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Rentrée universitaire à Corte : Les syndicats étudiants alertent sur une situation sociale inquiétante


le Vendredi 1 Septembre 2023 à 21:29

À l'aube de la rentrée universitaire, dans un communiqué commun, les deux syndicats s'alarment de l'impact de l'inflation et s'interrogent sur la pertinence des dispositifs d'aide existants



(Photo d'illustration)
(Photo d'illustration)
À quelques heures de la rentrée scolaire à l’Université de Corse, la Cunsulta di a Ghjuventù Corsa (CGC) et la Ghjuventù Indipendentista (GI) ont publié un communiqué commun ce jeudi afin d’alerter sur la situation sociale des étudiants. Dans ce texte, les deux syndicats s’alarment en effet de l’impact de l’inflation dans le milieu universitaire, d’autant plus important en Corse où « les prix sont plus chers en comparaison d’autres régions » et où les étudiants « ont du mal à se loger, à se nourrir et à vivre dignement ». « Nous avons donc tenu à faire des propositions, à parler des dispositifs existants et à les remettre en question », indique le président de la CGC, Pierre-Joseph Paganelli en pointant en premier lieu la mesure de gratuité des repas au sein des restaurants universitaires, mise en place conjointement par le Crous et la Collectivité de Corse (CdC) au cours de l’année 2022-2023 pour tous les étudiants, qu’ils soient boursiers ou non. 

   
« Cette mesure crée une perte de 710 000 euros pour le Crous, donc retire un potentiel d’investissement sur d’autres thématiques, notamment le logement », regrette-t-il en expliquant : « Nous ne sommes donc pas pour la reconduction de cette mesure, car nous pensons que cela déstabilise le CROUS. Nous disons qu’il faut revenir à une mesure intermédiaire, même si la gratuité pour tous est quelque chose que l’on aurait voulu ». Dans ce droit fil, les deux syndicats demandent ainsi le maintien de la gratuité des repas pour les étudiants boursiers, mais le retour au prix de 2€30 pour les non-boursiers, et un tarif spécifiques à 1€ pour ceux qui démontreraient une difficulté financière. Tout en regrettant de ne pas connaître les modalités concernant les prix des repas « à 4 jours de la rentrée scolaire », ils posent ainsi que cette solution serait un « compromis équitable » afin que les financements de la CdC « puissent aller vers d’autres aides ». 

« La gratuité des repas a eu un succès très important, à tel point qu’effectivement lorsque nous avons rencontré le Crous pour l’évaluer, il nous a été fait état d’un certain nombre de difficultés pour continuer à mettre en œuvre cette mesure », concède Antonia Luciani, la conseillère exécutive en charge de l’éducation et de la formation, en détaillant : « Le premier souci pour le Crous était d’ordre organisationnel puisqu’il y a eu un effet d’aubaine suite à cette mesure et donc une augmentation assez importante du nombre de repas, et la deuxième chose était que le coût avait peut-être était sous-évalué de leur part ». La conseillère exécutive indique toutefois que la CdC a marqué sa volonté de reconduire le dispositif pour cette nouvelle année universitaire, en proposant « de couvrir la totalité de la prise en charge des repas pour les non-boursiers, à savoir entre 500 et 700 000 euros ».

"L’une des rentrées qui risque de figurer parmi les plus chères que les étudiants aient connu"

 « Pour le moment, rien n’est acté avec le Crous », dévoile-t-elle en précisant que les choses devraient se décanter dans les prochains jours. « Mais en tout état de cause, si le Crous décide de maintenir les repas à 2€30 pour les non-boursiers, on considérera que cela n’est pas totalement satisfaisant dans la mesure où on sait qu’aujourd’hui c’est l’une des rentrées qui risque de figurer parmi les plus chères que les étudiants aient connues, et que beaucoup d’entre eux peuvent être touchées par la précarité sans pour autant avoir un statut de boursier. Nous espérons donc pouvoir trouver un terrain d’entente et si ce n’est pas le cas, nous verrons comment la CdC peut travailler à une nouvelle mesure sur la restauration, par exemple avec un système de remboursement pour prendre en charge le prix des repas pour les non boursiers », ajoute-t-elle en appuyant : « Nous considérons que la restauration est quelque chose de très important pour les étudiants. Le logement l’est aussi bien sûr, mais quand les syndicats proposent d’utiliser cet argent pour faire autre chose, il faut préciser que ce sont là deux choses différentes. Il y a d’un côté le schéma d’aide à la vie étudiante, et de l’autre les programmes immobiliers que l’on développe avec le Crous et où on sait que malgré des opérations récentes il y a encore des besoins sur lesquels on travaille d’arrache-pied ». 
 

