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La piété populaire en Corse : un patrimoine spirituel unique


Léana Serve le Samedi 14 Décembre 2024 à 15:26

À l’occasion de sa venue en Corse le 15 décembre prochain, le pape François prononcera un discours lors de la conclusion du colloque “Religiosité populaire en Méditerranée”, organisé par le diocèse d’Ajaccio. Une thématique chère au souverain pontife, mais également aux Corses, qui le manifestent tout au long de l’année.



C’est un discours très attendu. Lors de sa visite en Corse le 15 décembre prochain, le pape François prendra la parole à l’occasion de la clôture du colloque “Religiosité populaire en Méditerranée”, organisé au Palais des Congrès d’Ajaccio. Deux jours de réunions entre hommes d’Église et intervenants extérieurs pour aborder le sujet de la piété populaire, présente dans la religion catholique et très chère au souverain pontife.

La piété populaire, c’est l'expression visible de la ferveur des fidèles d'une religion. Dans le catholicisme, elle se définit principalement comme une “manifestation de la religiosité plutôt que de la religion en elle-même”, et se traduit le plus souvent par des participations à des pèlerinages, des processions, ou encore des regroupements organisés par les confréries. “La piété populaire se vit en effet et montre ce que peut être une spiritualité directe, sensible, voire parfois physique.” Et c’est justement cette définition qui est chère au pape François : “Je pense à la foi solide de ces mères au pied du lit de leur enfant malade qui s’appliquent au Rosaire [...], à tous ces actes chargés d’espérance manifestés par une bougie que l’on allume dans un humble foyer pour demander l’aide de Marie [...]. Ce sont les manifestations d’une vie théologale animée par l’action de l’Esprit Saint qui a été répandu dans nos cœurs”, avait dit le Saint-Père à l’entame de son pontificat dans l'exhortation apostolitique Evangelii gaudium.


Les Corses attachés à la piété populaire

“Les Corses sont attachés à des valeurs, à des rites”, explique Antoine-Marie Graziani, historien spécialiste de la Corse. Selon lui, il y a, sur l’île, “plus d’attachement à une communauté qu’à l’Église en elle-même”. “Si vous allez à l’église le dimanche, elle ne sera pas pleine, et vous verrez toujours les mêmes personnes, car plus on avance dans le temps, plus les églises se vident. Par contre, vous verrez énormément de monde lors de certaines fêtes et processions tout au long de l’année.” Un comportement qu’il explique par un schéma traditionnel ancré dans la société. “Les Corses sont habitués à participer à certaines fêtes, comme la Semaine Sainte, où ils assistent à toutes les messes. Ils célèbrent aussi beaucoup la Vierge Marie, à travers de nombreuses célébrations plusieurs fois dans l’année, comme le 15 août ou le 8 septembre. On observe aussi, depuis très longtemps, une prédominance des Saints en Corse : Saint Nicolas, Saint Antoine Abbé, Saint Dominique, Sainte Restitude, Saint François, qui sont beaucoup plus fêtés qu’ailleurs.” Autant de fêtes célébrées chaque année par plusieurs dizaines de milliers de fidèles à travers l’île, une sorte d’habitude selon Antoine-Marie Graziani. “Les célébrations religieuses ont un schéma commun : le matin, les fidèles vont à la messe, puis ils se retrouvent pour déjeuner avant de continuer la fête l’après-midi et de se retrouver à nouveau le soir. Ils sont ensemble, en communauté, et ce à chaque fête religieuse.”
 

Autre traduction de la piété populaire en Corse : les regroupements organisés par les confréries, qui “incarnent des traditions vivantes, témoignant d'une culture riche, d’une histoire collective et d’un lien spirituel indéfectible”. “Les confréries ont un schéma différent. C’est une dimension plus sociale”, explique Antoine-Marie Graziani. “Elles organisent des fêtes, où les fidèles participent à travers les chants, mais elles accompagnent également les malades et les défunts. Elles participent à une vie religieuse à part entière, mais c’est une piété populaire différente.” Cet attachement des Corses à certaines traditions religieuses pourrait expliquer, selon Antoine-Marie Graziani, la volonté du pape François de venir à leur rencontre, lui qui a refusé l’invitation d’Emmanuel Macron de se rendre à la cérémonie de réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris. “Je pense que le Saint-Père est intéressé par l’attachement des Corses à ces valeurs traditionnelles du christianisme, à ce lien entre la communauté et l’Église à travers des fêtes paroissiales. C’est quelque chose dont il a déjà parlé, il s’intéresse à cette piété populaire en Méditerranée.” Quant aux Corses qui feront le déplacement à Ajaccio pour apercevoir le pape : “Certains iront là-bas juste parce que c’est le pape et qu’il se déplace en Corse. Mais pour les autres, le pape leur parle, il a établi un lien avec eux, ce qui leur donne envie de venir le voir.”