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Jean Biancucci : « La notion de peuple corse est la clé de voute de l’évolution »


Nicole Mari le Jeudi 8 Août 2013 à 00:34

Conseiller territorial du groupe Femu a Corsica, maire de Cuttoli-Corticchiato, Jean Biancucci a été mandaté par les Nationalistes modérés pour les représenter au second débat des Ghjurnate di Corti sur l’évolution institutionnelle. Ce vieux routier du nationalisme revient, pour Corse Net Infos, sur la nécessité de trouver des compromis, sans abandonner la lutte. Pour faire avancer les dossiers, il prône une union élargie, qui dépasse la simple alliance des forces nationalistes.



Jean Biancucci, conseiller territorial du groupe Femu a Corsica, maire de Cuttoli-Corticchiato.
Jean Biancucci, conseiller territorial du groupe Femu a Corsica, maire de Cuttoli-Corticchiato.
- Pourquoi avez-vous participé à ce débat ?
- Notre position est simple et claire. Depuis 2010, et même avant dans la précédente mandature, nous essayons de faire partager nos points de vue en matière fiscale par rapport aux Arrêtés Miot, en matière de bilinguisme avec la coofficialité, en matière d’évolution institutionnelle… A tous les niveaux, à travers des questions orales et des motions, nous tentons de diffuser nos idées auprès des autres conseillers et des autres sensibilités présentes à l’Assemblée de Corse (CTC). Aujourd’hui, on arrive à un compromis. Les Ghjurnate sont le lieu judicieux choisi par Corsica Libera et aussi par les représentants de la majorité territoriale pour venir débattre de ce compromis.
 
- Comment jugez-vous ce débat ?
- Très intéressant car il pourrait préfigurer un débat avec la population toute entière. Avec un bémol : les travaux de Commission achoppent, généralement, sur des blocages de type technique ou juridique. Nous, qui sommes dans un combat politique vieux de 40 ans, nous connaissons les obstacles, nous les avons identifiés. L’important est d’essayer de créer, au sein de la société corse, un rapport de forces suffisant pour que ces blocages et ces verrouillages sautent. Je crois que nous commençons à y arriver. C’est tout l’intérêt de cette démarche.
 
- Cette démarche n’est-elle pas surtout basée sur une succession de compromis ?
- Un compromis en annonce un autre. Le compromis, qui est fait aujourd’hui sur les 4 points évoqués par la Commission Chaubon, nous donne un avant-goût de ce que nous pouvons faire, ensemble, ensuite. Il est bien entendu, aussi, que les évolutions institutionnelles, de quelque niveau qu’elles soient, ne peuvent être validées que si elles sont accompagnées de réformes économiques et sociales. Aujourd’hui, il y a, en Corse, un problème économique et social tellement évident qu’il faudra des mesures de fond pour essayer d’inverser les tendances.
 
- En même temps, malgré les compromis, rien n’est fait. Et, vous prévenez que vous ne lâcherez rien. Qu’est-ce que cela signifie ?
- Tout simplement, pour nous, le combat continue. Nous nous situons, nous ne l’avons jamais caché, dans une perspective historique qui mènera, un jour ou l’autre, le peuple corse à maîtriser sa destinée. Cette évolution peut, effectivement, prendre du temps. Aujourd’hui, nous avons trouvé les voies et moyens de créer un compromis avec d’autres. Mais il ne faudrait pas non plus considérer ce compromis comme une fin. La route est encore longue. Il faudra franchir d’autres obstacles. Pour nous, la notion de peuple corse est la clé de voute de tout le système d’évolution en Corse.
 
- Corsica Libera a, une nouvelle fois, lancé un appel à l’union du mouvement national en disant que vos discours sont superposables. Que lui répondez-vous ?
- Effectivement, beaucoup de choses sont superposables dans les discours. Néanmoins, même si nous nous rejoignons sur le fond, les moyens, eux, peuvent différer. Intervient, ensuite, la notion de durée. La volonté, qui est mise aujourd’hui par toutes les sensibilités nationalistes d’essayer de convaincre les autres sensibilités de ce besoin fort d’évolution, prouve qu’au delà des Nationalistes, existe un front commun. C’est ce qu’il faut retenir. Prenons un point important : la notion du peuple corse, telle qu’elle a été validée en 1988 par la CTC. Elle est devenue, aujourd’hui, une notion basique, un fondement. Mais, elle n’a pas été votée que par les seuls élus nationalistes. Ensuite, dans le préambule du PADDUC, Femu a Corsica a demandé que soit introduit cette notion de reconnaissance politique du peuple corse. C’était une des conditions pour que le travail effectué, dans la perspective ébauchée par Maria Guidicelli, soit valable. L’évolution est indéniable.
 
- L’alliance des forces nationalistes pour faire passer les différentes réformes n’est, donc, pas d’actualité ?
- A chaque jour suffit sa peine ! Nous avons des discussions les uns avec les autres à travers les différentes sensibilités que représentent Femu a Corsica et avec Corsica Libera de manière permanente. On ne vient pas uniquement à une tribune pour dire que l’on va discuter ! Ce n’est pas une nouveauté de savoir que A Chjamà discute avec Corsica Libera, que le PNC discute avec Corsica Libera… Nous aurons, peut-être, dans les mois qui viennent, des discussions un peu plus précises et plus cadrées sur des sujets définis. Il ne s’agit pas de discuter pour discuter. Il faudra définir la méthode et les moyens. Nous n’avons aucun à-priori. Nous verrons bien, ensuite, comment se feront les choses.
 
- Ces discussions vont-elles s’inscrire aussi dans une perspective électorale ?
- Il ne s’agit absolument pas de ça pour nous ! Au contraire ! Je dirais même qu’il faudra, sans doute, que nous discutions pour faire avancer certains dossiers. Et, nous ne pourrons les faire avancer que si, non seulement les Nationalistes sont tous unis, mais aussi que d’autres forces, au sein de la société, sont unies aux Nationalistes.
Propos recueillis par Nicole MARI.

Jean Biancucci, lors du débat sur l'évolution institutionnelle, aux Ghjurnate di Corti.
Jean Biancucci, lors du débat sur l'évolution institutionnelle, aux Ghjurnate di Corti.