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"Trésor de Lava": un nouveau procès à Marseille, près de 40 ans après la découverte


CNI avec AFP le Lundi 22 Janvier 2024 à 20:07

Près de 40 ans après sa découverte et 1 600 ans après sa disparition, un nouveau procès à Marseille devrait relancer l’histoire du trésor de Lava.



Une pièce du trésor de Lava
Une pièce du trésor de Lava
Qui aurait cru qu’une oursinade entre amis dans le golfe de Lava aboutirait sur la découverte d’un des trésors de l’empire romain ? Pourtant, un jour de novembre 1985, lors d’une pêche à l’oursin entre amis dans la commune d’Alata, près d’Ajaccio, Félix Biancamaria fait une découverte aussi inattendue qu'extraordinaire. Dans une petite crique, à une dizaine de kilomètres de la ville, il met au jour un trésor constitué d'un plat et de pièces en or à l'effigie d'empereurs romains du IIIe siècle. C'est le point de départ d'une aventure fascinante. Pendant des semaines, en toute discrétion, il écoule son trésor à Paris auprès de numismates. Malgré des offres bien en deçà de la valeur réelle de ces pièces centenaires, il accumule déjà une petite fortune. De retour en Corse, ce jeune homme de 25 ans mène alors une vie d'opulence.

Cependant, un an après sa découverte, son existence dorée est brutalement interrompue par son arrestation. Les autorités confisquent ce qui reste du trésor, et Félix Biancamaria est condamné à 18 mois d'emprisonnement avec sursis pour détournement d'épave maritime. En 1995, en appel, la peine est confirmée. Aujourd'hui, le protagoniste se retrouve de nouveau sur le devant de la scène judiciaire, cette fois-ci accusé de recel de vol et d'importation en contrebande d'un trésor national.
Les avocates actuelles en charge du dossier soulèvent cependant des interrogations sur le motif de cette condamnation, mettant en lumière une question fondamentale : quelle est l'origine exacte de ce trésor exceptionnel ? Les audiences se tiendront les 29 et 30 janvier prochains, centrées sur les chefs d'accusation de "recel de vol d'un trésor maritime". Ce nouveau chapitre dans l'affaire Biancamaria promet des rebondissements et une exploration approfondie des circonstances entourant cette découverte historique.

"Il ne lui reste plus que ses yeux pour pleurer"
Ses avocates ont annoncé lundi qu'elles allaient plaider pour que leur client, qui risque jusqu'à cinq ans d'emprisonnement, soit "relaxé" et que "son plat lui soit rendu" au terme de son procès devant le tribunal correctionnel de Marseille. "Il ne lui reste plus que ses yeux pour pleurer", a déclaré lundi lors d'une conférence de presse à Paris l'une de ses avocates, Me Amale Kenbib, accusant l'Etat de "s'accaparer ce trésor" monétaire que les numismates tiennent pour l'un des plus importants au monde.

L'affaire était revenue dans l'actualité lors de son interpellation à l'aéroport de Roissy en 2010, en possession d'un plat en or considéré comme une des pièces maîtresses du trésor découvert dans le golfe de Lava. Il avait alors confirmé avoir trouvé le plat lors de plongées dans les années 1980. L'objet, dont le prix est estimé entre 6 et 8 millions d'euros, avait été confié au département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines au ministère de la Culture (Drassm).

Selon l'autre avocate du sexagénaire, Me Anna-Maria Sollacaro, à l'époque la législation qui couvrait les découvertes maritimes ne prévoyait pas d'autres dispositions que celles du détournement d'épave. Ensuite, "on a participé à un mouvement précipité pour créer une nouvelle législation postérieure à la découverte pour pouvoir s'approprier le trésor" en introduisant une notion de "bien culturel maritime". Or il est "bien plus fortement probable que ce trésor émane de l'occupation romaine de l'époque que d'un naufrage", souligne Me Sollacaro en dénonçant une violation du principe de "non-rétroactivité de la loi pénale".

Des experts - historiens, archéologues et plongeurs - cités par la défense vont témoigner au procès pour contester l'hypothèse de l'épave.

Si à l'origine le trésor se trouvait sur la terre ferme, le découvreur a droit à 50% de sa valeur. Mais s'il s'est abîmé en mer, il appartient intégralement à l'État.