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Bastia : le très intéressant projet « Custodii di u Creatu »


Philippe Jammes le Mardi 14 Mai 2019 à 17:19

Dans le cadre de « A festa di a lingua corsa » initiée par la mairie de Bastia, le projet « Custodii di u Creatu », dédié aux semences paysannes , a été présenté mardi matin au Lycée Giocante de Casabianca à Bastia, avec les élèves de 1ère et seconde et leurs enseignants, Jean-Charles Adami (corse), Hubert Lenziani, Sonia Prubot et Jean-Marc Pellegri (histoire/géo).



Une partie des élèves du projet « Custodii di u Creatu » et leurs professeurs
Une partie des élèves du projet « Custodii di u Creatu » et leurs professeurs

« Il s’agit de retrouver traces des semences que le grand botaniste russe Nikolaï Ivanovitch Vavilov avait collecté sur notre île, probablement vers 1926 » explique Jean-Charles Adami, professeur de corse à Giocante.
« Nos élèves partent à la recherche de ces agriculteurs qui ont pratiqué et qui pratiquent toujours ces semences ancestrales et établissent des fiches. Notre grand projet est de pouvoir établir la date exacte de la venue de Vavilov en Corse et nous travaillons en partenariat avec le CRBA, Centre de Ressources de Botanique Appliquée,  de Lyon ».


Le projet date de 3 ans et a vu le jour dans le cadre de recherches sur le patrimoine par les élèves en langue corse.
« Aujourd’hui nous rencontrons régulièrement des agriculteurs détenteurs de ces semences ancestrales comme le tabac ou le blé historique et dialoguons avec eux » souligne Camille, élève de seconde.
« De fil en aiguille, avec des professeurs d’histoire et de géographie on a travaillé sur une thématique liée à ces semences : la venue de Vavilov en Corse » précise Jean-Charles Adami. « Ce grand botaniste russe avait collecté 6811 espèces en Corse et qui sont toujours maintenues en vie à l’Institut pansoviétique de culture des plantes, institut Vavilov à Saint Pétersbourg »


Aujourd’hui le projet avance bien et à terme il est de créer sur notre île, en partenariat avec le CRBA de Lyon, un jardin « Vavilov » où pourront être travaillées des semences des années 26  stockées en Russie. « Dans ce projet il y a une transversalité puisque nous travaillons aussi bien avec des professeurs de corse, d’histoire/géo, des chercheurs, des anthropologues » explique encore Jean-Charles Adami.

«Nikolaï Ivanovitch Vavilov, né le 13 novembre 1887 à Moscou et mort le 26 janvier 1943 à Saratov, est un éminent botaniste et généticien russe et soviétique, fondateur et directeur de l'Institut pansoviétique de culture des plantes qui porte désormais son nom » précise de son coté Hubert Lenziani, professeur d’histoire/géo à Giocante. « L’Institut Vavilov de Saint-Pétersbourg est la plus ancienne banque de semences au monde. Il abrite aujourd’hui les graines et semences d’environ 366 000 variétés végétales. Vavilov, véritable visionnaire, a conduit 115 expéditions de collecte de végétaux dans 64 pays avec une seule obsession: permettre à la Russie de subvenir à ses besoins alimentaires et permettre d’une façon générale à  l’humanité de vaincre la faim. A l’occasion d’une de ses expéditions en Méditerranée, il s’est arrêté en Corse, probablement au printemps 1926 ».


Pour Hubert Lenziani, cela nous renvoie à l’histoire de Gènes dont on sait qu’elle est très liée à la Corse. « Les génois à l’époque avaient des comptoirs en Mer noire et une partie des semences auraient été rapatriées en Corse, d’où la motivation de Vavilov d’y entreprendre une expédition. Nous nous efforçons aujourd’hui à travers la presse de l’époque, notamment des articles du petit bastiais de retrouver trace de cette venue de Vavilov ».
 
Le projet suscite un bel engouement au lycée puisqu’une trentaine d’élève y participe.
« C’est un projet très excitant » déclare Alla Dea, élève de Giocante qui prend part au projet. « C’est une opération d’envergure  qu’on poursuit aujourd’hui au lycée mais qui est aussi une  perspective d’avenir dans nos études ».
Le projet va passer par la création d’une association au sein du lycée qui permettra ainsi d’accueillir plus de lycéens dans un cadre pédagogique.
« Cette transversalité entre toutes les disciplines va nous permettre d’insérer notre projet dans le fameux Grand Oral du bac dont il est aujourd’hui question dans l’éducation » poursuit Jean-Marc Pellegri professeur à Giocante.
 « Ce projet est magnifique et réserve de belles surprises » continue t-il. « Ainsi une jeune fille a en quelque sorte redécouvert son grand-père en parlant des plantes qu’il cultivait ».
La « culture »  est décidément magique parfois !