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« André Kertész in Corsica » : l'exposition invisible du musée de Bastia


Philippe Jammes le Dimanche 28 Mars 2021 à 11:03

Depuis novembre 2020, le Centre Méditerranéen de la Photographie propose une belle et intéressante exposition au musée de Bastia. Mais voilà, la pandémie la rend invisible, elle le sera peut-être en juin à Ajaccio. En attendant, CNI vous la dévoile… Une visite en compagnie de Marcel Fortini, directeur du CMP.



Cette exposition inédite «André Kertész in Corsica » présentée par le Centre Méditerranéen de la Photographie en partenariat avec la Médiathèque de l’architecture et du patrimoine au musée de Bastia présente  50 tirages modernes qui nous font découvrir son reportage sur la Corse pour la revue Arts et Médecine réalisé et publié en 1933.
À l’été 1932, le comte Peraldi, président du syndicat d’initiative et touristique d’Ajaccio et de la Corse, demande au docteur Debat, fondateur de la revue «Art et médecine», de s’intéresser à son île afin d’en promouvoir l’image. La revue propose ainsi au photographe de réaliser un reportage spécifique sur l’île de Beauté au  cours du mois de mai 1933. Il devra illustrer les articles d’Abel Bonnard, Paul Morand et André Thérive.


Le 12 ou le 13, il s’embarque pour la Corse et son agenda devient muet pour une période de neuf jours. Dans ses bagages, il emmène trois appareils : un Rolleiflex, une petite chambre 9 x 12 cm et un appareil 6 x 9 cm.  Un carnet de prises de vue permet de préciser les étapes du photographe sur l’île de Beauté du 14 au 20 mai. Il entame son circuit par le golfe  de la Liscia, avant de terminer sa journée à Piana où son regard est attiré par les hommes assis à l’ombre de l’église. Le lendemain, après avoir déambulé dans les rues de Calvi, il visite l’Ile Rousse et Belgodère, dont il photographie le cimetière. Au soir, il prend une chambre à l’hôtel du Mouflon d’Or à Zonza, d’où il se rend à Porto-Vecchio avant de faire étape à Bonifacio. Il termine son périple à Ajaccio avant de rembarquer pour le continent.


Comme à son habitude, il n’a pas photographié la Corse comme une destination de villégiature, mais les paysages et des moments de la vie quotidienne des habitants de l’île. En cinq ou six jours, cheminant en automobile sur des routes rocailleuses, il a réuni une centaine d’images alternant paysages et scènes de la vie quotidienne. Au-delà de son talent, cette série, par le nombre de lieux visités, montre l’implication professionnelle de Kertész. Après la publication de l’album en décembre 1933, le comte Peraldi, charmé par les photographies du numéro se rapproche de Kertész pour lui proposer de publier certaines de ses images dans un dépliant touristique sur la Corse à paraître
en 1935.


«Ce travail est caractéristique de sa collaboration avec la revue dont il était le principal photographe » explique Marcel Fortini,  «il n’a pas photographié la Corse comme une destination de villégiature, mais les paysages et des moments de la vie quotidienne des habitants de l’île. Il a réalisé ce reportage en cinq ou six jours, cheminant en automobile sur des routes rocailleuses, alternant paysages et scènes de vie quotidienne».
Cette exposition présente, par ailleurs, une série de photographies emblématiques de la période parisienne d’André Kertesz.
«Il est dommage que cette exposition que nous avons montée au Bastia ne puisse recevoir de public, alors que les supermarchés sont pleins, des gens vont à l’église ou au temple. Mais nous allons la faire tourner sur l’île. En juin, on espère ainsi la faire découvrir aux Ajacciens, puis dans d’autres endroits».
 

Né en 1894 en Hongrie, André Kertész se voit offrir par sa mère son premier appareil photographique en 1912. Mobilisé pendant la première guerre mondiale, il ramène des images des moments parfois anodins de sa vie de soldat. Après la guerre, il cherche à faire de la photographie son métier. En octobre 1925, André Kertész débarque à Paris et publie ses premières photographies dans la revue Art et industrie en janvier 1926. Fréquentant les milieux artistiques d’avant-garde, il photographie ses amis hongrois, les ateliers d’artistes, les scènes de rue, les cafés et les jardins parisiens. En 1927, il expose ses images à la galerie «Le Sacre du Printemps». Sa réputation commençant à s’établir, il collabore à différentes publications françaises comme Vu, l’Art Vivant ou Art et Médecine, des revues allemandes comme Die dame ou Uhu.


En 1936, après avoir signé un contrat avec l’agence Keystoneet, il émigre à New York où il collabore avec les revues du groupe Condé Nast comme Vogue ou House and Garden. A partir de 1962, Kertész assiste à la reconnaissance de son œuvre par les institutions et le grand public. En 1984, le photographe fait don de ses négatifs et de ses archives à la France. La Médiathèque de l’architecture et du patrimoine conserve ainsi plus de 100 000 négatifs, des tirages contacts de lecture, une partie de sa bibliothèque et l’abondante correspondance du photographe.


« André Kertész in Corsica » : l'exposition invisible du musée de Bastia