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Congé menstruel : "Un sujet qui nécessite un débat" estime le docteur Sabrina Orlandi


M.V. le Mardi 21 Mars 2023 à 17:01

Après l'adoption en Espagne d'une loi créant un congé menstruel, des parlementaires de gauche veulent désormais inscrire une mesure similaire dans la loi française et ont commencé à préparer des propositions de loi. Une bonne initiative selon le docteur Sabrina Orlandi, gynécologue obstétricien à Ajaccio qui estime que ce congé devrait être instauré en France.



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En février 2023, l’Espagne a été le premier pays européen à voter un projet de loi pour la mise en place d’un congé menstruel. Ce type de congé existant déjà dans d’autres pays (Japon, Corée du Sud, Indonésie, Australie) permet aux femmes atteintes de dysménorrhées (douleurs de règles) de bénéficier d’un temps de repos mensuel légal. 

En France, l’intégration d’un congé menstruel dans le code du travail fait débat. Quelques entreprises l'ont déjà mis en place et une première collectivité territoriale, la mairie de Saint-Ouen, va le proposer à ses agentes à partir du 27 mars. 
Des parlementaires de gauche ont même commencé à préparer des propositions de loi et selon une étude menée par l’IFOP pour Eve and Co, un fabricant de coupes menstruelles, 66% des femmes qui travaillent seraient favorables à un congé menstruel et 64% d’entre elles n’hésiteraient pas à y avoir recours. Le docteur Sabrina Orlandigynécologue obstétricienne à Ajaccio, est du même avis "À mon sens, ce congé devrait être instauré. En effet, un congé facultatif non considéré comme un arrêt de travail classique restant à la charge de l’employeur doit être proposé à la vue de dysménorrhées importantes, invalidantes et résistantes au traitement qui entraînent une perturbation des activités quotidiennes avec des impacts professionnels, conjugaux et sociaux." explique le médecin.


Jour de congé ou arrêt maladie ?
Les parlementaires de gauche qui travaillent sur les propositions de loi s'interrogent également sur la définition même du congé menstruel. Une telle mesure soulèverait en effet plusieurs questions juridiques et budgétaires. Si le congé menstruel est bien défini comme un congé, ce serait à la charge de l'employeur. Si c'est un arrêt maladie, comme en Espagne, ces jours seraient financés par la Sécurité sociale.  La sénatrice PS Hélène Conway-Mouret souhaite par exemple que le congé menstruel puisse aussi devenir une journée de télétravail.

"Actuellement un arrêt de travail par le médecin traitant ou le gynécologue supplée à ce congé." explique le docteur Sabrina Orlandi  selon laquelle les effets positifs de ce congé seraient de réduire le nombre d’arrêts de travail, d’améliorer le bien-être et la prise en charge des patientes souffrant physiquement et psychologiquement. "Cela se traduirait vraisemblablement par une meilleure qualité de travail et lèverait le tabou autour des dysménorrhées et des pathologies les provoquant." détaille-t-elle "Il s’agit de dysménorrhées ne pouvant être expliquées par des pathologies organiques gynécologiques. La douleur est attribuée à des contractions et une ischémie utérine médiée par les prostaglandines et d’autres médiateurs inflammatoires favorisée par le manque de sport, l’angoisse des menstruations, les antécédents familiaux et la précocité des premières règles... Les douleurs débutent d’ailleurs en général l’année qui suit les premières règles. Ensuite viennent les causes secondaires avec l’endométriose (une femme sur dix), l’adénomyose et certains fibromes qui débutent le plus souvent à l’âge adulte."


Un sujet qui nécessite un débat
En France plus de 14.5 millions de femmes travaillent, parmi elles plus de la moitié souffrent de dysménorrhées, un tiers déclarent que les douleurs ont un impact négatif sur leur travail et 66% des salariées sont favorables à ce congé. "Ce sujet nécessite un débat." pour le docteur Orlandi qui craint que la généralisation du congé menstruel entraîne plus de discriminations envers les femmes et une perte du secret médical et d’autre part la reconnaissance et la désacralisation de ces pathologies. "À mon sens le terme « congé » devrait être plutôt remplacé par « repos » ce qui améliorerait peut-être l’acception collective et renforcerait son caractère médical. En tout cas de réelles actions au sein des entreprises françaises doivent s’opérer afin d’améliorer le bien-être des femmes : horaires aménagés, temps de repos, télétravail et temps dédié pour une consultation gynécologique."