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L’Assemblée nationale favorable à un statut d’autonomie de la Corse et à l’octroi d’un double pouvoir normatif


Nicole Mari le Mercredi 28 Mai 2025 à 21:16

Le 28 mai, la Commission des lois a examiné et voté la publication du rapport de la mission d’information sur l’avenir institutionnel de la Corse, dont Florent Boudié, président de la commission des lois est le rapporteur. Le rapport préconise un statut d’autonomie pour la Corse et le transfert d’un double pouvoir normatif à la Collectivité de Corse avec des garde-fous juridiques et constitutionnels, mais renvoie à la loi organique le soin de fixer les compétences octroyées. Pour les deux députés nationalistes corses, Paul-André Colombani et Michel Castellani, un pas important a été franchi.



L'Assemblée nationale. Photo AN.
L'Assemblée nationale. Photo AN.
« Il s’agit de donner à la Corse un statut d’autonomie au sein de la République. Si elle était confirmée, cette évolution s’accompagnerait de l’octroi d’un pouvoir normatif local qui permettrait de répondre efficacement aux difficultés cumulatives exacerbées auxquelles la Corse doit faire face ». C’est en termes très clairs que Florent Boudié, président de la Commission des lois et rapporteur de la mission d’information sur l’avenir institutionnel de la Corse, a débuté la présentation du rapport de ladite mission, dont la publication a été adoptée, mercredi matin, à l’unanimité des votes exprimés. Ce rapport, qui s’inscrit dans la lignée du processus de Beauvau, du projet d’écritures constitutionnelles adopté par l’Assemblée de Corse et de la promesse faite par le Président de la République, Emmanuel Macron, en septembre 2023, valide, donc, le principe d’un statut d’autonomie pour la Corse et formule plusieurs recommandations qui ont vocation « à éclairer la représentation nationale dans ses futures délibérations ». 

Un double pouvoir normatif
Ce rapport, que CNI avait déjà détaillé dans ses colonnes, comportait des zones d’ombres que Florent Boudié a, en partie, clarifiées, notamment le transfert du pouvoir législatif, c’est-à-dire la capacité pour la Collectivité de Corse à ériger des lois de manière autonome. Le rapport parle d’un « pouvoir normatif délégué », le présentant comme « la clef » de « l’autonomie territoriale à la française ». Le terme « délégué », qui a déchainé les passions et les foudres des Nationalistes, lors de la dernière session de l’Assemblée de Corse, a été largement explicité par le rapporteur : « Un pouvoir normatif de nature législative ou règlementaire est un pouvoir par nature délégué par la Constitution dans les domaines qui devront être par la suite délimités par la loi organique. Au terme du projet d’écriture constitutionnelle, le pouvoir normatif confié à la collectivité de Corse serait ainsi double : il se traduirait, d’une part par la possibilité d’adopter les lois ou les règlements à la réalité corse, premier niveau de pouvoir normatif, d’autre part par la possibilité offerte à la collectivité de fixer elle-même les normes dans les matières qui relèvent de sa compétence. Le texte prévoit également que le gouvernement pourrait, à titre subsidiaire, adapter par ordonnance des dispositions législatives qui ne relèvent pas des compétences de la collectivité », explique Florent Boudié.

Florent Boudié à droite.
Florent Boudié à droite.
Des garde-fous
Le président de la Commission des lois insiste, ensuite, sur « les garanties, les garde-fous » qui encadreront ce nouveau pouvoir normatif local. Le premier est la loi organique qui devra délimiter le périmètre du pouvoir normatif confié à la collectivité de Corse. « La représentation nationale sera souveraine. Mais une fois le pouvoir normatif délégué par la Constitution à la collectivité de Corse, une fois le législateur organique intervenu pour en définir le champ d’application, le pouvoir normatif, législatif, réglementaire, de la collectivité de Corse s’exercerait de façon autonome dans le cadre bien sûr de notre Etat de droit et sous l’égide et le contrôle du Conseil constitutionnel ». Le deuxième garde-fou est le double contrôle juridictionnel du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel, selon des modalités qui devront, là aussi, être définies par le législateur organique. Le troisième garde-fou est la création d’un principe d’évaluation obligatoire des normes locales adoptées et mises en œuvre par la collectivité de Corse. « Ce principe d’évaluation serait une première s’il était adopté. Il serait sans équivalent pour des collectivités relevant de l’article 12 de la Constitution ». La question brulante du pouvoir normatif est, donc, remise dans les mains du législateur organique qui détient donc « un rôle absolument central » dans la mise en œuvre effective du statut d’autonomie. Florent Boudié évoque « un édifice à deux étages : la loi constitutionnelle fixera les grands principes de l’autonomie de la Corse, quand le législateur organique déterminera, lui, l’étendue de ses nouvelles prérogatives ».

Un calendrier serré
Une fois publié, le rapport sera transmis au Conseil d’État qui devrait donner son avis au plus tard à la mi-juin, puis examiné en Conseil des ministres avant de revenir à l’assemblée nationale et au Sénat. Tout cela est prévu en principe avant la fin de la session avant la fin de la session ordinaire, c’est-à-dire le 30 juin, dans l’objectif de boucler toute la démarche avant la fin de l’année. La mission parlementaire invite clairement le gouvernement a respecté le calendrier qu’il a lui-même fixé et a engagé « au plus vite » le projet de rédaction constitutionnelle afin que « ce dépôt devant le Parlement puisse être formalisé avant la fin du premier semestre 2025 » et permettre la réunion du Congrès à Versailles à la fin de l’année 2025. Elle estime ce texte « prioritaire », comme l’annonce Florent Boudié. « Il faut aller vite. On parle d’une session extraordinaire qui irait jusqu’au 11 juillet, cela me semble une date limite acceptable ». Ce timing très serré est une vraie gageure au vu de la lourdeur des autres dossiers parlementaires au programme.
 
N.M.