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Père Georges Nicoli : "l'Église doit retrouver sa place au centre du village”


Pierre-Manuel Pescetti le Dimanche 28 Août 2022 à 15:39

Les lignes bougent dans les églises bastiaises après le départ à la retraite de l’archiprêtre Pierre Pinelli et le changement de paroisse du Père Serge Casanova. Déjà curé et administrateur de Notre Dame de Lourdes, le Père Georges Nicoli est nommé administrateur des paroisses de Saint Jean-Baptiste et de Sainte Marie. Une nouvelle mission qu’il compte bien remplir avec son engagement habituel et le regard sur la société d’aujourd’hui que beaucoup lui connaissent. À CNI, il s’est confié sur les enjeux de ses nouvelles responsabilités et sur le lien à renouveler entre les Bastiais et l’Eglise.



Père Georges Nicoli est un habitué des églises bastiaises. Photo CNI
Père Georges Nicoli est un habitué des églises bastiaises. Photo CNI

 - Dans quelques jours vous deviendrez administrateur de trois paroisses bastiaises. Une montée en grade, mais également plus de responsabilités ?
 

 - C’est surtout une marque de confiance de la part de l'évêque. Bien sûr, c’est plus de responsabilités de gestion, mais je ne serai pas seul dans cette mission. Trois vicaires seront là pour m’aider, car l’enjeu est que les paroisses puissent continuer à travailler même si, ce n’était pas le cas avant, la gestion des trois paroisses sera centralisée. Le but est que chacune garde son identité, mais cela permet de mutualiser les forces et les moyens sur certains projets pour être plus constructifs pour l’avenir. C’est un sacré défi, autant humain que spirituel, car même si ce n’est que pour un an, ça permet de préparer la suite. 
 

 - Voilà 15 ans que vous officiez dans les églises corses. Quels changements avez-vous constatés ?
 

 - Deux choses. Tout d’abord, la société corse vit aussi ce phénomène de sécularisation. Le catéchisme par exemple est mis en concurrence avec d’autres activités et les pratiques changent. Malgré notre culture chrétienne, il y a des difficultés sur la transmission de la foi et des traditions. Et cela pas seulement à l’église, mais aussi dans les familles. Avant, c’était plus traditionnel, voire systématique. 
 

Mais aujourd’hui on remarque aussi un retour aux sources assez intéressant notamment chez les adultes. Rien que cette année, j’en ai baptisé treize. La question de Dieu se pose toujours, mais différemment de nos jours, plus sur une base de volontariat. Je pense qu’il y a un véritable questionnement sur la manière de vivre la religion. 
 

 - Sur l’île, la religion catholique a depuis longtemps une place importante dans la culture et l’identité corse. Quelle est la place de l’Église dans la vie des Corses d’aujourd’hui ?
 

 - Ce qui change aujourd’hui c’est la régularité dans la pratique religieuse. Je pense que l'Église doit jouer un rôle d'accompagnement et de disponibilité. Il y a toujours un moment dans la vie où les gens se posent des questions et il faut les accompagner. Pour autant, même si on considère qu’elle ne l’est plus, elle doit retrouver sa place : au centre du village. Et pour cela elle doit être audacieuse, fière de ce qu’elle est et de son histoire. Nous avons véritablement un patrimoine spirituel qui permet de faire grandir les femmes et les hommes du 21e siècle. 
 

 - Comment a évolué votre rapport à l’Église depuis vos débuts ?
 

 - Forcément il évolue avec le temps, comme dans une famille. Cela fait 22 ans que je suis engagé dans cette mission, mais avant de travailler pour l’institution, je travaille pour annoncer le Christ et son message. L’Église en tant qu’institution a ses lourdeurs, ses forces, sa hiérarchie et son charisme, mais elle est surtout porteuse de cette mission : délivrer le message du Christ. Oui l’institution est en crise, mais ce n’est pas la première et ne sera pas la dernière et comme le rappelle le pape François, les institutions sont vouées à évoluer. 
 

 - Réseaux sociaux, émissions sur YouTube, télé, radio … On vous voit partout … Le défi aujourd’hui c’est de rendre l’Église plus accessible ? De moderniser son message ?
 

 - Je crois qu’elle ne peut pas se dispenser d’utiliser des moyens utilisés par 90 % de la population. Il faut qu’elle soit présente sur internet et les différents réseaux. Ce sont les moyens de communication d’aujourd’hui et je pense que ça répond à une certaine attente, car les gens ont changé leurs habitudes de consommation. C’est pareil pour la religion. Vous n’imaginez pas le nombre de demandes d’offices religieux pour des baptêmes et mariages que l’on reçoit via internet et les réseaux sociaux. C’est un peu le nouveau portail du presbytère. Mais cela doit rester un moyen de faciliter la vraie rencontre humaine. Il ne faut pas désincarner l’Homme trop vers le virtuel, sinon ça devient une coquille vide.