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Langue corse : Une convention Etat-CTC (2016/2021) pour le développement de l’enseignement…


Jean-François Vinciguerra le Mercredi 2 Novembre 2016 à 18:10

Au cours des trente dernières années, la langue corse dans l’enseignement a connu une belle avancée. Des progrès importants ont été réalisés, cela malgré le constat d’un recul de son usage social. Néanmoins, sa présence dans l’enseignement bénéficie d’une politique très volontaire de la part de la Région, de l’Université mais aussi de l’Etat… Depuis une bonne quinzaine d’années, on peut parler d’une direction vers le bilinguisme scolaire



Mercredi après midi à la CTC,  Gilles Simeoni, président de l’Exécutif,  Xavier Luciani, conseiller exécutif délégué à la langue corse, Bernard Schmeltz, préfet de Corse et Philippe Lacombe, recteur de l’Académie de Corse, ont signé la Convention Etat-CTC pour le développement de l’enseignement de la langue corse, en présence de Jean-Guy Talamoni, président de l’Assemblée de Corse et Josépha Giacometti, conseillère exécutive, déléguée à l’éducation, la formation, l’enseignement et la recherche.
Tout à tour, les représentants de l’Exécutif et de l’Etat se sont exprimés sur la question pour saluer cette avancée de la politique linguistique avec, pour principal objectif - notamment en ce qui concerne les élus - la généralisation de l’enseignement bilingue.
Il convient de préciser que la langue corse dans la société est devenue tout à la fois un vrai consensus politique et, sur des aspects comme la coofficialité des langues corse et française ou la généralisation obligatoire de l’enseignement de la langue régionale, un enjeu encore marqué pour l’avenir de l’île. Les deux considérations se rejoignent dans le fait que les aspects diagnostiques tant dans la présentation que dans les représentations revêtent une grande importance. Plus que jamais, la question de la langue corse est donc socialement vive et intègre régulièrement le débat sur l’avenir politique de l’île.


Centres d’immersion linguistique
Xavier Luciani, en charge de la langue corse s’est d’abord exprimé en langue nustrale pour, dans un premier temps, saluer les participants, avant de  bien mettre l’accent sur l’acte majeur de la politique linguistique, estimant qu’il s’agissait bien là « d’un document important » qui entérine la Convention. Aujourd’hui, la CTC réaffirme la volonté et la nécessité de tout mettre en œuvre pour réaliser ces objectifs ambitieux dans le cadre d’un processus de coofficialisation mené avec l’ensemble des acteurs de la société corse. Le Conseiller Exécutif a évoqué la volonté de généraliser l’enseignement bilingue afin de l’améliorer tout en présentant les différentes actions pour les cinq années à venir :
« La CTC soutient l’équipement des écoles bilingues en subventionnant les communes pour l’achat d’équipements pédagogiques (tableaux interactifs) et encourage les voyages en immersion en Méditerranée romane. Pour la saison 2016/2017, elle consacrera 485 000 euros à ces différentes actions. La CTC finance également l’édition publique de documents à l’usage des classes (200 000 euros par an) et lors de la prochaine triennale, qui débutera en 2017, inclut une augmentation de la dotation dans la perspective plus large d’un renforcement de l’édition d’ouvrages pédagogiques (250 000 euros). »
Développement des centres d’immersion linguistique, fréquentation des centres à la hausse, tant à Savagna, Bastia-Campanari, Lorettu di Casinca ou Bastelica, d’autres efforts seront consentis avec la mise en place de séjours immersifs dès cette année (515 000 euros). Le Conseil Exécutif travaille à un « schéma de maillage renforcé » de territoire, afin de donner accès à ces séjours au plus grand nombre. Sur la durée du Contrat de Plan CPER, la CTC s’engage à hauteur de 3 618 000 euros.
Autre argument de marche en avant, la promotion de l’excellence en langue Corse, avec le « dispusitivu Maestranza, un soutien aux étudiants préparant le concours bilingue de professeurs des écoles et le « primiu Andria Fazi qui récompense l’excellence dans l’apprentissage du corse en second degré.  


Dès la maternelle…
Jean-Guy Talamoni a commenté à son tour ce qu’il qualifie de « document important, » soulignant l’initiative :
 « L’Assemblée s’était déjà prononcée pour mais il y a nécessité d’évoluer pour que l’on arrive à l’inverseur de la tendance, c’est la condition sine qua non, de sorte que l’on passera à autre chose rapidement. Il ne faut plus ralentir le déclin de notre langue et il convient donc de s’engager dans une autre phase… »
Gilles Simeoni a évoqué la question de la langue corse au cœur du choix politique :
« Il faut continuer à se battre pour la coofficialité de la langue, c’est l’objectif à atteindre, c’est la condition sine qua non du rayonnement de notre langue… » Le président du Conseil Exécutif a parlé du plan de normalisation de la langue au-delà de la durée du mandat, faisant allusion aux cinq années à venir et aux mesures :
  • L’école maternelle avec la langue corse principale
  • Le collège
  • La formation des enseignants
  • Le Conseil Académique territorial
« Le plan doit être progressif et les efforts consentis importants. Il faut souligner la qualité du travail réalisé par les services du rectorat et de la CTC. La situation de la langue est préoccupante et il faut continuer à faire des efforts pour aller de l’avant. »
Philippe Lacombe, Recteur de l’Académie s’est félicité de la bonne marche des partenariats :
« Ils marchent effectivement très bien. C’est le résultat d’un travail partenarial qui s’inscrit dans la durée. La convention, c’est la pérennité, le résultat du travail réalisé en amont mais il reste effectivement beaucoup à faire et chacun est conscient qu’il s’agit là d’un travail de longue haleine qui mobilise beaucoup de monde. Nos troupes sont en ordre de marche. Dans les autres territoires ils doivent nous regarder avec envie. L’attractivité nous oblige à aller vers l’excellence, cela implique qu’il faudra être exigeant quant à la qualité des formations… »
Bernard Schmeltz, préfet de la Corse, a évoqué à son tour la démarche politique qui accompagne l’apprentissage de la langue :
« Nous sommes loin d’une époque où nos parents et grands parents parlaient couramment leur langue. Cela fait partie d’une richesse qu’il faut préserver. Je suis conscient qu’il y a encore du chemin à parcourir mais il faut favoriser le développement du patrimoine linguistique. Je rappelle qu’il y a 75 langues répertoriées et le moins que l’on puisse dire est qu’il y a eu des avancées importantes qui sont intervenues pour la langue corse. »

Le second degré aussi…

En ce qui concerne l’enseignement de la langue corse dans le second degré, la situation semble plutôt préoccupante autant que contrastée. Au cours de la saison scolaire 2015-2016 :
  •  58% des élèves ont fait du corse au collège, dont 16% en filière bilingue
  • 28% des élèves ont fait du corse en lycée d’enseignement général, dont 0,78% en filière bilingue
  • 27% des élèves ont fait du corse en lycée professionnel
En examinant les chiffres de près, on s’aperçoit que le collège constitue l’étape où l’on note la perte de la moitié des effectifs entre la 6e (84%) et la 3e (42%). Les résultats sont là, l’enseignement bilingue stagne, les effectifs sont encore faibles et les volumes horaires sont majoritairement insuffisants. Il y a une existence quasi nulle en lycée où l’enseignement des trois heures plafonne. 
« La langue Corse est fondamentalement une question politique, mais il y a une position éloignée entre l’Etat et la CTC, raison pour laquelle il faut redonner à la langue Corse la place qu’elle mérite » a conclu Gilles Simeoni.
J.-F. V.