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Propriano : L’opposition brandit le rapport de la chambre régionale des comptes pour dénoncer la gestion municipale


Nicole Mari le Dimanche 13 Septembre 2015 à 21:41

Le rapport de la Chambre régionale des comptes sur la gestion de la commune de Propriano de 2007 à 2013 a mis le feu aux poudres lors du Conseil municipal du 24 juin dernier. Le groupe d’opposition, qui ne revendique aucune étiquette politique, revient sur ce rapport qui ne fait, estime-t-il, qu’entériner des dysfonctionnements que lui-même dénonce depuis le début de la mandature. Il stigmatise, notamment, des dérives au niveau des charges de personnels, la situation « préoccupante » du port et des « irrégularités » sur la passation de certains marchés publics. Explications communes, pour Corse Net Infos, des trois élus de l’opposition : Charlotte Cesari, Carine Gariod Nicolai et Jean Pierre Morini.



Les membres de l'opposition au Conseil municipal de Propriano : Carine Gariod Nicolai, Charlotte Cesari et Jean Pierre Morini.
Les membres de l'opposition au Conseil municipal de Propriano : Carine Gariod Nicolai, Charlotte Cesari et Jean Pierre Morini.
- Pourquoi, lors du dernier Conseil municipal, avez-vous intitulé le rapport de la CRC : « Bonjour tristesse ! » ?
- La Chambre régionale des comptes a rendu son rapport d’observation définitif de l’examen de la gestion de la commune de Propriano. A la lecture de ce rapport, le constat de la gestion des affaires publiques de Propriano par Paul-Marie Bartoli est affligeant et les perspectives pour l’avenir sont des plus sombres. Voilà pourquoi nous avons dit, lors de la dernière séance du Conseil municipal, que s’il fallait donner un titre à ce rapport nous l’appellerions « Bonjour tristesse ! ». Les exemples ne manquent pas pour illustrer notre propos.
 
- Comme le rappelle le maire, ce rapport concerne la période 2007-2013. La situation a-t-elle évoluée depuis ?
- Paul-Marie Bartoli est maire depuis mars 2001 ! Lorsqu’il rappelle que ce rapport concerne la période de 2007 à 2013, il veut, avant tout, nous faire taire ! Il considère que, comme nous n’étions pas tous élus à cette époque, nous n’avons pas à porter d’appréciation sur ce rapport. Mais, nous étions des citoyens de cette commune ! Une fois de plus, cet argument est fallacieux. D’autant que, si l’on se réfère à notre intervention lors de l’examen du budget primitif 2014, on constate que toutes les remarques, que nous avons faites, sont identiques à celles des juges financiers. Elles sont encore d’actualité.
 
- Qu’aviez-vous dénoncé alors ?
- Nous avions, dès 2014, fermement dénoncé l’importance des dépenses de fonctionnement tant au niveau du personnel qu’au niveau des charges générales. De même, nous avions interpellé Madame Bartoli (qui remplaçait son mari, frappé d’inéligibilité, ndlr) sur la situation particulièrement préoccupante du port de plaisance et sur l’évolution de son déficit structurel. Nous nous étions interrogés sur la gestion des marchés publics au coup par coup et sur la politique systématique des avenants tendant à augmenter considérablement le prix des opérations, en augmentant le manque de transparence. Nous avions, également, dénoncé le versement de subventions irrégulières au profit de l’aérodrome de Tavaria pour combler le déficit récurent de cette infrastructure. Enfin, nous avions critiqué le non-respect du formalisme et du contrôle d’octroi de subventions aux différentes associations.
 
- Quels sont les points les plus inquiétants du rapport de la Cour des comptes ?
- Plus de quarante pages étayent les dysfonctionnements de la commune de Propriano.
L’un des points les plus inquiétants concernent les charges de fonctionnement qui ont augmenté de plus de 100% en 6 ans. La flambée significative et continue de ces charges est à l’origine de l’érosion progressive des marges financières de la commune. En 2012, la CRC faisait état de 108 agents, sans aucun encadrement, dont 78 agents permanents et 30 saisonniers. Si l’on examine de près l’évolution des effectifs, il est aisé d’affirmer que cette situation correspond étrangement aux calendriers électoraux de Paul-Marie Bartoli ! La conséquence est qu’aujourd’hui, la commune de Propriano ne dispose plus de marge de manœuvre permettant de dégager une trésorerie suffisante pour autofinancer ses différents projets.
 
- En quoi la situation du port de plaisance est-elle « particulièrement préoccupante » ?
- Elle l’est au regard des annuités d’emprunts qui atteignaient 800 000 € en 2013 et qui vont bien au delà de nos capacités financières. Selon la CRC, le déficit structurel du port de plaisance pourrait atteindre 2 millions € en 2017.
 
- Quelles sont les principales préconisations de la CRC sur ces trois points ?
- La CRC recommande de contenir l’augmentation des charges de fonctionnement, notamment celle de personnels, pour préserver la capacité d’autofinancement de la commune, d’améliorer la gestion des ressources humaines et de renforcer l’encadrement des agents. Elle conseille, compte tenu du recours massif à l’emprunt, la mise en place urgente de recettes adaptées pour enrayer le déficit du budget annexe du port. Egalement, d’observer un strict respect de la procédure d’octroi des subventions ainsi qu’un suivi plus formalisé des actions conduites par les associations.
 
