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Face à la flambée du cacao, les chocolatiers corses tiennent bon pour Pâques


Léana Serve le Samedi 19 Avril 2025 à 09:18

À l’approche de Pâques, les chocolatiers de l'île affrontent une envolée sans précédent du prix du cacao, qui a bondi de 14 % en un an. Malgré la hausse des coûts, ils font le choix de préserver leurs tarifs pour leurs clients, quitte à rogner sur leurs marges et à adapter leur production.



Le prix du chocolat a augmenté de 14 % en un an
Le prix du chocolat a augmenté de 14 % en un an

À quelques jours de Pâques, les artisans chocolatiers garnissent leurs vitrines d’oeufs, lapins et poules, mais cette édition 2025 s’annonce un peu particulière. Selon une étude de l’UFC-Que Choisir publiée le 7 avril, le prix du chocolat a augmenté de 14 % en un an. En cause : de très mauvaises récoltes, notamment dans certains pays d’Afrique de l’Ouest, comme la Côte d’Ivoire et le Ghana, qui représentent plus de 60 % de la production mondiale de cacao. Ces deux pays ont connu des conditions climatiques extrêmes, comme des épisodes de sécheresse et des fortes pluies, mais aussi des maladies qui ont touché les cacaoyers, et auxquelles les plantations, vieillissantes et fragiles du fait d’une conduite en monoculture intensive, résistent mal. L’année dernière, le cours du cacao a même atteint un niveau record à la Bourse de New York, où une tonne de cacao s’est négociée à 10 000 dollars.
 

En Corse, les artisans chocolatiers n’ont donc pas été épargnés par cette augmentation de prix. “On se fournit en chocolat dans des usines sur le continent qui ont leur production de cacao, mais le prix a complètement flambé”, déplore Didier Leoncini, artisan chocolatier à Bastia. “Depuis un an, on s’aperçoit que le prix est en constante augmentation. Il a presque doublé par rapport au prix auquel il était il y a encore un an ou deux. La hausse du prix de la matière première nous impacte directement."

À Furiani, Aline Giammertini, gérante de la chocolaterie Aline, constate “un prix qui a doublé depuis le début de l’année”. “Depuis la création de l’entreprise il y a 12 ans, on a vraiment constaté une augmentation des prix. Le chocolat coûte aujourd’hui trois fois plus cher qu’il ne coûtait il y a un peu plus de dix ans.” Du côté des clients, la hausse des prix se fait aussi ressentir. “Avant, je prenais sans regarder les prix, mais maintenant je regarde tout ça de plus près”, déclare Eliane, cliente de la pâtisserie-chocolaterie Leoncini. “Je suis retraitée, et je fais attention à mes dépenses. Je vais d’ailleurs prendre les petites fritures à 12€ plutôt que les plus gros paquets à 16€”, précise-t-elle avant de passer à la caisse.


Des prix inchangés mais des méthodes repensées

Pour pallier cette augmentation, les chocolatiers auraient pu augmenter drastiquement leurs prix, mais cette solution n’était pas envisageable pour eux. “En 12 ans d’existence, on n’a jamais augmenté nos prix”, indique Aline Giammertini. “Au-delà de Pâques, on fait du chocolat toute l’année, donc on a dû rogner notre marge.” Didier Leoncini, quant à lui, explique qu’il est “compliqué d’augmenter les prix par rapport aux clients”. “Si on devait augmenter nos prix de 50 %, ce serait vraiment trop cher pour eux. La dernière fois que le chocolat a augmenté, on a eu une augmentation de 30 %, et on a seulement augmenté nos prix de 10 % pour que les clients ne soient pas trop impactés.” Les artisans chocolatiers ont alors dû adapter leurs techniques de production. “On essaie de réduire le poids des moulages”, précise Didier Leoncini. “On a beaucoup plus de petites pièces pour essayer de rester dans les budgets du panier moyen de 30-40€, mais ça fait forcément des pièces plus petites.”
 

Les professionnels indiquent également qu’il n’y a désormais “plus le droit à l’erreur”. “On essaie de limiter la perte et de réduire la fabrication en achetant moins”, déclare Didier Leoncini. “On a été obligé de développer d’autres produits en parallèle, comme un service de traiteur et d’épicerie fine”, indique pour sa part Aline Giammertini. “C’était soit ça, soit on arrêtait de faire du chocolat. Au niveau de la fabrication, il n’y a aussi plus de marge d’erreur. Quand on fabrique un œuf, on ne doit pas se tromper sur les grammages, le chocolat ne doit pas blanchir, on ne doit tout simplement pas gaspiller la matière première. On a aussi réorganisé la logistique de fabrication, avec des techniques pour aller plus vite, afin de faire des économies sur le coût des salaires.”

Selon les artisans chocolatiers, les clients sont satisfaits. “Pour nous, l’augmentation des prix n’a rien changé, les clients viennent toujours aussi nombreux”, indique une vendeuse de la chocolaterie Grimaldi à Bastia. Aline Giammertini, quant à elle, explique que ses clients “sont contents que les prix n’aient pas augmenté”. “Il y a toujours autant de passage à la boutique, peut-être même encore plus que l’année dernière. Les clients ont un panier assez élevé, et ils comprennent les efforts qu’on met en place pour ne pas augmenter nos prix, et c’est assez réconfortant.”