Le président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse, Gilles Simeoni, en train de regarder le débat de Cuzzà à la télévision dans son bureau à Aiacciu.
- Comment réagissez-vous aux propos d’Emmanuel Macron concernant le devoir de repentance des Nationalistes dans l’assassinat du Préfet Erignac ?
- J’ai été surpris par cette déclaration du président de la République. Une déclaration profondément injuste, inexacte et inquiétante pour la suite si elle reflète vraiment son état d’esprit ! De façon générale, nous avons toujours ressenti que l’affaire de l’assassinat du préfet Erignac planait en arrière plan dans les discussions avec l’Etat et ses représentants, mais elle restait implicite, dans le domaine de l’informulé. Aujourd’hui, pour la première fois, par la voix du chef de l’Etat, il est signifié clairement que cette affaire et ses suites interdisent d’engager un véritable dialogue politique de fond avec la Corse et notamment avec la majorité désignée par les urnes. Le président Macron le dit clairement en réponse à deux élus qui appartiennent à sa majorité, Jean-Baptiste Luccioni et Jean-Charles Orsucci, et à des élus de droite. Alors même qu’ils se montrent critiques vis-à-vis des Nationalistes, notamment de moi, ces propres soutiens lui demandent de rechercher l’enracinement définitif de la paix en Corse et, pour cela, d’ouvrir un véritable dialogue avec la Corse et les Nationalistes. Le président répond pour écarter cette perspective.
- Il vous renvoie la balle d’étrange façon sur la Nouvelle Calédonie ?
- Il répond que cette perspective ne peut pas être ouverte parce qu’il n’y a pas eu suffisamment de regrets exprimés et un chemin de réconciliation proposé par les Corses à la différence de ce qu’il s’est passé en Nouvelle Calédonie. Il oublie qu’au lendemain de l’assassinat du Préfet Erignac, 40 000 Corses descendent dans la rue pour le dénoncer. Les gens, qui ont participé à cet acte, ont été arrêtés, jugés, très sévèrement condamnés et pour certains sont en prison depuis près de 20 ans. Ils ont exprimé publiquement des regrets pour avoir commis ces actes. Des actes qu’aucune structure politique nationaliste n’a jamais cautionnés, ni cherché à justifier. Bien plus, pour démontrer notre volonté collective d’ouvrir un chemin de réconciliation, j’ai participé à la commémoration de l’assassinat du préfet Erignac. C’était même la première manifestation forte - hors collectivité - à laquelle j’ai assisté après mon élection.
- L’avez-vous voulu comme un geste fort ?
- Oui ! Je l’ai fait en ma qualité de président du Conseil exécutif, plus haute autorité politique de l’île, et au nom de la majorité territoriale toute entière. Je l’ai refait chaque année de mon mandat en disant publiquement ma compassion pour la famille et le caractère inacceptable de tout acte pouvant enlever la vie à un être humain. En rappelant aussi que ce drame s’inscrit dans une histoire douloureuse qui a fait malheureusement des dizaines de morts de part et d’autre, généré des milliers d’attentats, et mis des centaines de femmes et d’hommes en prison. Je ne vois pas comment on peut être plus clair ! Donc, les mots du président de la République, s’ils devaient être confirmés, ce que je n’espère pas, signifieraient qu’il y a une sorte de responsabilité collective, non seulement des Nationalistes, mais même des Corses dans leur ensemble, qui se transmettrait de décennie en décennie, de génération en génération jusqu’à devenir en quelque sorte imprescriptible ! C’est impensable, juridiquement et politiquement !
- Que faut-il faire selon vous ?
- Notre responsabilité politique, en Corse comme à Paris, est de ne rien oublier de ce drame, de ne rien oublier de tous les autres drames, et d’être capables de les intégrer dans un processus de réconciliation. Nous devons tourner la page de la logique de conflit et nous inscrire résolument dans une logique commune de pardon et de reconstruction, comme cela s’est fait partout dans le monde chaque fois qu’il y a eu des drames, y compris des drames ressentis comme indépassables. C’est un devoir politique de le faire, y compris pour les générations actuelles et futures qui n’ont pas vécu ce moment historique et qui ne peuvent pas en être les victimes collatérales.
