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Bastia : La future métropole d'Ajaccio s'invite au conseil communautaire


David Ravier le Mardi 20 Février 2024 à 07:47

Lors du conseil communautaire du 19 février, les élus de la Communauté d’Agglomération de Bastia (CAB) ont exposé leurs points de vue concernant le projet de métropolisation d'Ajaccio. Pour les élus communautaires, si elle venait à voir le jour, cette nouvelle entité bouleverserait l’équilibre territorial, à l'heure où les négociations sur l'autonomie sont sur le point de s'achever.



Les élus de la communauté d'agglomération de Bastia (CAB) ont débattu de la possible métropole d'Ajaccio.
Les élus de la communauté d'agglomération de Bastia (CAB) ont débattu de la possible métropole d'Ajaccio.

C’est un projet qui déchaîne déjà toutes les passions. En septembre dernier, lors de sa venue sur l’île, le Président de la République, Emmanuel Macron, évoquait une possible métropolisation d’Ajaccio. Une perspective également récemment défendue par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, et justifiée par la Ville d’Ajaccio elle-même au travers un long communiqué en fin de semaine dernière. Mais cette nouvelle organisation territoriale est loin de faire l’unanimité au vu des remous qu’elle suscite dans la classe politique insulaire. Dernier épisode en date lors du conseil communautaire de la Communauté d’agglomération de Bastia (CAB) du 19 février, durant lequel les élus se sont emparés du sujet à l’occasion d’un rapport tardivement inscrit à l’ordre du jour. 
 
Un projet à marche forcée ? 
 
« Commencer l’autonomie par la métropolisation d’Ajaccio, cela revient à débuter le film par la fin », a plaidé Louis Pozzo di Borgo, le président de la CAB. Comme lui, beaucoup d’élus ont marqué leur étonnement de voir cette question prendre de l’ampleur dans le débat alors que dans le même temps les représentants des groupes de l’Assemblée de Corse et les parlementaires sont attendus par Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, pour un dîner de travail place Beauvau le 26 février dans le cadre du processus de discussions sur l'autonomie de la Corse. 
 
« La métropole a été annoncée à l’Assemblée de Corse par le Président de la République à la surprise générale et en fin de semaine dernière dans la presse par le ministre de l’Intérieur. Cela ne s’appelle pas des demandes, on nous impose des choses », affirme Louis Pozzo di Borgo. Plus grave encore selon lui, si le projet aboutit, il ne ferait qu’affaiblir la volonté autonomiste, en diluant les compétences de la Collectivité de Corse (CdC) au profit de la métropole d’Ajaccio, créant de facto un État dans l’État, et rendant toute-puissance la cité impériale par rapport au reste de l’île. 
 
 
« Le début d’une balkanisation de la Corse »
 
Créées en 2015 avec la loi NOTRe, les métropoles ont pour objectif de renforcer l’attractivité et la compétitivité des régions à l’échelle européenne. Six ans après l’avènement de la collectivité unique, il semble donc anachronique à certains élus de vouloir la mise en place d’une ou plusieurs métropoles insulaires. « Nous avons fait le choix de faire de la CdC notre locomotive sur la scène nationale et européenne, mais surtout, une collectivité garante des équilibres territoriaux de notre île, de la solidarité entre pôles urbains et ruraux », rappelle ainsi Pierre Savelli, le maire de Bastia.
 
Si l’idée d’une candidature de Bastia en tant que métropole, pour contrebalancer le dossier ajaccien, a pu affleurer au gré du débat, comme l’a souligné Julien Morganti dans « une logique de complémentarité et non de concurrence », il a vite été balayé par Pierre Savelli, qui voit d’un très mauvais œil cette démarche. Évoquant « le début d’une balkanisation de la Corse », il a noté au passage que « ce projet de métropolisation est absent de tout programme électoral depuis plus de vingt ans ». Enfin, les élus se sont aussi interrogés sur le sort qui serait réservé aux territoires ruraux, « les grands déclassés des métropoles », selon les mots de Jean-Michel Savelli. L’élu de Ville di Pietrabugno redoute en effet qu’avec l’arrivée d’une ou plusieurs métropoles, les villages et les territoires ruraux puissent être vidés de leur substance, et préfère « répondre aux enjeux des intercommunalités qui sont mal dimensionnées, et disposent de moyens financiers et humains trop limités pour les compétences qu’elles ont déjà »« Nous voulons une Collectivité de Corse qui soit garante des équilibres territoriaux et des solidarités entre l’urbain et le rural », martèle-t-il. Au terme d’un débat de plus d'une heure, les élus de la CAB ont adopté une résolution demandant à ce qu'une attention particulière soit portée à l'évolution des champs de compétence des intercommunalités.