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Le département de Haute-Corse prend en charge les frais d’avocat de Paul Giacobbi dans l’affaire des gites ruraux


Nicole Mari le Mardi 29 Septembre 2015 à 19:57

Deux points forts lors de la séance du Conseil départemental de Haute-Corse, mardi matin : un audit de la situation financière de la collectivité et ses mornes perspectives et la présentation d’un projet d’administration du département 2015-2021. Mais peu de commentaires des élus tant de la majorité que de l’opposition. Seul un vote, celui de la prise en charge des frais d’avocat de Paul Giacobbi dans l’affaire dite des gites ruraux, a provoqué une protestation et une non-participation du groupe nationaliste Inseme per Bastia. En vidéo, François Orlandi, président du Conseil départemental de Haute-Corse, revient, pour Corse Net Infos, sur l’état des finances du département.



Le département de Haute-Corse prend en charge les frais d’avocat de Paul Giacobbi dans l’affaire des gites ruraux
Si une campagne électorale rend, d’ordinaire, fiévreuses ou chaotiques certaines séances de conseil municipal ou départemental, ce ne fut pas le cas de la dernière réunion du Conseil départemental de Haute-Corse, mardi matin. Aucun des dossiers importants examinés, que ce soit l'audit financier, réalisé par un cabinet indépendant à partir des comptes administratifs, ou le projet d’administration de la collectivité à l’horizon 2021, n’a sorti les élus de leur torpeur. Et pourtant, entre la baisse des dotations budgétaires, le niveau d’endettement à 125 millions €, la hausse de la précarité entrainant celle des dépenses de RSA (Revenu de solidarité active) qui atteint 9,41% depuis le début de l’année, la baisse de l’épargne brute, la restriction consécutive des investissements, la lourde facture des intempéries à solder avec 10 millions de travaux routiers…, les perspectives sont peu réjouissantes. « Nous nous sommes engagés sur la nécessaire voie de la rigueur en définissant des objectifs, en hiérarchisant les projets et en les réajustant aux réalités du quotidien. Les impératifs d’eau et d’assainissement doivent être prioritaires, comme la construction des écoles engagée dans certaines communes », a prévenu François Orlandi, président du Conseil départemental de Haute-Corse. Cette sévère cure d’amaigrissement suscite peu de commentaires et aucune vague. La présentation, même pas esquissée, du projet d’administration de la collectivité pour la période 2015-2021 encore moins ! Son adoption s’effectue rapidement, dans une quasi-indifférence. Comme celle de la plupart des rapports à l’ordre du jour.
 
Un droit légal
Ce n’est qu’avec le vote d’une protection fonctionnelle accordée à Paul Giacobbi que la salle des délibérations se ranime, un court instant. Le président de l’Exécutif de Corse et député de la 2ème circonscription nordiste a été mis en examen pour « détournements de fonds publics », dans le cadre de l’affaire dite « des gites ruraux », au détriment du Conseil général qu’il présidait entre 2008 et 2010. Le 24 juillet dernier, il a adressé, au département, une demande de protection fonctionnelle afin de couvrir les frais d’avocat et, éventuellement de justice, qui pourraient intervenir. Le rapport précise que, selon l’article L.3123-28 du Code général des collectivités territoriales, « le département est tenu d’accorder sa protection au président du Conseil départemental ou… à l’un des de ces élus ayant cessé ses fonctions lorsque celui-ci fait l’objet de poursuites pénales à l’occasion de faits qui n’ont pas le caractère de faute détachable de l’exercice de ses fonctions ». Estimant que c’est le cas pour Paul Giacobbi, il conclut : « Dans ces circonstances, le bénéfice de la protection fonctionnelle est de droit ». Il refuse, par contre, ce bénéfice à Paul Peraldi, l’ex-conseiller général de Vezzani et maire de Rospigliani, arguant que son statut de témoin assisté dans cette affaire ne l’autorise pas. Ce dernier a saisi le tribunal administratif.
 
Une situation ubuesque
Comme en juillet, pour le vote de la motion de soutien à Paul Giacobbi, seuls les trois élus nationalistes du groupe Inseme per Bastia, réagissent. « A l'heure où la Corse s'enfonce inexorablement vers plus de précarité, où les inégalités se creusent, où l'argent public ne peut plus être la manne à laquelle beaucoup s'étaient habitués, où l'on discute pour savoir si l'on doit effacer les dettes de quelques milliers d'euros de personnes touchant le RSA comme dans le rapport 303 que nous allons examiner, il nous est demandé d’utiliser cet argent public pour prendre en charge les frais d'avocat de l’actuel Président de la CTC, mis en examen dans l’affaire dite des gîtes ruraux. Pour rappel, la totalité des sommes détournées serait d'environ 400 000 € », débute, sèchement, Vanina Le Bomin. Si elle ne remet pas en cause la légalité de ce droit, elle s’indigne : « S'il nous semble indispensable d’accorder cette protection fonctionnelle aux agents qui ne sont coupables que d'avoir fait leur travail et exécuter des tâches qu’on leur a données à faire, il n'en va pas de même pour le Président de l'époque. Même s’il est toujours présumé innocent tant que la justice n'a pas tranché, il était le plus haut responsable de cette assemblée et en tant que tel, il était de son devoir de contrôler l'utilisation de l'argent public et le fonctionnement de sa collectivité. Son ignorance des faits nous laisse pantois, et même nous inquiète beaucoup sur la gestion de la Collectivité territoriale dont il est à présent le plus haut responsable... De plus il nous paraît contradictoire, voire ubuesque, même si cela est possible en droit, d'être partie civile et de prendre en charge les frais d'avocat de la partie adverse ! ».
 
Une demande de transparence
Inseme annonce qu’il ne participera pas au vote et demande, au président du département, la transparence sur cette affaire des gites ruraux et, « comme la loi le permet, la communication de tous les éléments en votre possession concernant cette affaire qui fait l'objet d'une délibération, y compris les correspondances échangées entre l'avocat du Conseil Départemental et l'exécutif ». François Orlandi agrée la demande et se défend en se référant à la stricte application de la loi : « Nous répondons à ce qui est écrit dans le code des collectivités sans l’interpréter d’aucune manière, ni restrictive, ni extensive. Tous les personnels du département, qui sont mis en examen, bénéficient du soutien juridique et moral de la collectivité. J’applique la loi. J’aurais pu ne pas l’appliquer et le département aurait eu à supporter un recours qui nous aurait certainement amener vers une condamnation. Du moment que la loi a été votée, elle s’impose à tous, y compris au président du Conseil départemental ». La délibération a été votée sans la participation d’Inseme et avec l’absention d’un élu du groupe de droite.
 
N.M.
 

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