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Le procureur d’Ajaccio contre le "rêve bleu" viticole


Pierre BERETTI le Jeudi 1 Août 2019 à 18:32

Il n’a échappé à personne, ni aux locaux, ni aux touristes. Le "vin bleu" corse est en rayon depuis deux ans. Nombreux sont les curieux à avoir bravé le tarif élevé du produit pour avoir à leur table la bouteille couleur azur. Seulement voilà, la répression des fraudes veille au grain et dans ce cas aux grains de raisin. Le vin n’est pas conforme à la fabrication règlementaire et des enquêtes ont été ouvertes par le procureur d’Ajaccio à l’encontre des fabricants.



Le « vin bleu de Corse » ou « vin de la mer » a fait le buzz ces derniers jours via les médias nationaux et le web. Le nom d’Eric Bouillard, procureur d’Ajaccio est cité à de nombreuses reprises car ce dernier poursuit les enquêtes au sujet du fameux vin bleu. Contacté par notre rédaction, il explique les raisons et l’historique des enquêtes en cours :
 
- Pouvez vous nous expliquer pourquoi le vin bleu a été remis en cause ? 
- En 2017, le vin bleu a fait son apparition dans les commerces mais aussi à travers des publicités y compris par voies de presse. Cette boisson se présentait comme étant un vin venant de Patrimonio qui aurait pris sa couleur avec une fabrication relevant d’algues et autres éléments naturels, présenté comme « le vin de la mer ». La répression des fraudes s’est intéressée à cette boisson et en a vérifié le contenu. Il est alors apparu que le liquide contenait un colorant E133 qui n’est pas dangereux à la consommation mais la couleur bleue n’est pas naturelle et ne provient pas de la fabrication annoncée par la publicité. D’autre part, il a été vérifié des traces d’achat du E133 de la part d’un associé des fabricants. 
 
- Que s’est il passé ensuite ? 
- L’administration a rappelé à l’ordre les fabricants et ceux-ci ont consenti à changer leur produit et à le déclarer « cocktail ». Mais les conditions imposées par la réglementation n’ont pas été écoutées. Et, nous retrouvons encore une fois un colorant, cette fois le E131, chlorure de sodium, dans un produit qui annonce une fois encore du vin dans son appellation « cocktail de vin bleu ». 
Par ailleurs, les fabricants ne sont pas propriétaires d’une exploitation à Patrimonio, le vin est récupéré auprès d’une coopérative. 
 
- Quelle est la position de la profession viticole ? 
- Elle est spectatrice de cette affaire. Nous menons cette enquête car nous protégeons les intérêts des producteurs locaux, celles des AOP et de la réglementation en vigueur sur l’appellation du produit « vin ». 
 
Rappelons que selon la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), « le vin est le produit obtenu exclusivement par la fermentation alcoolique, totale ou partielle, de raisins frais, foulés ou non, ou de moûts de raisins ».
Au delà des analyses conduites par la répression des fraudes, des étudiants en chimie de Toulouse ont eux aussi confirmé les résultats avec la présence de colorants. 
Aujourd’hui le « vin bleu » fait l’objet d’une enquête sur son entorse à la réglementation viticole mais aussi sur la publicité qui en a été faite qui pourrait être une « tromperie sur les qualités substantielles ». Encore une fois, les autorités rassurent le consommateur sur le facteur non dangereux des additifs mais continuent à enquêter y compris sur les modes de communication des fabricants qui ont récemment transmis des analyses à la presse prouvant le retrait du E133 mais omettant la présence de E131. 
Affaire à suivre ...