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Conseil général 2 B : La synthèse des observations de la chambre des comptes


le Mercredi 24 Avril 2013 à 15:42

La chambre régionale des comptes a rendu public, mercredi, à l'heure où l'assemblée départementale était appelée à s'exprimer sur le sujet, son rapport d'observations relatif au contrôle des comptes et à l’examen de la gestion du département de la Haute-Corse à compter de l’exercice 2005. Le contrôle des comptes et l’examen de la gestion du département de la Haute-Corse portant sur les exercices 2005 et suivants font l’objet de deux rapports d’observations. Le présent rapport est le premier d’entre eux. Dans le cadre de travaux communs menés par plusieurs juridictions financières, il porte notamment sur la situation budgétaire et financière du département ainsi que sur la gestion de l’immobilier public administratif à usage de bureau. Par ailleurs, le rapport aborde la gestion des ressources humaines. Lisez la synthèse des observations de la CRC.



Conseil général 2 B : La synthèse des observations de la chambre des comptes
Le département de la Haute-Corse se caractérise par une population faible (93ème rang des 101 départements), un revenu médian par unité de consommation parmi les moins élevés de la France métropolitaine, un taux de retraités important (34 %) et croissant. A l’instar des autres départements, ses compétences ont été élargies au cours des dernières années, notamment dans le domaine de l’action sociale et sanitaire, qui concerne 46 % de ses dépenses ventilables, et dans celui de la voirie. Cependant, les compétences des départements corses, qui ne comprennent pas la construction, l’entretien, l’équipement et le financement des collèges, confiés par la loi à la collectivité territoriale de Corse (CTC), sont moins étendues que celles des autres départements métropolitains. Toutefois, la collectivité alloue des moyens humains et matériels à l’exercice de certaines compétences induites par l’environnement naturel de son territoire. Ses recettes totales étaient évaluées à 282 M€ dans le budget 2012.

La situation financière du département
Lors de son précédent contrôle, qui portait sur les exercices antérieurs à 2005, la chambre relevait que la situation financière du département était tendue : l’autofinancement (épargne dégagée par la section de fonctionnement pour financer des dépenses d’investissement) diminuait d’année en année et nécessitait un recours important à l’emprunt pour assurer le financement des dépenses d’investissement qui se situaient à un niveau élevé.
Depuis 2005, la situation financière du département s’est améliorée. L’évolution plus rapide des recettes de fonctionnement que celle des dépenses lui a permis d’augmenter sa capacité d’autofinancement. La collectivité a donc pu restaurer son fonds de roulement et réduire son recours à l’emprunt pour financer ses dépenses d’équipement qui se sont maintenues à un rythme soutenu.
De fait, le stock de dette du département, qui atteint 133 M€ fin 2011, n’a pas évolué au cours des tout derniers exercices. Il reste cependant encore légèrement supérieur à la moyenne des départements lorsqu’il est comparé aux produits de fonctionnement.
La préservation des équilibres financiers du département n’est toutefois pas acquise pour les années à venir pour plusieurs raisons.
L’évolution future des ressources du département est très incertaine. Certes, jusqu’à présent, le niveau des recettes de la collectivité a augmenté régulièrement grâce aux compensations versées par l’Etat au titre de la taxe professionnelle (TP) que le département ne perçoit plus depuis 1994, et aux produits des droits de mutation à titre onéreux qui ont profité du dynamisme du marché immobilier dans le département. Par ailleurs, la redistribution des ressources fiscales faisant suite à la réforme de la TP a été profitable au département en 2010 et 2011. Mais elle n’est pas stabilisée, et les effets de la structure des recettes qui découle de la réforme de la taxe professionnelle mise en œuvre à partir de 2011 ne peuvent encore être complètement mesurés.
Ainsi, le département n’a aucune maîtrise de ses recettes. L’évolution de ses ressources devient davantage exposée aux aléas de la conjoncture économique. Il s’agit de l’ensemble des produits fiscaux (54 % de ses recettes totales de fonctionnement), à l’exception des produits de la taxe sur le foncier bâti, qui est la seule recette sur laquelle le département peut intervenir par modulation du taux, mais qui ne représente que 10 % de ses recettes totales. Pour le reste, le département est dépendant pour l’essentiel des décisions de l’Etat.
En regard, certaines dépenses évoluent rapidement. Les dépenses de personnel, qui représentent le quart des dépenses de fonctionnement, augmentent de 1 à 2 M€ par an. Le déficit entre les dépenses d’aide sociale (allocation personnalisée d’autonomie et handicap) et les ressources qui leur sont affectées s’accroit de 2 M€ par an. La contribution versée au service d’incendie et de secours augmente d’1 M€ chaque année en l’absence de convention financière pluriannuelle qui pourrait servir à maîtriser cette évolution. Enfin, le département est exposé à une augmentation importante des intérêts de sa dette. Un tiers de son stock de dette est en effet composé de produits structurés classés dans la catégorie des emprunts les plus risqués, qui sont parvenus à la fin de la période bénéficiant de taux fixes bonifiés. Ils exposent désormais le département à une forte augmentation des intérêts, qui est évaluée à 2 M€ dans le budget 2012.

