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Violences conjugales : Déjà 680 victimes recensées en 2023 en Haute-Corse, une augmentation de 36 % en un an


MV le Samedi 25 Novembre 2023 à 08:25

Le 25 novembre marque la Journée Internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes, une date dédiée à la sensibilisation et à la mobilisation contre ce fléau. Mais malgré les efforts déployés par les associations et les pouvoirs publics depuis des décennies, les statistiques demeurent préoccupantes. En Haute-Corse 680 victimes ont été recensées de janvier à octobre 2023



Photo d'illustration de la grande opération de collage nocturne pour lancer l’opération "Quì Dinò !" Crédit Laurent Herin
Photo d'illustration de la grande opération de collage nocturne pour lancer l’opération "Quì Dinò !" Crédit Laurent Herin
C’est une litanie de chiffres qui fait froid dans le dos. En France quelque 244 000 victimes de violences conjugales ont été enregistrées par les forces de sécurité en 2022, ce qui correspond à une hausse de 15 % par rapport à 2021, a annoncé le ministère de l’intérieur. Les victimes sont des femmes à 87 % et les mis en cause des hommes à 89 %.Toutefois, le silence persiste, et seulement 25 % des victimes a osé porter plainte, selon les chiffres du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI). 

Un condensé de violences physiques, sexuelles ou psychologiques aussi long que choquant qui n'épargne pas notre ile. En Haute-Corse, la situation est particulièrement préoccupante, avec 623 personnes victimes en 2022, soit une augmentation de plus de 20 % et déjà 680 victimes recensées en 2023 : "On voit que c'est un phénomène qui augmente nettement depuis quelques années. En 2023 du 1 janvier au 30 octobre, on est déjà à 680 victimes .Si la dynamique se poursuit, on est sur une augmentation de 36%.​" explique Magali Chapey , directrice de Cabinet du Préfet Michel Prosic.

Les statistiques révèlent une situation particulièrement préoccupante, avec 76 % des victimes en Haute-Corse étant des femmes. "On enregistre un taux de violences intrafamiliales de plus en plus important. On reste dans la dynamique nationale, où majoritairement, les victimes de violences intrafamiliales sont des femmes," détaille la haute fonctionnaire. "Cette année encore, 42 % de l'ensemble des violences du département sont des violences intrafamiliales."

Libération de la parole
Le phénomène n'est pas seulement une question de chiffres, mais aussi de libération de la parole. Magali Chapey nuance les données en soulignant que "l'augmentation des chiffres n'est pas forcément liée à une augmentation des violences, mais plutôt à une certaine libération de la parole, à l'amélioration des conditions d'accueil et une prise en charge des victimes qui est totalement différente depuis quelques années." "Certes, détaille-t-elle, il y a une certaine évolution des violences, mais on constate que le fait d'avoir améliore la prise en charge des victimes encourage les femmes à dénoncer les violences et à franchir la porte des associations qui les accompagnent et des commissariats".

Un fléau transversal 
Malgré cette évolution, la lutte contre les violences conjugales demeure un défi transversal touchant toutes les catégories sociales, tous les âges, et tous les lieux géographiques. "Pour cette raison, les services de l'État s'efforcent de tisser un réseau à travers le territoire. Notre objectif est de garantir la mobilité des associations et de nos intervenants sociaux, les rendant disponibles sur toutes les structures, et ce, dans l'ensemble du territoire. Cette approche vise à toucher chaque individu, soulignant l'importance d'offrir des services d'accompagnement accessibles, en particulier pour les habitants des zones rurales." souligne Magali Chapey.

Les efforts ne sont pas suffisants 
Face à cette situation jugée préoccupante, des mesures ont été prises en Haute-Corse. Plus de 200 professionnels ont été formés pour mieux appréhender ces problématiques. Une maison de protection des familles a été créée à la gendarmerie de Bastia pour offrir un accueil spécifique. De plus, une assistante sociale, recrutée à temps plein, intervient auprès de la police et de la gendarmerie pour conseiller et soutenir les victimes. "L'objectif est d'assurer un accompagnement global, impliquant la collaboration avec des associations telles que le CIDFF. Les victimes peuvent ainsi déposer plainte dans des conditions favorables et être orientées vers des dispositifs d'assistance sociale, tout en bénéficiant du soutien d'associations spécialisées. En parallèle, un centre pour les auteurs a été ouvert à Corte, illustrant la volonté de prendre en charge tant les victimes que les auteurs afin de prévenir les récidives." explique Magali Chapey. 

Pourtant malgré ces mesures la violence persiste. La "persistance de la violence faite aux femmes n'est pas une fatalité", "nous devons y mettre fin et nous allons le faire", a déclaré le président de la République dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux samedi matin. Il a énuméré les actions déjà mises en place (élargissement des horaires du 3919, mise en place d'une plateforme numérique d'accompagnement, facilitation du dépôt de plainte, augmentation du nombre d'enquêteurs dédiés, déploiement de "téléphones grave danger" et de "bracelets danger immédiat", création de places d'hébergement d'urgence) et s'est félicité d'efforts "qui ont porté leurs fruits". 


   
Mais pour les associations féministes, les syndicats et des personnalités de gauche, on est loin du compte. En 2022, 145 homicides conjugaux ont ainsi été recensés en France, dont 118 féminicides, quatre de moins qu’en 2021, selon un bilan publié au début de septembre.