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Affaire Colonna : Les syndicats étudiants en ordre de marche maintiennent la manifestation dimanche à Bastia


Nicole Mari le Mercredi 9 Mars 2022 à 21:50

Les syndicats étudiants réunis en Assemblée générale à Corti avec l’ensemble des organisations du mouvement national ont décidé, malgré l’appel au calme de la famille d’Yvan Colonna, de maintenir la manifestation dimanche à Bastia et de renforcer la mobilisation. Une coordination a été créée pour décider ensemble de la suite des actions avec une demande forte : le retour des prisonniers politiques. Les jeunes appellent à l’unité et renvoie la balle dans le camp de l’Etat.



Les différentes organisations du mouvement national réunies, mercredi après-midi, à la faculté de droit de Corti.
Les différentes organisations du mouvement national réunies, mercredi après-midi, à la faculté de droit de Corti.
Christine Colonna n’a pas été entendue. Dans sa lettre lue par le vice-président d’un syndicat étudiant en début de l’Assemblée générale, qui a réuni, toute l’après-midi de mercredi dans l’amphithéâtre de la faculté de droit de Corti, l’ensemble des organisations nationalistes, elle appelait au calme et à reporter la manifestation afin de l’élargir et de la sécuriser. Mais la jeunesse étudiante n’a rien voulu entendre et après trois longues heures de discussions houleuses notamment avec les élus nationalistes, la jeunesse a obtenu, en partie, gain de cause. La manifestation tant redoutée de dimanche à Bastia est maintenue à 15 heures, mais depuis les affrontements ont repris en fin d’après-midi et en soirée à Bastia, Aiacciu et Calvi où la situation a dégénéré. « Nous avons encore réuni énormément de monde aujourd’hui dans l’amphi Landry à l’université de Corse à la demande et à l’invitation des trois syndicats étudiants GI, CGC et GP. Les quatre partis nationalistes ont répondu à l’appel, mais aussi des nationalistes hors structure, globalement aussi des Corses qui sont venus, des associations d’anciens prisonniers politiques et des prisonniers politiques hors structure », précise Pascal Zagnoli, syndicat étudiant et porte-parole du PNC. « Nous sommes réunis, d’abord pour rappeler le cheminement de nos actions depuis la première assemblée générale qui a eu lieu le lendemain de la tentative d’assassinat dont a été victime Yvan Colonna et ensuite, pour un besoin de se structurer et de se coordonner autour d’une plate-forme ».
 
En ordre de marche
Une coordination a été créée avec des représentants par structure et hors structure et s’est réunie dans la foulée afin de faire remonter les idées et de définir une ligne d’actions. « Il a été acté de maintenir la manifestation de dimanche 15 heures à Bastia au départ du Palais de justice, mais aussi globalement de définir au sein de la coordination une série d’actions et de mobilisation des acteurs à la fois institutionnels et associatifs et de voir comment élargir, dans les prochains jours, la mobilisation pour ne pas se cantonner à la seule famille nationaliste ». Les syndicats étudiants estiment, pour leur part, avoir bien entendu l’appel de Christine Colonna, notamment sa crainte d’un drame qui pourrait toucher les jeunes. « Nous avons bien entendu cet appel au calme. Nous essayons justement de nous structurer pour éviter notamment que les plus jeunes soient seuls en première ligne, ce n’est pas leur rôle, ce n'est pas leur place ! Nous sommes en train de travailler à des modalités qui nous permettront de mieux nous structurer afin que les plus jeunes, les plus anciens et les élus soient côte à côte. Nous avons vu des jeunes de 14 ans se battre hier avec des forces de l’ordre. Nous condamnons l’usage de la violence de la part des forces de l’ordre, notamment des grenades et des LBD sur des enfants et de jeunes ados, c’est inadmissible ! Il faut le dire. À compter de demain au sortir de cette réunion, nous allons coordonner nos actions avec un message politique fort : la libération de tous les prisonniers politiques. Dès demain, nous devons nous mettre en ordre de marche de façon structurée et unitaire », commente Pascal Zagnoli.
 
Les clés en main
Ceci dit, pas vraiment d’appel au calme de la part des syndicats étudiants qui renvoient la balle dans le camp de l’Etat : « Nous appelons les Corses à prendre leurs responsabilités et à descendre massivement dans la rue à nos côtés. Nous appelons aussi à la structuration de notre démarche pour ne pas que des initiatives personnelles puissent engendrer un drame. Mais nous appelons surtout l’État à prendre ses responsabilités aujourd’hui. Nous considérons que c’est l’État qui a les clés en main pour qu’il n’y ait pas de drame, pour qu’il n’y ait pas de casse, notamment en retirant aux forces de l’ordre l’usage de certains outils qui nous paraissent disproportionnés. Maintenir l’ordre, ce n’est pas faire usage de grenades ou de LBD sur les jeunes de 14 ans ! », déclare Pascal Zagnoli. Et ce n’est pas la levée totalement inattendue et unilatéralement jugée indigne hier soir du statut de DPS d’Yvan Colonna par le Premier ministre Jean Castex sur demande du président de la république, Emmanuel Macron, qui est de nature à calmer le jeu. « Le statut de DPS aurait dû, du point de vue du droit, être levé bien avant ce drame. On attend qu’un homme se batte pour vivre, qu’il soit entre la vie et la mort pour lever son statut de DPS. C’est à la limite de la honte, voire de l’indécence, si ce n'est une énième provocation pour mettre un peu plus le feu aux poudres d'une situation qui, en Corse, est au bord de l’explosion ! ».
 
L’appel à l’unité
A Corti, si le mot d’ordre des syndicats était l’unité, de ce qu’a pu entendre la presse, priée par les représentants des étudiants d’attendre dehors, mais à qui sont parvenus les éclats des disputes, la réalité était bien moins radieuse. Chacun y est allé de son couplet politique, parfois sans grand souci d’efficacité, ce qui a eu, pour effet, au final, d’énerver la jeunesse. Des députés ont été pris à partie, par une poignée de militants chauffés à blanc. Du côté des Indépendantistes de Corsica Libera, l’élue Josepha Giacometti a proposé « un blocage total comme marqueur fort » du rapport de forces avec l’Etat. Réponse ferme du président de l’Exécutif, Gilles Simeoni : « Je ne vais pas appliquer un mot d’ordre de blocage des institutions sur un vote à main levée. Je vous dis : Non ! C’est contre-productif ! Vous voulez rassembler les Corses et vous allez les prendre contre vous. Ce n’est pas possible ! ». Il propose d’acter trois demandes qui ont fait l’unanimité : « La vérité sur la tentative d’assassinat d’Yvan Colonna, le rapprochement des autres prisonniers, se servir de ce contexte pour obtenir une solution politique globale à la question Corse ». Les syndicats étudiants éludent les dissensions : « Il y a différentes modalités de blocage et d’actions qui doivent être définies par la coordination de façon à ce que d’un point de vue technique et en termes de faisabilité, ce soit imaginé et construit tous ensemble ». Même si les rancoeurs, qui restent tenaces, ont affleuré sous certaines harangues à fleurets pas vraiment mouchetés et si la ligne de fracture entre les alliés d’hier reste totale, l’attitude de l’Etat a au moins eu un mérite, c’est d’avoir réussi un exploit involontaire : celui de réunir dans une même salle et de faire discuter ensemble des gens qui ne se parlaient plus depuis des mois.  
 
N.M.
 

Les représentants des syndicats étudiants.
Les représentants des syndicats étudiants.