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Michel Castellani : « L’évolution démographique est un défi politique »


Nicole Mari le Dimanche 24 Février 2013 à 15:44

L’élu territorial de Femu a Corsica, professeur d'économie et responsable pédagogique du Master 2 administration des entreprises à Corte, continue de décrypter, pour Corse Net Infos, les données démographiques actualisées par le dernier recensement de l’INSEE. Pour Michel Castellani, le vieillissement de la population et la concentration des insulaires en zone littorale et urbaine sont des défis politiques que la Corse doit relever car ils menacent directement la population historique.



Michel Castellani : « L’évolution démographique est un défi politique »
- La croissance démographique influe-t-elle sur l’occupation des territoires ?
- Oui. La structure du peuplement évolue également. Elle est marquée par de très forts contrastes, de très importantes dissymétries entre, par exemple, l’intérieur et les zones basses : 81% des habitants résident dans les communes immédiatement littorales. Sur les 55 communes de plus de 1000 habitants, une seule, Corti, est à l’intérieur des terres ! De plus, l’attraction urbaine est forte. Les deux agglomérations principales regroupent plus de 60 % des insulaires sur 10 % du territoire. Ajaccio est la principale commune de l’île, et une des plus dynamiques, devant Bastia, quatre fois moins étendue.
 
- L’agglomération bastiaise n’est-elle pas la plus peuplée ?
- Oui. Elle demeure le principal centre de vie avec près de 100.000 habitants (96.570 sur 447 km²). L’agglomération d’Ajaccio en compte 89.585 sur 479 km². Sur les 11 plus importantes communes, celles de plus de 3500 habitants, 6 appartiennent à l’agglomération de Bastia : Bastia, Borgu, Biguglia, Furiani, Lucciana, Ville-di-Pietrabugno. Les 5 autres sont Ajaccio, Porti Vecchju, Corti, Calvi et Ghisonaccia.
 
- Quelle est la densité de population sur les autres communes ?
- La structure de nos communes est très révélatrice. Sur les 360 que compte la Corse, 272 ont recensé moins de 500 âmes. Parmi ces dernières, 210, soit près de 6 communes sur 10, n’arrivent même pas à 200 habitants et rassemblent à peine 6 % de la population. On assiste à une agrégation par le haut. En 1999, il y avait 21 communes de plus de 2.000 habitants, il y en a 28 au dernier pointage. Elles rassemblaient 54 % des habitants, soit 170.000 personnes, elles en agrègent maintenant 67 %, soit 211.000 personnes. Globalement, 63 communes continuent de perdre de la population, quand 293 en gagnent.
 
- La population insulaire est vieillissante. Ce phénomène s’accroit-il ?
- Oui. La structure d’âges évolue sans discontinuer vers une maturation croissante. En 1990, pour la première fois depuis que notre île existe, les plus de 60 ans ont été plus nombreux que les moins de 20 ans. Par rapport à 1946, notre île compte 14.185 jeunes (0 à 20 ans) en moins et 50.457 personnes ayant dépassé les 60 ans en plus… Avec tout ce que cela suppose de solitude, de détresse, mais aussi de problèmes d’équilibres financiers au niveau des retraites, de la sécurité sociale, des politiques d’accompagnement, de la question des droits de succession... Ces réalités sont prégnantes dans tous les pays développés, quelquefois plus gravement qu’en Corse. Chez nous, la présence de 141.485 personnes de moins de 40 ans constitue une richesse qu’il ne faut pas gaspiller.
 
- Que préconisez-vous ?
- Nous ne sommes pas ici dans du domaine technique, mais dans des réalités éminemment politiques ! L’évolution démographique, bien définie depuis 50 ans maintenant, et dont le durcissement est confirmé par les dernières données censitaires, doit être intégrée comme variable essentielle, par les décideurs, depuis le plus haut niveau de l’Etat jusqu’au plus modeste conseil municipal. Elle doit l’être aussi par l’ensemble des citoyens. Parce qu’elle constitue un défi politique de première grandeur et une hypothèque dont la maîtrise engage l’existence même d’une communauté historique.
Propos recueillis par Nicole MARI


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