Par ailleurs, dans leur communiqué commun, la CGC et la GI indiquent s’inquiéter du versement de l’aide de rentrée aux étudiants boursiers. « Nous demandons à ce qu’elle soit attribuée lors du premier semestre, car l’année dernière elle l’avait été seulement en fin d’année scolaire », souffle ainsi Pierre-Joseph Paganelli. Une perspective qu’Antonia Luciani tient également à balayer d’un revers de main en affirmant que cette aide financière sera bien versée dans les prochaines semaines.  « Il y a eu des années où elle a effectivement été versée avec un peu de retard, mais nous ferons en sorte que les étudiants l’aient à temps et qu’ils n’aient pas à faire des avances de frais, car nous savons que la rentrée sera d’autant plus difficile cette année. Nous veillerons à ce que le Crous conjointement avec la CdC verse l’aide de rentrée le plus rapidement possible », promet-elle. 

" Établir ensemble une batterie d’aides qui correspondent aux besoins et que l’on adapte en fonction de l’évolution des situations "

Dans un autre registre, les deux syndicats demandent également la réévaluation du schéma d’aide à la réussite et à la vie étudiante que la CdC avait été établie sous la précédente mandature, en concertation avec les différents acteurs, et qui avait donné lieu à la mise en place de 34 mesures. « On sait qu’il y a des mesures qui ne sont pas mobilisées comme elles devraient l’être, donc cela veut dire qu’il y a des fonds qui dorment dans ce schéma. Sa réévaluation permettrait de financer d’autres mesures plus efficientes au service des étudiants et de les soulager face à la crise », soutient le président de la CGC. Une perspective partagée par la conseillère exécutive. « Nous sommes dans une phase d’évaluation de notre schéma d’aides qui courrait de 2019 à 2023 », commente-t-elle, « Entre-temps il y a eu la crise Covid, et désormais l’inflation, donc il y a beaucoup de choses qui ont évolué, même si chemin faisant nous nous sommes adaptés. Cette phase d’évaluation sera un moment pour faire le point avec les principaux syndicats et associations présents sur le campus, mais aussi les partenaires institutionnels pour qu’on établisse ensemble une batterie d’aides qui correspondent aux besoins et que l’on adapte en fonction de l’évolution des situations ». 
 
Enfin, la CGC et la GI profitent également de cette communication pour tacler la majorité territoriale qui « laisse penser que rien n’est possible sans l’autonomie ». « C’est faux. Des mesures plus globales sont possibles à condition que l’on parle de fond », arguent-ils en listant plusieurs mesures en faveur des étudiants dont certaines sont « déjà proposées par certaines forces politiques au niveau français » : « Le repas à 1 euro pour tous les étudiants pris en charge par l’État ; l’encadrement des loyers dans le parc locatif privé ; l’augmentation des APL ; une aide mensuelle pour chaque étudiant ; le blocage des prix sur les produits de première nécessité et le carburant ». « Nous avons appris la venue de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche fin septembre. Face au manque d’action politique et de rapport de force sur ces questions-là, nous allons prendre les choses en main et irons porter ces revendications nous-même devant elle », annonce le président de la CGC tandis que les deux syndicats écrivent encore : « Il est consternant que la situation sociale ne soit pas au cœur de l’actualité. Cet été, la CdC envisageait la création d’une cellule de soutien aux professionnels du tourisme. Pas un mot sur les étudiants. Peut-être ne pèsent-ils pas assez dans le PIB ? Mais sir les jeunes constituent l’avenir comme les politiques se plaisent à le rappeler, alors mettons les moyens pour soulager les étudiants face à la crise ». 
 
En retour, Antonia Luciani rappelle pour sa part que la CdC déploie chaque année « près de 3 millions d’euros uniquement sur les mesures d’aides aux étudiants ». « Il y a toute une batterie d’aides à disposition et nous sommes l’une des collectivités qui investissent le plus en France pour les étudiants et nous continuerons à le faire », conclut la conseillère exécutive.