Les ressources humaines
En dehors des transferts de personnels liés aux transferts de compétences, qui ont notamment concerné la voirie sur la période, les effectifs du département n’ont évolué que de 4 % entre 2007 et 2011. Toutefois, s’élevant à 1 231 agents en 2011, ils s’avèrent sensiblement plus importants que la moyenne de la strate. Le sureffectif, au prorata du nombre d’habitants et compte tenu des compétences exercées par la collectivité, atteint 99 agents, soit une dépense supplémentaire de 4 M€ par an.
Le contrôle a permis de constater que les volumes d’heures supplémentaires et d’astreintes se situent à un niveau très élevé. Plusieurs agents perçoivent plus de 25 heures supplémentaires par mois, plafond réglementaire en l’absence de motifs exceptionnels, sans que, pour la plupart, leurs fonctions n’exigent de sollicitation horaire particulière. Certains agents devraient travailler tous les jours, weekends et congés compris, et effectuer plusieurs heures supplémentaires et astreintes quotidiennes pour justifier les paiements pratiquement forfaitisés dont ils bénéficient, qui peuvent atteindre entre 1 000 € et 2 000 € par mois. Cette pratique a eu tendance à se développer au cours des exercices examinés. Les dépenses mandatées au titre des heures supplémentaires et des astreintes sont passées de 1 M€ en 2008 à 2 M€ en 2011. Cette dérive a pu prospérer par l’insuffisance du contrôle interne à tous les niveaux hiérarchiques et administratifs (chefs de service, service de la paie, direction des finances).
Paradoxalement, le temps effectif annuel de travail est faible. L’absentéisme pour raison de santé est plutôt élevé, comparé à la moyenne des départements. Il s’élève à près d’un mois par agent, dont la moitié pour maladie ordinaire. En outre, les agents bénéficient chaque année de sept jours de congés supplémentaires au-delà de ce que la réglementation prévoit.

Le patrimoine immobilier public administratif à usage de bureau
La surface totale des locaux gérés par le département est de 60 000 m² environ, répartis sur 94 sites. La collectivité est propriétaire de 82 % de ces surfaces. Elle en utilise 43 000 m² pour ses propres besoins. Les surfaces utiles de bureau ne couvrent que 15 000 m².
La fonction « gestion du patrimoine » fait l’objet d’une répartition entre plusieurs services. Faute d’application dédiée, les informations relatives au patrimoine ne sont ni partagées ni centralisées. L’absence de comptabilité analytique ne permet pas de calculer les coûts des locaux.
Si le département revoit régulièrement l’organisation des bureaux en fonction des besoins des services, il n’a pour autant pas mis en œuvre une stratégie immobilière fondée sur un diagnostic de l’existant et le recensement des besoins à moyen terme.


Les recommandations de la CRC

A l’examen de la réponse de l’ordonnateur, la chambre constate que les recommandations suivantes, formulées dans le rapport d’observations provisoires, sont partiellement mises en œuvreou font l’objet d’un engagement de mise en œuvre :
Recommandation n° 1 : la chambre recommande de renforcer la qualité de l’information donnée d’une part sur les dépenses d’action sociale, qui représentent plus de 40 % des dépenses réelles de fonctionnement et, d’autre part, sur les subventions accordées à des tiers.
Recommandation n° 2 : la chambre recommande au département d’appliquer aux budgets annexes l’instruction comptable M4 relative aux services industriels et commerciaux et de mettre en œuvre une comptabilité analytique afin de dégager les coûts réels des prestations servies aux tiers dans un cadre concurrentiel.
Recommandation n° 5 : la chambre recommande au département :
D’améliorer l’information de l’assemblée délibérante sur la situation de la collectivité en regard de son endettement,
D’en renforcer le rôle par l’adoption d’une stratégie d’endettement à partir des besoins de financement.

La chambre constate que les recommandations suivantes, formulées dans le rapport d’observations provisoires, n’ont pas fait l’objet d’une réponse de l’ordonnateur ou ne sont pas mises en œuvre :
Recommandation n° 3 : afin d’améliorer la qualité de l’information présentée au bilan de la collectivité et la fiabilité des comptes, la chambre recommande à l’ordonnateur :
- de procéder régulièrement aux intégrations des immobilisations achevées aux comptes définitifs qui conviennent et de procéder, en conséquence, aux amortissements prévus par les textes,
- d’améliorer le lien entre les inventaires physique et comptable des biens meubles.
Recommandation n° 4 : la chambre recommande :
- d’observer les prescriptions du règlement financier, en opérant le travail d’actualisation des AP qui s’impose,
- d’individualiser les programmes les plus importants pour permettre un suivi plus souple et plus dynamique de l’exécution budgétaire,
- de privilégier une présentation des AP/CP en projetant les crédits annuels sur la durée prévisionnelle des programmes. Cette synthèse serait fort utile à l’occasion du débat d’orientation budgétaire.
Recommandation n° 6 : la chambre invite donc fermement le département à conclure la convention financière pluriannuelle avec le SDIS en application de la loi.
Recommandation n° 7 : la chambre recommande au département de renforcer le contrôle de gestion interne, lequel reste éminemment perfectible.
Recommandation n° 8 : en conséquence, la chambre recommande au département :
- de centraliser la gestion de son patrimoine immobilier ou, du moins, à assurer un partage permanent des informations relatives à son patrimoine entre les services intéressés,
- d’améliorer sa connaissance des coûts.
Recommandation n° 9 : la chambre recommande la mise en œuvre d’une stratégie immobilière qui devrait être précédée notamment par la mise en place d’une application destinée à connaître les coûts des locaux occupés, connaissance qui fait défaut à ce jour.