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Valérie Bozzi : "Je veux renouer le dialogue avec Paris et que la Corse soit forte dans la République"


Julia Sereni le Jeudi 16 Juin 2022 à 16:57

Arrivée derrière le député sortant Paul-André Colombani au premier tour des élections législatives dans la deuxième circonscription de Corse-du-Sud, Valérie Bozzi travaille dans cet entre-deux-tours à combler l’écart. Si elle est élue, elle entend bien renouer le dialogue avec le gouvernement, et faire entendre la voix de la droite au Palais Bourbon.



Valérie Bozzi
Valérie Bozzi
- Vous êtes qualifiée pour un second tour face au député sortant. Comment analysez-vous votre score ?
- Je suis très heureuse de ce résultat, plus de 7 000 électeurs m’ont témoigné leur confiance. Maintenant, les compteurs sont remis à zéro. Il faut convaincre les abstentionnistes, convaincre ceux qui ont voté pour un candidat qui n’est pas au second tour. C’est ce que je fais cette semaine.
 
- L’écart entre vous est de près de dix points, c’est important, pensez-vous pouvoir le combler ?
- L’écart n’est pas si important. Si on regarde les scores des candidats qui ne se sont pas qualifiés, cela montre qu’il y a des possibilités de reports, si on regarde les abstentionnistes aussi, il y a un travail à faire. Et puis si on se rappelle, en 2017, c’était exactement la même situation avec Camille de Rocca Serra et Paul-André Colombani, et ce dernier l’a emporté grâce aux reports de voix. Je crois donc qu’au contraire, il y a de fortes chances que le report se fasse sur moi.
 
- L’abstention a été importante, comment l’expliquez-vous ?
- L’abstention, malheureusement, est importante en Corse, mais elle l’est aussi au niveau national. Je crois qu’il y a un désintérêt des électeurs. Et dans cette circonscription, l’absence de travail et d’actions concrètes de la part du député sortant Paul-André Colombani durant cette mandature ont fait de lui un parlementaire inexistant. Dans ce contexte, on se demande à quoi bon aller voter pour un député qui n’a rien apporté. C’est donc aussi une sanction à l’endroit du sortant. J’espère qu’au second tour, les Corses verront qu’il y a une autre voie, qu’autre chose est possible, et ma présence en est la preuve. J’espère que les électeurs saisiront cette chance, parce qu’il est vrai qu’on a beaucoup voté, mais après, on ne votera plus pendant de nombreuses années, et les enjeux sont importants. Les discussions avec Paris vont se poursuivre, et les évènements de mars dernier risquent de reprendre également si on ne fait pas quelque chose et si on ne montre pas qu’il y a une autre voie possible. Je suis assez inquiète et j’espère que les électeurs qui le sont comme moi se mobiliseront dimanche.
 
- Vous évoquez les négociations avec Paris, c’est l’enjeu majeur de ce scrutin ?
- C’est évidemment un enjeu décisif pour l’avenir de notre région. Il ne faut pas minimiser ces discussions. Cela va conditionner beaucoup de choses. Si c’est un député PNC pour l’autodétermination qui va négocier l’autonomie avec Paris, c’est autre chose que si c’est une candidate divers droite républicaine, élue de terrain et avocate. Je veux pour ma part renouer le dialogue avec Paris et que la Corse soit forte dans la République. Ce sont deux trajectoires complètement différentes.

- Quelle voix porterez-vous dans le cadre de ces discussions si vous êtes élue ?
- ll faut aller dans cette discussion, il faut y aller progressivement, mais il faut mettre tout sur la table. Il faut plus d’autonomie mais surtout plus de moyens pour la Corse parce qu’on a des retards importants dans la santé, dans l’éducation, dans les infrastructures. Il faut d’abord rattraper ces retards. Ensuite, il faut voir dans quel domaine pourrait être concerné par l’autonomie. Dans le régalien et la santé, cela ne me semble pas envisageable car on n’aurait pas les moyens de les assumer. L’autonomie ne doit pas s’accompagner de plus de prélèvements et de plus d’impôts pour les Corses, c’est aussi une des nécessités. Quand on a créé la collectivité unique, on n’a pas négocié la question des moyens et on se rend compte aujourd’hui que la collectivité ne peut plus investir. Il ne faudra pas refaire ces erreurs-là. En revanche, plus d’autonomie dans l’urbanisme, l’éducation et la culture, pourquoi pas pour tenir compte de nos spécificités.
 