- Vous dénoncez, comme la CRC, un « manque de transparence dans les procédures de passation des marchés publics ». Pouvez-vous expliciter ?
- Les lacunes en matière de passation de marché public ne manquent pas ! La CRC consacre six pages édifiantes à l’organisation de la commande publique ! Elle critique le manque d’organisation particulière, notamment l’absence d’un service spécifique dédié à cette activité. La réalisation des chantiers n’est pas contrôlée.  Ainsi tous les travaux dont la charge financière est considérable échappent à la surveillance publique ! Les juges financiers dénoncent une zone de risque important et l’illustre par l’exemple de la passation de marchés de travaux pour le port. Le rapport dévoile que la procédure pour les marchés de travaux maritimes du port a été lancée en 1 seul lot, facilitant ainsi la non-transparence. En 2012, le procès-verbal de la commission d’appel d’offre d’attribution de ce marché était un document vierge, ne comportant ni la mention des entreprises candidates, ni celles des entreprises attributaires, ni enfin le montant du marché.
 
- La CRC dénonce-t-elle cette situation ?
- Oui ! A la page 26, le rapport affirme : « Cette procédure d’appel d’offre comporte plusieurs irrégularités qui font naître un doute sérieux sur la légalité du marché, qui d’un montant très élevé 17 millions d’euros, aurait dû être particulièrement encadré ». Concernant les marchés de maîtrise d’œuvre de ces travaux, la CRC écrit, à la page 28, que la commission d’appel d’offre de la commune de Propriano a « irrégulièrement minoré la valeur technique d’une offre (retrait de 1,32 points) faisant perdre ainsi le marché au bureau d’étude dont il s’agit, alors que ce dernier était classé N°1, sur le critère du prix et du délais… L’ensemble de ces éléments conduit à constater le caractère irrégulier de la procédure, le jugement des offres et des critères de la valeur technique ayant pu fausser la concurrence et le choix du titulaire ». Elle conclut à des « doute sérieux sur la légalité de ce montage ».
 
- Que répond le maire ?
- Lors du dernier Conseil municipal, Paul-Marie Bartoli a dit qu’il devait s’employer a faire de « simple raccords ». C’est surréaliste ! Alors que le rapport recommande « la mise en œuvre impérative des obligations de transparence, de traçabilité et d’égalité de traitement dans les procédures de passation des marchés publics » ! Nous lui demandons solennellement de procéder à un véritable aggiornamento de ses méthodes et de son comportement.
 
- En parallèle, vous avez déposé un recours devant le tribunal administratif contre le budget primitif 2015. Est-ce lié ?
- Oui ! Notre recours est tout à fait lié aux pratiques de Paul-Marie Bartoli dans la gestion des affaires publiques. Nous devions nous prononcer sur l’acte fondateur de l’exercice 2015 sans avoir eu, au préalable, communication des documents indispensables à l’examen du budget. Compte tenu de l’esprit constructif qui est le nôtre, nous avons demandé à Paul-Marie Bartoli de nous les communiquer. Il a refusé en disant que les documents étaient trop volumineux. Nous lui avons, alors, demandé le report du vote du budget. Devant sa fin de non-recevoir, nous avons quitté la séance du Conseil municipal et porté cette affaire devant le Tribunal administratif afin que les droits de la bonne information de chaque conseiller municipal soient respectés. Nous attendons sereinement la décision du Tribunal Administratif.
 
- Des changements interviennent au sein de votre groupe avec notamment la démission de Victor Paolantonacci. Qui va lui succéder ?
- Victor Paolantonacci a démissionné de ses sièges de conseiller municipal et communautaire parce qu’il a eu une opportunité professionnelle à l’étranger. Il ne pouvait donc plus assurer ses fonctions d’élu. Cependant, il reste engagé et soutient toujours notre démarche. Il est remplacé par Carine Gariod Nicolai au Conseil municipal et par Jean-Pierre Morini au Conseil communautaire. Nous profitons de l’occasion pour souligner l’engagement de Victor Paolantonacci et rappeler que son analyse sur le taux préoccupant d’endettement de la Communauté de communes du Sartenais-Valinco (CCSV) a été confirmée par José-Pierre Mozziconacci.
 
- C’est-à-dire ?
- José-Pierre Mozziconacci a, récemment, déclaré  que « le taux d’endettement de la CCSV est de 799 € par habitant » et qu’il était « urgent d’obtenir du Conseil départemental 3 millions € d’allègement d’emprunt ». Nous regrettons que Mr Mozziconacci ait omis de préciser que cette situation désastreuse est à l’actif du premier Président de la CCSV, à savoir Paul-Marie Bartoli. D’autant qu’à ce triste constat, il est opportun de rappeler que chaque habitant de la communauté proprianaise est, donc, endetté à hauteur de 799 € au titre de la CCSV et de 4285 € au titre du port de plaisance du Propriano.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.
 

Victor Paolantonacci et Carine Gariod Nicolai.
Victor Paolantonacci et Carine Gariod Nicolai.
Déclarations de Victor Paolantonacci, démissionnaire et de Carine Gariod Nicolai, sa remplaçante :
Victor Paolantonacci : « Cela me désole ne plus être conseiller, mais je sais que le groupe continuera dans la démarche initiée par Jacques Luciani lors des municipales de 2014 et c'est ce qui compte le plus. Cependant, je reste engagé dans l'action de notre groupe et je continue à soutenir mes colistiers tant au Conseil municipal qu'à la Communauté des communes du Sartenais Valinco ».
 
Carine Gariod Nicolai : « Je mesure l’ampleur de la tâche que l’on me confie aujourd’hui, et je compte m’y atteler dans la lignée du travail de Victor Paolantonacci. Issue de la même génération, nous étions animés par la même volonté d’intégrer le groupe dans l’espoir d’un renouveau pour la commune de Propriano. Je remplace donc mon colistier avec les mêmes objectifs que ceux annoncés durant notre campagne ».