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CTC : Une motion demandant un référendum sur la collectivité unique, adoptée par inadvertance !


Nicole Mari le Vendredi 30 Octobre 2015 à 16:28

Une motion, présentée par Michel Stefani, au nom du Front de Gauche, et demandant la tenue d'un référendum populaire sur la collectivité unique, la fusion des départements et des intercommunalités, a été votée, vendredi en fin de matinée et de session, à l'Assemblée de Corse. Une demande rejetée par le gouvernement au motif que la collectivité unique est créée par la loi NOTRe et qu'une loi ne peut être soumise à un référendum. Le Front de Gauche, opposé à la loi, a fait du référendum son cheval de bataille électorale. Cette adoption, inattendue, a pris tout le monde de court, y compris ses promoteurs. Réaction, en vidéo, pour Corse Net Infos, de Michel Stefani, conseiller territorial du Front de Gauche.



Michel Stefani, conseiller territorial du groupe Front de Gauche.
Michel Stefani, conseiller territorial du groupe Front de Gauche.
 
Si le référendum d’initiative populaire sur la collectivité unique est le cheval de bataille du Front de Gauche, résolument hostile à la loi Nôtre, à la réforme territoriale nationale et à son appendice local de fusion des deux départements, c’est un vrai casse-tête pour tous les autres groupes politiques de l’Assemblée de Corse (CTC). Aux prémices des discussions sur la réforme institutionnelle insulaire et même lors de son vote en décembre 2014, le principe semblait acquis et intangible, tant il faisait l’unanimité sur tous les bancs de l’hémicycle. Puis, le raccrochement en dernière minute du wagon réformiste insulaire à la loi Nôtre, par un amendement controversé, remet en cause une unanimité de façade et déblaye un chemin qui s’avère épineux.
 
Le Niet gouvernemental
La ministre de la fonction publique, Marylise Lebranchu, tranche sans appel, en expliquant que le référendum, posant un problème juridique, est impossible à réaliser. La loi ne permet pas qu’une telle consultation soit organisée par une région sur un projet déjà adopté. Elle ne peut, légalement, l’être que sur un projet de délibération. Or, la loi Nôtre est votée et le projet de collectivité unique corse, également. Ce qui est certain, c’est que le gouvernement socialiste, qui a de la mémoire, ne veut pas entendre parler d’une consultation populaire pour entériner une réforme locale qui n’est que le ballon d’essai d’un projet national.
 
Un cheval de bataille
La question semble, donc, définitivement écartée, mais c’est compter sans l’obstination du Front de Gauche et d’une partie de la droite qui refusent, tout net, la disparition des Conseils départementaux. Le premier ne cesse de batailler contre. Il fait, du référendum, son cheval de bataille lors de la campagne électorale pour les Cantonales en mars dernier et le remet en selle, aujourd’hui, pour les Territoriales. La seconde espère qu’un possible retour au pouvoir de Nicolas Sarkozy en 2017 enterrera la réforme ou la renverra aux oubliettes. Rien n’est moins sûr ! Droit dans ses bottes, le Front de Gauche, par la voix de Michel Stefani, profite de la dernière session de la mandature, pour revenir à la charge et proposer une motion demandant l’organisation du référendum.
 
Un projet contesté
Cette motion s’appuie sur le fait que les ordonnances concernant la réforme institutionnelle de la collectivité unique ne seront connues qu’en 2016 après les élections territoriales. Elle considère que « ces ordonnances porteront sur le cadre budgétaire, la fiscalité, les transferts de personnel, l’exercice des compétences en précisant leur périmètre » et que la définition des intercommunalités, étroitement liée à ce projet, « est d’ores et déjà contestée par de nombreuses municipalités ». Partant de là, elle juge « inconcevable de laisser supposer que le scrutin des territoriales des 6 et 13 décembre peut avoir valeur de consultation du peuple alors que le contenu de la réforme est indéterminé ». Elle rappelle qu’en 2003, « sur un projet de collectivité identique, un référendum avait été organisé avec un texte de loi spécifique porté à la connaissance de tous et que le résultat de ce référendum avait conclu au rejet du projet ». Et, revient sur le vote de l’Assemblée de Corse qui « s’est prononcée pour l’organisation d’un référendum sur l’actuel projet inscrit article 43 de la loi NOTRe ».
 
Un principe de réalité
La motion de Michel Stefani ennuie tout le monde, à commencer par son propre camp. L’exigence unitaire du référendum de décembre dernier s’est délitée, au fil des mois, sur un principe de réalité. Il paraît évident à beaucoup que l’urgence et la complexité de mise en œuvre de la réforme institutionnelle excluent un processus référendaire qui ne saurait que l’alourdir et l’entraver. D’autant que la défense des deux collectivités appelées à disparaître ne passionne guère les foules. Les affaires tant politiques que judiciaires, qui minent les deux Conseils départementaux, ne cessent de mettre en lumière la perversité d’un système à bout de souffle, inutile et coûteux, où le prétexte de proximité fait le lit du pouvoir, du clientélisme et de la corruption.
 
Un vote pour rien
Dans un premier temps, l’Exécutif tente de rejeter la motion en commission et de la retirer du vote. Elle est finalement présentée, sur la protestation du Front de Gauche, dans l’indifférence générale, mais nul ne croit en son adoption. Seulement voilà, c’est la fin de la session et de la mandature. Les élus sont fatigués et déconcentrés. Il en manque 13, sur les bancs de la majorité et de l’opposition libérale. Nul n’intervient. Mais, le vote réveille tout le monde. Le Front de Gauche, qui vote pour, comme un seul homme, bénéficie du soutien inattendu des élus de droite présents et de la non-participation des Nationalistes dubitatifs. Seuls les cinq élus Giaccobistes, encore dans l’hémicycle, votent contre. Au final, la motion est adoptée par défaut avec seulement 15 voix pour, 5 contre, 7 abstentions et 11 non-participation ! L’hémicycle, stupéfait, est, comme l’Exécutif, pris de court. Il hésite entre l’incrédulité et l’amusement. Tous savent que la motion ne sert à rien. Mais, c’est sur ce pied de nez ironique que se clôt la mandature !
 
N.M.
 

Réaction de Michel Stefani, conseiller territorial Front de Gauche et défenseur de la motion.