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Collectivité unique : La Commission Chaubon défend la Chambre des territoires, mais se divise sur le référendum


Nicole Mari le Vendredi 6 Mars 2015 à 22:28

La Commission des compétences législatives et règlementaires s’est réunie, sous la présidence de Pierre Chaubon, vendredi matin, au musée de la Corse à Corte, pour examiner les amendements gouvernementaux à l’article 13 du projet de la loi NOTRe portant une nouvelle organisation territoriale française. Ces trois amendements, adoptés le 20 février dernier en première lecture à l’Assemblée Nationale, valident la création d’une collectivité unique en Corse au 1er janvier 2018 avec fusion des départements. Les discussions ont, également, porté sur la préparation de la réunion ministérielle du 13 avril prochain et sur l’épineuse question du référendum. Les Nationalistes ont fait entendre leurs différences. Explications, pour Corse Net Infos, de Pierre Chaubon et de Gilles Simeoni, conseiller territorial de Femu a Corsica et maire de Bastia.



L'hémicycle de l'Assemblée de Corse.
L'hémicycle de l'Assemblée de Corse.

Pierre Chaubon, président de la Commission des compétences législatives et règlementaires de l'Assemblée de Corse.
Pierre Chaubon, président de la Commission des compétences législatives et règlementaires de l'Assemblée de Corse.
Pierre Chaubon : « Je propose une consultation, non sur le principe de la collectivité unique, mais sur le contenu »
 
- Quel a été l’objet de cette réunion de la Commission Chaubon ?
- J’ai réuni la Commission sur quelques points. Le 1er consistait à examiner l’amendement tel qu’il a résulté de la discussion parlementaire. Il contient quelques petites imperfections légistiques et juridiques qu’il faut corriger. Par exemple, l’amendement cite : « La région de Corse », or, comme chacun sait, la région de Corse n’existe plus depuis la loi de 1991 qui a créé la Collectivité territoriale de Corse.
 
- Ces erreurs peuvent-elles être préjudiciables ?
- Ce n’est pas très grave, mais nous souhaitons corriger les imperfections ! Nous en avons relevé d’autres. Par exemple, un 1er amendement modifie l’article du Code général des collectivités territoriales tandis que un 2ème amendement l’abroge ! Cela ne va pas ! Soit on le modifie, soit on l’abroge ! La Commission s’est, donc, emparée de ces petites imperfections pour y remédier.
 
- Quels furent les autres points abordés ?
- Le 2nd point de l’ordre du jour était de commencer à préparer la réunion du 13 avril entre la délégation de la Corse et le gouvernement, c’est-à-dire les deux ministres, Marylise Lebranchu et Bernard Cazeneuve. Une position simple et claire s’est dégagée : ceux qui, dans la délégation corse, ont voté et soutiennent la réforme portant collectivité unique, se référeront et défendront les délibérations de l’Assemblée de Corse (CTC) au niveau du contenu. A savoir, le mode de scrutin, le nombre de conseillers à l’Assemblée, la répartition entre les Conseillers exécutifs et l’Assemblée délibérante, la Chambre des territoires qui est, paraît-il un sujet de discussion…
 
- Le gouvernement ne semble pas favorable à la Chambre des territoires…
- Il ne semble pas ! Mais, personne ne m’a officiellement signifié un refus ! Donc, à partir du moment où l’on discute, on discute ! Nous avons décidé d’en discuter et de soutenir la volonté politique qui s’est affirmée sur cette question et qui veut créer, au sein de la collectivité unique, une idée de proximité avec les communes et, à travers elles, les intercommunalités.
 
- Que pensez-vous de la position nationaliste qui demande une discussion sur un pack global, intégrant toutes les grandes délibérations de la CTC ?
- Ils ont, effectivement, mis cela sur la table quand nous avons parlé d’une éventuelle consultation populaire. Certaines sensibilités politiques souhaitent que l’on pose aux électeurs toute une série de questions. Sur quels fondements pourrait-on faire une telle consultation ? Cela ne paraît pas simple d’un point de vue juridique !
 
- Paul Giacobbi parle, lui aussi, d’une consultation populaire. De quoi s’agit-il exactement ?
- Paul Giacobbi, et je peux le comprendre, souhaite que l’on puisse, à un moment donné, dans l’une des séquences de cette construction institutionnelle, consulter les Corses. Sur le principe de la collectivité unique, il est très difficile de consulter, comme l’a fort justement souligné Bernard Cazeneuve. On ne peut pas demander au législateur de retenir le principe de cette collectivité unique et d’en fixer les dates, tout en se mettant sous la menace d’un vote qui pourrait le contredire ! Aussi, ai-je proposé, après m’être entretenu avec le président du Conseil Exécutif, de faire une consultation, non sur le principe, mais sur le contenu de la réforme. Nous avons démarré cette réflexion tous ensemble. Mais, comme vous l’avez dit, certaines sensibilités, quitte à consulter, préfèreraient que l’on élargisse de beaucoup le champ de la consultation. Ce n’est juridiquement pas simple !
 
