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Prisonniers politiques : "la mobilisation pour le rapprochement pourra prendre différentes formes"


Jeanne Leboulleux-Leonardi le Lundi 9 Mai 2022 à 11:10

Samedi 7 mai, l’association Fiumorbu Dumane organisait, à Ghisunaccia, une soirée qui célébrait notamment la mémoire d’Yvan Colonna. Dans une volonté affichée de rassembler au-delà des clivages, cette soirée, qui a réuni plus de 500 personnes, était dédiée à tous les patriotes. D’anciens prisonniers politiques qui se sont investis dans la défense des prisonniers, y ont notamment pris la parole. CNI a fait le point avec Ghjuvan-Filippu Antolini, militant de l'association.



Ghjuvan-Filippu Antolini
Ghjuvan-Filippu Antolini


- Ghjuvan-Filippu, pouvez-vous nous rappeler en quelques mots ce que représente Patriotti ?
- Patriotti est un collectif d’anciens prisonniers politiques fondé en 2018 avec deux objectifs : défendre les anciens prisonniers politiques et combattre la répression. 
Que d’anciens prisonniers s’organisent entre eux, c’était une première en Corse. Il comprend des gens venus de tous les horizons politiques. C’est d’ailleurs cette caractéristique qui nous a permis d’être soutenus par tout le monde, lors des différentes mobilisations.


- Quel était l’objectif de votre intervention lors de la soirée de samedi dernier ?
- La conférence organisée autour d’anciens prisonniers politiques à laquelle j’ai participé, avait pour objectif de clarifier la situation : expliquer aux Corses que beaucoup de problèmes persistent encore. Avec notamment des gens qui passent, par exemple, régulièrement en procédure parce qu’ils refusent de se soumettre aux tests ADN ou au FIJAIT. 
Pour mémoire, le FIJAIT a été mis en place après les attentats du 13 novembre 2015 pour garder un contrôle juridique sur les terroristes islamistes. Notez, qui plus est, que c’est une loi rétroactive. Et on a élargi son champ d’application pour faire en sorte qu’elle concerne également les prisonniers politiques corses. Se sentir assimilés aux terroristes islamistes, c’est insultant !
La répression se traduit aussi par les amendes incroyables auxquelles ont été condamnés certains prisonniers : des amendes qui s’élèvent parfois à 700 000 ou 800 000 euros ! Ce sont des sujets pour lesquels on se bat toujours.  Nous avions la volonté d’exprimer tout ça…
 
- Alors justement, où en êtes-vous avec le gouvernement ? Où en êtes-vous concernant les derniers prisonniers ?
- Rappelons les faits : en octobre dernier, une motion a été votée unanimement par l’Assemblée de Corse, sur le rapprochement des membres du commando Erignac. Puis en décembre, avec les organisations de défense des prisonniers politiques, nous sommes montés à Paris rencontrer les neuf groupes de l’Assemblée nationale. Ils nous ont tous donné raison, soit en leur nom propre, soit au nom de leur groupe. Et malgré cela, le gouvernement n’a pas rapproché les trois prisonniers du commando. L’agression mortelle dont a été victime Yvan Colonna a provoqué une mobilisation sans précédent : des dizaines de milliers de personnes dans la rue. Cette mobilisation a été possible parce qu’il y a eu une unité de réaction, les structures politiques laissant la main aux jeunes pour éviter toute accusation de récupération du mouvement. Cela a permis l’ouverture du processus. Et Pierre Alessandri et Alain Ferrandi ont été rapprochés dans l’urgence.  Mais aujourd’hui, notre revendication principale, ce n’est pas le rapprochement des prisonniers : c’est leur libération. Il y a deux ans, lorsque nous avons été reçus au ministère de la justice par le directeur de cabinet du garde des Sceaux, nous demandions l’application de la loi : c'est-à-dire la libération des membres du commando Erignac toujours en prison !


- Et précisément aujourd’hui, quelles sont les dernières avancées ?
- En pratique, il n’y a aucune négociation en cours. 


- Quelles sont pour vous les perspectives ?
- Nous tenons toujours notre revendication de libération des derniers membres du commando ainsi que des autres prisonniers politiques – six personnes au total. Nous serons très attentifs au processus avec Darmanin, s’il est toujours en poste après le remaniement ministériel. Et bien sûr attentifs à toutes les décisions qui seront prises au sujet des prisonniers politiques.  Pour obtenir ces libérations, il va falloir continuer la mobilisation populaire : c’est elle qui les a fait céder pour le rapprochement de Pierre et Alain. Cette mobilisation pourra prendre différentes formes : la soirée de samedi dernier, avec plus de 500 participants, en était une illustration.