hôpitaux, mais nous avons, à Ajaccio, un hôpital neuf, et ce mutisme nous inquiète. Cela aura pour conséquence directe de traîner le déficit dans le nouvel établissement.  Pire encore, ce nouvel hôpital manque totalement d’équipement, mais l’Etat a, une fois encore, refusé de nous aider. Nous avons demandé à l’hôpital de la Miséricorde d’emprunter 10 millions d’euros pour équiper le nouvel établissement. Est-ce responsable ? ».

Payer les charges ou les salaires ?
La situation est effectivement catastrophique et l’inquiétude ne cesse de grimper. Le syndicat se demande jusqu’où cela va mener. Il a maintenant la certitude que Paris se désengage totalement. Comment va évoluer la situation ? Personne ne le sait ! Mais une chose est sûre : faudra-t-il attendre 2020 et les élections pour prendre ce dossier à bras-le-corps ? Faudra-t-il supporter cette situation plus que critique deux années durant ? « Il est certain que cette situation ne peut plus durer, surtout si nous entrons dans le nouvel hôpital », enchaîne Manette Bruni. « Cela fait cinq ans que l’on tire la sonnette d’alarme, que l’on clame haut et fort que nous allons droit dans le mur. Si nous entrons dans le nouvel hôpital avec ce déficit, que va-t-il se passer ? La même situation que nous connaissons aujourd’hui ? Nous n’avons plus de trésorerie ! Comme tous les ans à pareille époque, on se pose encore et toujours la même question de savoir si on va payer les charges ou si on va payer les salaires. Bien sûr, en fin d’année, nous percevrons une aide de l’Etat, une perfusion pour couvrir et boucler l’année. Après, on repartira avec les mêmes problèmes. Cette situation ne peut pas durer indéfiniment ».

Des solutions ?  Le futur hôpital risque-t-il fort d’être, d’entrée, amputé ?
« Il le sera certainement compte tenu de la situation qui est la nôtre aujourd’hui. Mis à part le problème des accès que nous avons soulevé - nous continuerons à le faire, même si nous avons obtenu des places de parking en plus - on se pose la question de savoir comment va se passer le jour de l’ouverture ? Nous ne savons absolument rien au niveau des organisations, de la mutualisation des services qui vont travailler ensemble et surtout des effectifs. C’est la grande interrogation. Le directeur persiste à dire que l’ouverture se fera en juin 2019, cela nous surprend beaucoup. Nous ne voyons aucune solution envisageable… ».

Que faire alors ?
« On doit, à la vérité, de dire que, pour une fois, nous avons un directeur qui se bat pour l’hôpital public, mais chaque fois, qu’il se rend à Paris pour des négociations incessantes, on lui oppose une fin de non-recevoir. Le déficit de l’hôpital correspond aujourd’hui à 600 emplois.  Comment voulez-vous que l’on puisse se passer de ces emplois, pour la plupart dans le soin ? Cela fait des années que ça dure, ça suffit ! Il faut avancer, se mettre autour d’une table et chercher une solution avant que ça n’explose, crier que ce n’est plus viable. Aujourd’hui, on touche le fond, il faut le dire, le clamer haut et fort auprès de la classe politique, de la population, de l’ARS (Agence régionale de santé), prendre rendez-vous avec la préfecture, le maire d’Ajaccio qui est président du Conseil d’Administration, le Conseil de Surveillance qui vient d’écrire au ministère. »

Un cumul de 130 millions d’euros
La dette s’élève, aujourd’hui, à 30 millions d'euros et à 130 millions d’euros cumulés d’années en années. Une paille ! Quelle pourrait-être alors la bonne solution pour absorber ces dettes ? Comment entrer dans un nouvel établissement avec autant de déficit, se retrouver dans les mêmes difficultés et pour combien de temps ? « Occuper les nouveaux locaux avec ce déficit, c’est tout simplement déplacer le problème. Personne ne se dit en haut que ce n’est pas la bonne solution. Avec la venue du ministre Le Maire et la prochaine visite du Premier Ministre, nous espérons être entendus. Tous les hôpitaux de Corse sont en déficit, il y a donc un problème. Mais, malgré toutes les réunions et autres discussions, rien de nouveau. »

Et l’Agence Régionale de Santé dans tout cela ?
  « Le directeur, M. Nabet, qui vient d’arriver, ne dit rien. La première rencontre nous a grandement déçus. S’entendre dire que nous avons loupé le coche à propos de l’installation de la clinique sur le terrain de l’hôpital.  Soit il ne comprend pas ce problème, soit il n’a pas pris la mesure des dossiers. Nous verrons sa position lors de notre prochain rendez-vous fixé au 15 novembre… » Une chose est sûre, le climat social est hyper brûlant et ne fera que s'aggraver au fil des semaines et des mois à venir. La moindre étincelle et le dossier explose. Il ne faudra sans doute pas s’étonner, un jour ou l’autre, que des actions soient menées un peu partout. Le torchon brûle avec l’Etat, cela ne fait pas l’ombre d’un doute !

J.F.