- Après le 18 avril, que va-t-il se passer ?
- Il y aura une phase d’élaboration des ordonnances. Le gouvernement va demander une habilitation pour légiférer par ordonnances sur le contenu. Nous allons insister pour être associés à l’élaboration de ces ordonnances. Là aussi, certains élus ont émis une préférence, non pour des ordonnances, mais pour un projet de loi spécifique. Cette discussion aura probablement lieu avec le gouvernement. Ensuite, le processus d’élaboration, soit du projet de loi, soit des ordonnances, se poursuivra en concertation.
 
- Etes-vous confiant sur le déroulement des discussions ?
- Je suis toujours confiant, quand j’aborde des discussions ! Je suis un optimiste et un volontariste ! Sur la collectivité unique, tout le monde pensait que nous n’y arriverons pas. Nous n’y sommes presque ! Le fil, en ce qui me concerne, n’est jamais rompu.
 
Propos recueillis par Nicole MARI.
 

Gilles Simeoni, conseiller territorial de Femu a Corsica et maire de Bastia.
Gilles Simeoni, conseiller territorial de Femu a Corsica et maire de Bastia.
Gilles Simeoni : « Cette affaire de référendum devient ridicule si on la limite à la question de la révision institutionnelle ! »
 
- Pour Femu a Corsica, il n’est pas envisageable de monter à Paris, le 13 avril, dans les conditions actuelles. Pourquoi ?
- Il est inenvisageable que nous montions, le 13 avril à Paris, participer à une réunion dont l’ordre du jour est défini par l’Etat avec une perspective restrictive, limitée à la définition technique de la révision institutionnelle. L’Assemblée de Corse, si elle veut être cohérente avec elle-même, doit tirer les leçons de la fin de non-recevoir qui a été opposée par l’Etat à la quasi-totalité des demandes. Le gouvernement est en train de vider le processus de toute sa substance politique. Il est hors de question de nous en accommoder !
 
- Qu’allez-vous faire ?
- Nous allons, avant la prochaine session de l’Assemblée de Corse, retourner vers nos militants, vers les instances de notre mouvement pour décider de ce qu’il y aura lieu de faire, quel contenu, quel ordre du jour, nous souhaitons donner à la réunion du 13 avril.
 
- Etes-vous d’accord avec la proposition de consultation populaire sur le contenu de la collectivité unique ?
- Cette affaire de référendum devient ridicule si on la limite à la question de la révision institutionnelle ! Le principe de la loi française est de supprimer, dans deux ans, l’échelon départemental et les Conseils généraux. On ne va pas faire un référendum en Corse pour savoir si on va appliquer la mesure générale qui va être prise dans toute la France ! Pour nous, le référendum n’a de sens que s’il entérine ou pas un processus d’ensemble avec une question qui inclurait toutes les délibérations fondamentales votées par l’Assemblée de Corse et ce, dans le cadre d’une vraie solution politique.
 
Propos recueillis par N.M.
 
 

Michel Stefani : « Non au bâillon pour le peuple »

"La Commission des compétences législatives et réglementaires réunie ce jour s’est conclue sur une décision majoritaire refusant de fait la consultation des Corses par référendum sur le projet de création de la collectivité unique.
En lieu et place, il est proposé au bénéfice du deuxième alinéa de l’article 72-1 de la Constitution d’organiser une consultation d’initiative locale sur un projet de délibération de l’Assemblée de Corse portant sur tout ou partie des ordonnances du gouvernement.
C’est du jamais vu, mais au-delà c’est une manière peu démocratique de faire avaliser après coup la collectivité unique qui est l’objet principal de la réforme institutionnelle en Corse. Comme je l’ai indiqué en Commission, avant de voter contre cette procédure aléatoire, il est impensable de s’arranger avec la volonté du peuple et pire encore de le bâillonner.


Pour respecter le principe essentiel déjà mis en œuvre en 2003, comme je l’ai proposé, il faut retirer l’amendement du gouvernement à l’article 13 du projet de loi NOTRe, élaborer un projet de loi spécifique sur lequel la consultation par référendum ne souffrirait d’aucune contestation. 
En ce sens l’Assemblée de Corse doit être convoquée, sans délai, avec cette question à l’ordre du jour pour en délibérer car le seul avis de la Commission des compétences législatives et réglementaires ne serait suffire, Quant au gouvernement il se doit d’être clair et garantir qu’un tel projet de collectivité unique soit validé par le peuple."