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Une excellente saison en perspective pour les clémentines corses


Jeanne Leboulleux-Leonardi le Jeudi 10 Novembre 2022 à 17:30

L’année 2022 s’annonce excellente pour les clémentines : tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif. « Le tonnage expédié est estimé entre 30 000 et 32 000 tonnes : des volumes similaires à ceux de l’an passé », selon Jean-Paul Mancel agrumiculteur à E Valle-di-Campulori, et, notamment, Président de l’APRODEC – l’association qui gère les signes de qualité IGP clémentine, pomelos, noisette de Cervione et kiwi, ainsi que le label rouge clémentine. Il nous en dit plus sur la récolte de l’année et sur les perspectives futures.



Document CNI
Document CNI
- L’année 2022 : une très bonne année malgré la sécheresse ?
- Les volumes sont effectivement du même ordre de grandeur que l’an passé. En termes qualitatifs, d’après nos analyses de déclenchement de récolte et notre réseau de suivi de parcelles, l’année est très bonne, avec des taux de jus jamais atteints jusque-là : dans certains vergers, plus de 50 % de jus ! C’est énorme ! Les clémentines sont très goûteuses : c’est très positif. De plus, l’absence de pluie que nous connaissons toujours, c’est bon qualitativement, dans la mesure où nous avons toujours de l’eau pour compenser – on peut irriguer. L’inconvénient de la douceur actuelle, c’est que la Commune ne tourne pas assez vite : elle a du mal à colorer pour prendre sa couleur caractéristique. On a un peu de retard là-dessus. 

- La “Commune” ? C’est une variété de clémentines ?
- C’est celle qu’on appelle aussi la Fine de Corse, la première clémentine que l’on a cultivée en Corse. Elle fait plus de 70 % du tonnage. Avec la Caffin, une variété primeur, cela représente 99 % des clémentines de l’appellation. 
La météo a fait que la campagne a commencé plus tôt. La récolte de la variété Caffin a débuté il y a trois semaines et se termine maintenant. On entre dans la Fine de Corse qui nous conduira jusqu’à la fin décembre ou la mi-janvier. 
On aimerait aller plus loin dans la saison pour finir mi-janvier à fin janvier. Les chercheurs de l’INRAE ont, dans leur collection, des variétés du monde entier. Si une variété se comportait comme l’IGP Clémentine de Corse, on pourrait faire des essais. Et si le changement climatique se confirme, peut-être certaines variétés actuellement non adaptées à la Corse pourraient-elles le devenir… Nous sommes en perpétuelle attente de quelque chose qui pourrait améliorer le produit ou correspondre à une demande. Même si de nouvelles variétés apparaissent très rarement, nous restons attentifs…

- D’autres conséquences liées à la chaleur de l’été ?
- Il a fait effectivement très chaud. Mais l’agrume est un arbre qui supporte très bien les fortes chaleurs. A partir du moment où on a de l’eau pour l’irriguer, on n’a pas trop d’inquiétude. Le pire, ce sont les coupures dans l’irrigation. Aussi, nous avons beaucoup stressé parce que nous avions peur de manquer d’eau. Avec les autres filières, nous avons travaillé à préserver la réserve. Nous avons eu des réunions régulières avec l’OHEC, la Préfecture. Une bonne entente, une bonne concertation : nous avons réussi à gérer et nous sommes très contents. Par contre, nous sommes inquiets pour l’avenir.

- Quelles sont les perspectives ?
- Il y a de plus en plus d’agriculteurs en Corse. En clémentines, nous plantons tous les ans 50 hectares en complément de ce qui existe déjà. Et il se plante aussi des oranges, des pomelos, des citrons. Pour l’autonomie alimentaire, on fait aussi beaucoup de foin. Alors que la vigne n’était jamais irriguée, elle l’est aujourd’hui à 50 % et elle le sera, à terme, à 100 %… sauf pour le Patrimonio, mais c’est un choix des viticulteurs. Or nous n’avons pas augmenté nos capacités de stockage : nous disposons toujours du même volume d’eau. Y en aura-t-il pour tout le monde ? Cela devient une vraie problématique.

- Par ailleurs, il y a eu des restrictions de visas pour les Marocains cette année, en France. Avez-vous été impactés ?
- Ça a effectivement été la surprise : un pourcentage très important de refus de visas… alors même que tout paraissait plus simple à organiser parce qu’il n’y avait pas le Covid.  Nous n’en connaissons pas les causes. Mais d’autres facteurs que le facteur politique ont pu également jouer. Les autorités ont pu faire plus attention parce qu’il y avait beaucoup de primo-arrivants cette année. Et cela pour deux raisons : d’abord parce qu’il y a de nouvelles plantations, que des vergers s’agrandissent. Ensuite parce que les saisonniers des pays de l’Est viennent de moins en moins : beaucoup ont en effet réussi à trouver du travail plus près de chez eux… d’autant qu’ils étaient toujours désireux de passer Noël et le premier de l’an en famille, et qu’à ce moment-là, on est en pleine récolte des clémentines. La guerre en Ukraine a dû jouer aussi. En complément des refus de visas, il y a eu également des retards dans leur délivrance : or il ne fallait pas louper les avions. On a alerté le Préfet qui est intervenu auprès du consulat, ce qui a permis d’accélérer les choses.

- Pas de problème de formation pour ces nouveaux saisonniers ?
- Aucun. Pour tous les saisonniers, nous avons une attestation qu’ils viennent bien du rural, du monde de l’agriculture : ils sont déjà aguerris. Et ils vont travailler aux côtés de saisonniers qui sont des habitués : on les forme très vite.

Les ouvriers agricoles au travail
Les ouvriers agricoles au travail