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DOSSIER. Hélène Davo, une magistrate chevronnée à la tête de la Cour d’Appel de Bastia


MV & MP le Dimanche 5 Mars 2023 à 20:28

À l'approche de la Journée internationale des Droits des Femmes, CNI a choisi de consacrer son dossier hebdomadaire à des personnalités féminines qui se battent chaque jour pour l'égalité et la justice, contre les violences sexistes et les inégalités entre les hommes et les femmes.

Parmi ces personnalités inspirantes, on retrouve Hélène Davo, présidente de la Cour d'appel de Bastia. Nommée en septembre 2020, elle est la première femme à occuper cette fonction dans la juridiction bastiaise. Portrait d’une magistrate chevronnée à l'engagement remarquable.



Hélène Davo
Hélène Davo
Depuis septembre dernier, elle est la première femme à occuper la fonction de présidente de la Cour d’Appel de Bastia. Mais à 53 ans, Hélène Davo a déjà « plusieurs vies dans la magistrature » derrière elle. « J’ai commencé comme juge d’instance dans une toute petite juridiction, puis j’ai été juge d’instruction et présidente de chambre en juridiction, j’ai travaillé au ministère de la Justice dans le domaine international, aux Nations Unies en Colombie dans le domaine des droits de l’Homme, dans la diplomatie en Espagne comme magistrate de liaison. Et enfin, j’ai été la directrice adjointe de cabinet de la Garde des Sceaux Nicole Belloubet et la conseillère Justice du Président de la République Emmanuel Macron », raconte cette mère de quatre enfants qui aujourd'hui vit à Bastia. Un parcours exceptionnel que cette petite-fille d’exilés républicains espagnols qui ont fui la dictature de Franco doit à la force de son travail et de son histoire singulière. 

« Je me suis construite au sein d’un héritage familial très structurant : une volonté d’intégration républicaine qui m’a donné une grande force et un désir de justice qui m’a toujours animé », confie-t-elle en dévoilant avoir « voulu être juge dès (ses) 13 ans, suite à une rencontre ». « J’aime la position du juge, qui est celle d’un équilibriste : savoir écouter toujours, avoir la bonne distance, connaitre la règle de droit et savoir trancher. C’est un métier profondément humain où il faut aimer les gens », explique-t-elle.

Bonne élève, c’est dans cette optique qu’elle entreprendra des études de droit et sera l’une des premières étudiantes à participer au programme européen Erasmus, en partant pour l’université de Bilbao. « Je suis ensuite rentrée à l’Institut d’Études Politiques de Paris, extraordinaire formation qui m’a beaucoup appris et paradoxalement m’a rapproché du droit, en le mettant en perspective de façon critique. J’ai ensuite tout de suite passé le concours de la magistrature que j’ai réussi et suivi la formation de l’ENM à Bordeaux ».

" Dire aux jeunes femmes que tout est possible "

Éternellement assoiffée d’apprendre, cette travailleuse acharnée et passionnée se dit animée par « l’amour de la liberté et de l’indépendance », par son inébranlable foi « dans le changement et dans l’humain » et surtout par son aversion à l’égard des injustices. Alors, quand on lui parle des inégalités qui subsistent entre hommes et femmes et des combats qui ne manquent pas pour arriver à une égalité effective entre les sexes, elle invite en premier lieu à « être tout simplement une femme libre et à montrer par l’exemple que tout est possible » pour abattre ces murs toujours en place. « L’égalité entre les hommes et les femmes est un enjeu de société très fort. C’est la grande cause du quinquennat. C’est un combat qu’il faut continuer à mener parmi d’autresComme citoyenne, j’ai toujours soutenu les grands combats féministes, mais je n’ai jamais été ce qu’on appelle une militante féministe », livre-t-elle en dévoilant, du fait de son histoire personnelle, être pour sa part très engagée à titre privé pour lutter pour l’égalité des personnes en situation de handicap. 

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Être la première femme à prendre la tête de la juridiction bastiaise ne lui a donc pas fait peur. C’est même une décision qu’elle a accueilli « avec une grande fierté ». « D’autant plus grande que je connais le rôle très important des femmes dans la société insulaire. Je pense notamment à leur rôle imminent dans la Résistance. Je découvre sur place, et je le pressentais, que les femmes ont un rôle central dans la société corse », souligne-t-elle. « Je n’ai pas le sentiment qu’être une femme à ce poste soit un handicap. Je ne rencontre sincèrement au quotidien aucune difficulté en étant femme pour exercer mes fonctions. Pas plus qu’un homme. Je n’en ai d’ailleurs jamais ressenti dans ma carrière », affirme-t-elle par ailleurs en martelant : « Il faut dire aux jeunes femmes que tout est possible et que l’on peut être et femme, et mère et être une grande professionnelle. On peut être tout à la fois. Il ne faut pas se mettre de murs artificiels, de frontières. La magistrature est un corps très féminisé et les femmes exercent de plus en plus des postes à responsabilité autrefois réservé aux hommes. Les femmes représentent 65% du corps de la magistrature. En revanche, nous ne sommes que 25% à occuper des fonctions à responsabilités. Il y a comme un plafond de verre qui s’explique en grande partie par la plus faible mobilité des femmes et le phénomène d’autocensure.  Il faut le combattre ». 

Nul doute, qu'elle saura le faire.
Hélène Davo
Hélène Davo