- Autre déclaration de Cuzzà. Des élus d’opposition ont publiquement accusé les Nationalistes d’avoir fait pression pour qu’ils boycottent le débat. Que répondez-vous ?
- Je ne comprends pas. Avant la venue du président Macron, j’ai publié un communiqué où j’ai appelé à l’ouverture d’un véritable dialogue politique avec le président de la République. Le lundi 1er avril, j’en ai envoyé une copie à tous les maires et présidents d’intercommunalités de Corse avec un mail d’accompagnement – que je tiens à disposition – dans lequel j’explique les raisons de ce positionnement politique et où je réaffirme ma volonté d’ouvrir ce dialogue. Dans ce mail, je propose aux maires et présidents d’intercommunalités d’échanger sur les solutions de fond à mettre en œuvre au service de la Corse. A aucun moment, ni explicitement, ni implicitement, je ne fais référence à un quelconque boycott de la réunion prévue le 4 avril. A aucun moment, ni explicitement, ni implicitement, je ne demande aux maires et présidents d’intercommunalités de boycotter cette réunion. Si ce mail a été interprété différemment par quelques uns, je le regrette profondément, mais je ne vois pas en quoi il est susceptible d’ambiguïté. Il me semble très clair !
- Comment expliquez-vous ces accusations ?
- Je vous le dis, je ne comprends pas. J’ai été extrêmement surpris d’entendre Antoine Giorgi et Jean-Baptiste Luccioni faire cette référence et interpréter ce mail de cette façon-là. D’autant plus qu’ils sont, par ailleurs, des maires avec lesquels j’entretiens des relations amicales à titre personnel. Et d’autant plus que jamais je me serais permis de demander à un maire ou à quiconque d’ailleurs, de faire ou de ne pas faire quelque chose, notamment de participer ou pas à un débat. Qui plus est par lettre ! C’est aux antipodes de ma conception des rapports humains ou politiques. Dans la Corse d’aujourd’hui que j’essaye de contribuer à construire de toutes mes forces, les femmes et les hommes, qu’ils soient élus ou simples citoyens, doivent penser et décider avec leur tête et leur conscience, et pas sur injonction ou instruction de qui que ce soit ! Cela a toujours été mon combat et ma conviction.
Propos recueillis par Nicole MARI.
- J’ai été surpris par cette déclaration du président de la République. Une déclaration profondément injuste, inexacte et inquiétante pour la suite si elle reflète vraiment son état d’esprit ! De façon générale, nous avons toujours ressenti que l’affaire de l’assassinat du préfet Erignac planait en arrière plan dans les discussions avec l’Etat et ses représentants, mais elle restait implicite, dans le domaine de l’informulé. Aujourd’hui, pour la première fois, par la voix du chef de l’Etat, il est signifié clairement que cette affaire et ses suites interdisent d’engager un véritable dialogue politique de fond avec la Corse et notamment avec la majorité désignée par les urnes. Le président Macron le dit clairement en réponse à deux élus qui appartiennent à sa majorité, Jean-Baptiste Luccioni et Jean-Charles Orsucci, et à des élus de droite. Alors même qu’ils se montrent critiques vis-à-vis des Nationalistes, notamment de moi, ces propres soutiens lui demandent de rechercher l’enracinement définitif de la paix en Corse et, pour cela, d’ouvrir un véritable dialogue avec la Corse et les Nationalistes. Le président répond pour écarter cette perspective.
- Il vous renvoie la balle d’étrange façon sur la Nouvelle Calédonie ?
- Il répond que cette perspective ne peut pas être ouverte parce qu’il n’y a pas eu suffisamment de regrets exprimés et un chemin de réconciliation proposé par les Corses à la différence de ce qu’il s’est passé en Nouvelle Calédonie. Il oublie qu’au lendemain de l’assassinat du Préfet Erignac, 40 000 Corses descendent dans la rue pour le dénoncer. Les gens, qui ont participé à cet acte, ont été arrêtés, jugés, très sévèrement condamnés et pour certains sont en prison depuis près de 20 ans. Ils ont exprimé publiquement des regrets pour avoir commis ces actes. Des actes qu’aucune structure politique nationaliste n’a jamais cautionnés, ni cherché à justifier. Bien plus, pour démontrer notre volonté collective d’ouvrir un chemin de réconciliation, j’ai participé à la commémoration de l’assassinat du préfet Erignac. C’était même la première manifestation forte - hors collectivité - à laquelle j’ai assisté après mon élection.
