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" Ce que nous n’avons pas pu dire à François Hollande"


le Samedi 4 Mars 2017 à 17:01

"Sauf à faire preuve de naïveté il était peu probable que la venue de François Hollande en Corse à moins de deux mois de la fin de son quinquennat soit historique pour des dizaines de milliers de Corses confrontés à l’urgence sociale. L’écho de ses renoncements face à la finance résonne en Corse aussi à travers le pacte de responsabilité et le CICE, les lois Macron et ElKhomri, ou encore la loi NOTRe" affirme, dans une déclaration pour le Parti communiste français, Michel Stefani.



" Ce que nous n’avons pas pu dire à François Hollande"
"Son discours, comme les autres d’ailleurs, esquivait la question sociale qui a valu en 1989 cette réplique de Michel Rocard à des dizaines de milliers de Corses dans la rue pour dénoncer la vie chère et les bas salaires : « avec la Corse le plafond de la solidarité a été atteint ». L’ancien premier Ministre, fédéraliste convaincu, a été honoré pour son engagement « réformiste » et son choix de reposer à tout jamais en Corse.  

Mettant ses pas dans les siens et ceux de François Mitterrand, François Hollande a souligné qu’il avait voulu « un statut adapté » à la Corse et incomparable à celui des autres régions métropolitaines. La collectivité unique de Corse, « aux compétences élargies, sera la seule à disposer encore de la clause de compétence générale ». La volonté d’émancipation de la majorité territoriale pourra se concrétiser désormais à travers la loi NOTRe et le pouvoir d’adaptation réglementaire.

La loi de ratification des ordonnances, organisant la fusion des 3 collectivités pour n’en faire qu’une, permettra « une représentation forte et unifiée ». Cela implique beaucoup de travail avant d’imaginer une nouvelle évolution statutaire « sans toucher à l’indivisibilité de la République ».



La Corse dans la Constitution à l’article 72 François Hollande est favorable mais « il faut disposer de la majorité des deux tiers au Congrès ». L’expérience en cinq ans a montré que ce n’était pas possible. La non ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires en témoigne.

Pour la fiscalité la loi NOTRe permet de compenser le retrait de l’Etat en laissant aux Régions la possibilité d’agir sur une fraction de TVA et de ponctionner les ménages avec l’impôt le plus injuste qui soit pour se donner des marges de manœuvre budgétaire. Avant la zone franche ou le statut fiscal « il faut évaluer les dispositifs fiscaux existants ».

Nous pensons immédiatement au détournement de réfaction de TVA 194 millions d’euros qui dure depuis des décennies et qui n’a jamais fait l’objet d’une intervention quelconque afin que les consommateurs en soit les bénéficiaires comme prévu initialement. On pourrait prendre aussi l’Arrêté Miot et l’avantage maintenu pour les détenteurs de gros patrimoines heureux de voir leur sort fiscal lié à la nécessité incontestable de sortir du désordre foncier.

Cette réforme doit permettre, selon la formule consacrée, « un développement économique harmonieux », dans notre ile où 22 % des ménages ont des revenus inférieurs au seuil de pauvreté. Les trois précédentes réformes avaient le même objectif sauf que les inégalités se sont creusées. Aujourd’hui l’écart de revenu entre les ménages les plus riches et les plus pauvres est de 6.5 points.



Dans ce contexte, de surcroit quand le taux de chômage est aussi le plus élevé des régions de France métropolitaine, on peut imaginer l’impact que peut avoir en Corse la politique de mise en concurrence des territoires et de restriction de la solidarité nationale préfigurée par la loi NOTRe et la création des grandes régions européennes.

Le président de la République à rappeler que le PEI avait été prolongé, que la programmation pluriannuelle de l’énergie permettrait la mise en gaz de la Corse et l’approvisionnement des centrales de Lucciana et d’Ajaccio. S’y ajoute le classement en Ile montagne obtenu au bénéfice de la seule loi montagne de 1985 ou encore l’augmentation même insuffisante du coefficient géographique appliqué aux équipements hospitaliers.

C’est bien là, preuves à l’appui, la démonstration qu’il n’était pas nécessaire, de surcroit sans consultation des Corses par référendum, d’opérer une telle concentration des pouvoirs en Corse.



En revanche François Hollande n’est pas revenu sur la volte-face qui a conduit son gouvernement à brader la SNCM. Dans cette opération, non seulement 700 emplois à statut ont été supprimés, le périmètre de service public a été réduit pour consacrer un monopole low cost sur les services à passagers.

Après avoir dit à Marseille, en juin 2014, qu’il fallait sauver la « SNCM fleuron de la marine marchande française », il peut apprécier le chemin parcouru. Un oligopole s’est constitué autour de la grande distribution qui s’est accaparé la Corsica Linéa de manière douteuse. Ce consortium affiche un chiffre d’affaire d’un milliard d’euros soit 10 % du PIB de la Corse. Il est pour une grande part à l’origine du détournement des réfactions de TVA sur les produits de consommation courantes et responsable de la cherté de la vie sans oublier les bas salaires.



En ce moment même cette politique de lynchage de la SNCM se prolonge avec la décision du Tribunal de l’Union européenne qui demande à l’Etat de récupérer 220 millions d’euros de compensation versée à la SNCM pour un service effectué quand le Tribunal administratif de Bastia, au même motif, condamne la CTC à verser, aux actionnaires de Corsica Ferries, 84 millions d’euros dont on peut imaginer qu’ils prendront vite le chemin de la Suisse.



Comme nous n’avons pas été autorisés à nous exprimer dans « l’enceinte de la démocratie » qu’est l’hémicycle de l’Assemblée de Corse, seuls les présidents ont pu le faire, François Hollande n’aura pas eu besoin d’écouter ce que les élus communistes avaient à dire sur « l’expérimentation institutionnelle » ultralibérale et permanente qui pousse à la marginalisation de la Corse dans la logique du fédéralisme européen.
La Corse a vraiment besoin d’une autre politique."