- Autre fait majeur du scrutin : l’ampleur du vote de l’extrême-droite. Comment l’analysez-vous ? 
- C’est un signal qui nous est envoyé, un mécontentement général, tant au niveau national que local. On voit bien qu’il y a une attente et j’espère pouvoir la combler, parce que je suis une élue de terrain, parce que je veux remettre le travail au centre des préoccupations. Je veux créer des centres de formation en Corse, que la santé se rapproche de nos concitoyens. Les droits de successions doivent être aussi un enjeu de cette mandature que je souhaite porter.
 
- Pensez-vous pouvoir compter sur cet électorat ? Olivier Battistini de Reconquête vous soutient officiellement, le Rassemblement National, lui, appelle à voter blanc.
- Je remercie Olivier Battistini qui voit bien qu’il y a une voie possible dans ma candidature. Il y aura dans cette mandature un enjeu important : reconstruire la droite et le centre, tant au niveau local que national. C’est le dernier mandat du président de la République, la droite doit peser dans cette Assemblée nationale. C’est ce que je compte faire si je suis élue : siéger dans un groupe de droite qui pèse, et participer à la reconstruction. C’est, je pense, ce que souhaite Olivier Battistini, que nous travaillions ensemble à cette reconstruction. J’espère qu’il y a aura un report important des autres candidats pour que la refondation soit globale et que nous puissions trouver une autre voie en Corse et dans le pays.
 
- Vous dites vouloir siéger dans un groupe de droite, ce sera le groupe Horizons ?
- On verra lequel sera le mieux placé pour faire avancer les choses. Je souhaite que les valeurs de droite pèsent dans cette nouvelle majorité. Je pense que le président de la République a commis des erreurs dans la précédente mandature, tant pour la Corse que pour le pays. Il est temps désormais que les élus locaux soient davantage entendus, c’est une des critiques les plus importantes qu’on peut lui faire : il n’a pas été à l’écoute. C’est ce qui a entrainé les Gilets Jaunes, les violences en Corse. En étant plus proche des élus locaux dont je fais partie, il aurait pu éviter cela, et c’est aussi ce message-là que je veux porter à l’Assemblée nationale.
 
- Finalement était-ce une bonne idée de s’inscrire dans le sillage de cette majorité, en recevant le soutien d’Édouard Philippe ?
- Je ne m’inscris pas dans le sillage de la majorité, justement. Je suis « divers droite » dans cette élection et j’ai reçu le soutien d’Édouard Philippe. Mais je ne suis pas dans l’union de la majorité présidentielle. Laurent Marcangeli en fait partie, c’est mon ami et le représentant local d’Horizons, mais j’ai gardé ma liberté parce que je veux qu’un groupe de droite puisse peser dans cette majorité. Les valeurs de droite doivent être davantage portées.
 
- Vous avez critiqué le bilan du député sortant, que lui reprochez-vous précisément ?
- Rien n’a été fait. Il a été élu député en 2017, il ne s’est pas investi dans son mandat, il n’est pas venu dans les territoires. Il n’est jamais venu sur ma commune, ni à Albitreccia, ni à Pietrosella. Il n’a pas fait le tour de la circonscription, c’est quand même un minimum pourtant d’aller voir les communes et les élus pour connaitre leurs préoccupations et leurs besoins ! À l’Assemblée nationale, c’est pareil, il fait partie des députés les moins actifs et les plus absents. Rien n’a été concrétisé, il n’y a aucune avancée pour la Corse. Il l’a reconnu lui-même, la Corse n’a pas été entendue durant ce mandat. Le président de la République a été réélu, si on repart avec le même député, ce sera la même chose ! On ne peut pas se permettre de perdre encore cinq ans. Il faut aller négocier les dossiers insulaires à Paris.
 
- Parmi ces dossiers, quelle est la priorité ?
- La priorité, c’est le grand plan de précarité, le pouvoir d’achat, la santé, les droits de succession, et relancer notre économie parce que nous sommes un tissu économique composé de petites entreprises qui ont contracté des PGE qui devront être remboursés rapidement. Pour commencer, il faut s’attaquer aux droits de succession, car il y a urgence, il faut maintenir et pérenniser ce régime dérogatoire. Et le pouvoir d’achat, avec des mesures spécifiques à la Corse.