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A l'hôpital de Bastia on adapte la médecine terrestre au milieu spatial


M.V. le Samedi 19 Novembre 2022 à 08:11

Alors que la course à l’espace est enclenchée, des médecins anesthésistes de l'hôpital de Bastia travaillent sur une technique d'intubation à réaliser en apesanteur qui doit pouvoir être reproduite par des astronautes en mission en cas d’urgence.



Le professeurs Gilles Dhonneur
Le professeurs Gilles Dhonneur
Depuis une quinzaine d'années le professeurs Gilles Dhonneur, qui est depuis un an le chef du pôle urgences et soins continus de l'hôpital de Bastia, travaille avec son équipe sur un dispositif d’intubation en apesanteur qui pourrait permettre aux équipages impliqués dans la conquête spatiale de réaliser facilement ce geste salvateur grâce à une technique plus simple de la méthode actuelle et qui pourrait ensuite être utilisée pour le grand public lors des opérations et notamment au centre hospitalier de Falconaja.

Appelé vidéo-laryngoscope indirecte, ce système breveté par l'équipe de cet ancien chef de réanimation de l’Institut Curie à Paris, qui travaille actuellement dans l'unité de recherches du centre hospitalier de Bastia, dirigée par le professeur Thomas Darnaud, permet une intubation orotrachéale (IOT) plus anatomique et simple d'emploi par apport à l'ancienne méthode (laryngoscopie directe) réalisée avec un outil métallique, le laryngoscope de Macintosh, breveté en 1941. Pour rappel, cette méthode qui consiste à introduire sous anesthésie générale profonde un tube creux, équipé d'un ballonnet, dans la trachée nécessite beaucoup de force et de dextérité de la part des médecins qui font d'ailleurs souvent appel aux anesthésistes pour intuber leurs patients. Si l'IOT est difficilement réalisable au bloc, imaginons dans l'espace... Et pourtant il y a le 2,5% de possibilité qu'un astronaute ait à subir une anesthésie dans l'espace au cours d'une mission. Partis du constat que l'échec d’une mauvaise intubation peut engendrer des complications graves, voire mortelles, ces chercheurs ont breveté un dispositif qui muni d’une camera projette ce que l’on fait sur un écran en facilitant la technique d'intubation. "L'objectif de l'équipe de recherche était clairement de mettre au point une technique d'IOT sûre,"efficace, facile à réaliser dans un délai court, simple à apprendre pour des médecins non anesthésiste ou des techniciens." explique le professeurs Gilles Dhonneur. "Ces développements ont permis, au cours de ces années de recherche clinique, de sélectionner un outil utilisant la vidéo-laryngoscope indirecte pour réaliser l'IOT « tout terrain », c'est-à-dire adaptée à toutes les situations médicales : au bloc opératoire, en médecine d'urgence intra ou extra hospitalière et en réanimation."

L'équipe de recherche a donc mis au point et breveté ce nouveau système pour réaliser l'intubation qui pourrait être accessible à toutes les mains : expertes, comme celles des anesthésistes, mais aussi des médecins non spécialisées, comme les urgentistes, ou des novices, comme des membres d'un équipage d'astronautes d'une station lunaire ou d'un vol interplanétaire. 
Par ailleurs, une nouvelle gestuelle brevetée par l'équipe de recherche permettrait de réaliser l'IOT avec une ergonomie toute particulière adaptée aux conditions des vols spatiaux.

Après des années de travail à la recherche d'une ergonomie adaptée aux vols spatiaux, l'équipe a pu réaliser les tests grandeur nature lors d'une campagne de vols paraboliques qui recréent l’apesanteur organisée par Novespace en partenariat avec le Centre Hospitalier de Bastia et le Centre National d'Etudes Spatiales à Bordeaux.
 

Testé dans l'espace

Le professeurs Gilles Dhonneur explique les résultats des tests réalisés sur le l’Airbus A310 Zero‑G
Le professeurs Gilles Dhonneur explique les résultats des tests réalisés sur le l’Airbus A310 Zero‑G
A bord de  l’Airbus A310 Zero‑G piloté par Thomas Pesquet des médecins expérimentés et des novices ont pratiqué l’intubation avec l'outil et selon la technique que l'équipe de recherche avait mis au point, sur des mannequins pendant que le célèbre astronaute pratiquait des manœuvres de montées et de descentes afin de faire varier la gravité à l'intérieur de l'appareil. "Le taux de réussite par les néophytes est de 90 %." se félicite le professeurs Gilles Dhonneur. "Les résultats obtenus en microgravité confirment que la démarche de recherche étalée sur 20 ans est finalement concluante. L'intubation trachéale réalisée avec l'Airtraq, modifié par sa poignée et utilisé avec le Pilot-Traq selon une technique « face à face » va permettre aux astronautes d'en bénéficier en cas de besoin lors les missions ou vols spatiaux".

Concrètement  les agences spatiales pourraient intégrer ce dispositif aux missions vers la Lune ou Mars, il ne reste plus qu'à faire reconnaître la haute valeur de ces essais par les sociétés savantes.

Le professeurs Gilles Dhonneur montre en vidéo comme ce nouveau système pour réaliser l'intubation puisse être accessible à toutes les mains