- L’avez-vous voulu comme un geste fort ?
- Oui ! Je l’ai fait en ma qualité de président du Conseil exécutif, plus haute autorité politique de l’île, et au nom de la majorité territoriale toute entière. Je l’ai refait chaque année de mon mandat en disant publiquement ma compassion pour la famille et le caractère inacceptable de tout acte pouvant enlever la vie à un être humain. En rappelant aussi que ce drame s’inscrit dans une histoire douloureuse qui a fait malheureusement des dizaines de morts de part et d’autre, généré des milliers d’attentats, et mis des centaines de femmes et d’hommes en prison. Je ne vois pas comment on peut être plus clair ! Donc, les mots du président de la République, s’ils devaient être confirmés, ce que je n’espère pas, signifieraient qu’il y a une sorte de responsabilité collective, non seulement des Nationalistes, mais même des Corses dans leur ensemble, qui se transmettrait de décennie en décennie, de génération en génération jusqu’à devenir en quelque sorte imprescriptible ! C’est impensable, juridiquement et politiquement !
- Que faut-il faire selon vous ?
- Notre responsabilité politique, en Corse comme à Paris, est de ne rien oublier de ce drame, de ne rien oublier de tous les autres drames, et d’être capables de les intégrer dans un processus de réconciliation. Nous devons tourner la page de la logique de conflit et nous inscrire résolument dans une logique commune de pardon et de reconstruction, comme cela s’est fait partout dans le monde chaque fois qu’il y a eu des drames, y compris des drames ressentis comme indépassables. C’est un devoir politique de le faire, y compris pour les générations actuelles et futures qui n’ont pas vécu ce moment historique et qui ne peuvent pas en être les victimes collatérales.
- Autre déclaration de Cuzzà. Des élus d’opposition ont publiquement accusé les Nationalistes d’avoir fait pression pour qu’ils boycottent le débat. Que répondez-vous ?
- Je ne comprends pas. Avant la venue du président Macron, j’ai publié un communiqué où j’ai appelé à l’ouverture d’un véritable dialogue politique avec le président de la République. Le lundi 1er avril, j’en ai envoyé une copie à tous les maires et présidents d’intercommunalités de Corse avec un mail d’accompagnement – que je tiens à disposition – dans lequel j’explique les raisons de ce positionnement politique et où je réaffirme ma volonté d’ouvrir ce dialogue. Dans ce mail, je propose aux maires et présidents d’intercommunalités d’échanger sur les solutions de fond à mettre en œuvre au service de la Corse. A aucun moment, ni explicitement, ni implicitement, je ne fais référence à un quelconque boycott de la réunion prévue le 4 avril. A aucun moment, ni explicitement, ni implicitement, je ne demande aux maires et présidents d’intercommunalités de boycotter cette réunion. Si ce mail a été interprété différemment par quelques uns, je le regrette profondément, mais je ne vois pas en quoi il est susceptible d’ambiguïté. Il me semble très clair !
- Comment expliquez-vous ces accusations ?
- Je vous le dis, je ne comprends pas. J’ai été extrêmement surpris d’entendre Antoine Giorgi et Jean-Baptiste Luccioni faire cette référence et interpréter ce mail de cette façon-là. D’autant plus qu’ils sont, par ailleurs, des maires avec lesquels j’entretiens des relations amicales à titre personnel. Et d’autant plus que jamais je me serais permis de demander à un maire ou à quiconque d’ailleurs, de faire ou de ne pas faire quelque chose, notamment de participer ou pas à un débat. Qui plus est par lettre ! C’est aux antipodes de ma conception des rapports humains ou politiques. Dans la Corse d’aujourd’hui que j’essaye de contribuer à construire de toutes mes forces, les femmes et les hommes, qu’ils soient élus ou simples citoyens, doivent penser et décider avec leur tête et leur conscience, et pas sur injonction ou instruction de qui que ce soit ! Cela a toujours été mon combat et ma conviction.
Propos recueillis par Nicole MARI.