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Vers une sortie de crise de déchets à Viggianellu ? : Les propositions de l’Exécutif corse


Nicole Mari le Lundi 20 Janvier 2020 à 22:32

Le blocage du centre d’enfouissement de Viggianellu, qui dure depuis maintenant le 8 novembre, pourrait bien être levé. C’est l’annonce faite par le Collectif Valincu Lindu qui fait écho de « propositions concrètes et sérieuses de l’Exécutif corse » lors d’une réunion samedi dernier. Des avancées concrètes en matière de convention sur la généralisation du tri à la source, de mise en place d’usines de sur-tri et de recherche de nouveaux centres de stockage, explique le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni. Il étudie également la possibilité d’exportation temporaire des déchets pour évacuer les surplus. Néanmoins, rien n'est joué.



Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de l'Assemblée de Corse. Photo Michel Luccioni.
Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif de l'Assemblée de Corse. Photo Michel Luccioni.
S’achemine-t-on vers une sortie de la crise des déchets ? Si l’annonce d’une timide levée de verrou du centre d’enfouissement de Viggianellu, qui accueille depuis lundi soir les déchets de la ComCom du Sartenais-Valincu-Taravu, est porteuse de graines d’espoir, rien n’est, pour l’instant, acquis. La réunion, qui s’est tenue samedi entre l’Exécutif corse - notamment le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, et le président de l’Office de l’environnement, François Sargentini -, et le Collectif Valincu Lindu qui bloque Viggianellu depuis près de 10 semaines, a été très serrée. Malgré des désaccords qui persistent, elle a permis, selon le Collectif, de faire émerger : « Des propositions concrètes et sérieuses pour régler le problème des déchets de façon pérenne et gérer l'urgence du court terme. Notre collectif pourrait, en responsabilité, envisager une levée progressive du blocage… dès qu'aura été fixé le calendrier précis des mesures décidées par le Conseil exécutif ».
 
Le cœur du litige
Rappelons que la principale pomme de discorde a été la décision de la préfète d’accorder l’ouverture de Viggianellu 2. « Les habitants se sont rendus compte qu’une ligne de l’arrêté d’attribution disait qu’en cas de nécessité, ce site pourrait accueillir l’ensemble des déchets de la Corse. Ils ont revu le film qui s’est passé ces trois dernières années et ont compris que nous étions condamnés, pour une dizaine d’années encore, à être le seul exutoire des déchets de la Corse, avec le centre de Prunelli qui, lui, accueille des quantités moindres. La population ne veut plus de ça ! », expliquait le maire de Viggianellu, Joseph Pucci, très en colère dans nos colonnes, en novembre dernier. Une autre raison était le manque d’empressement des autres intercommunalités à chercher des exutoires sur leurs territoires pour gérer leurs propres déchets. Ce qui faisait de Vigianellu la poubelle de toute la Corse.
 
Des pas et des gages
Dans ce contexte, les négociations sont plus que difficiles. « On est dans un système bloqué où plus personne ne veut faire le premier pas, car chacun craint que l’autre ne le fasse pas. Il faut avoir conscience que nous sommes dans une situation d’urgence absolue, de crise insupportable, au plan sanitaire, comme au plan financier », commentait Gilles Simeoni à la session de l’Assemblée de Corse, la semaine dernière. Depuis des semaines, il martèle que « Même si nous comprenons l’exaspération, le raz-le bol et l’inquiétude de la population de Viggianellu, le blocage n’est pas une solution ». Samedi, des ébauches de pas semblent avoir été faites. « Nous devons sortir de cette situation comme de l’ensemble de la crise des déchets par une construction qui permet d’envisager le moyen et le long terme, et qui, en même temps, donne des gages sur le court terme. Pour le faire, il faut que chacun, à un moment donné, accepte de faire un pas vers l’autre. C’est dans cet état d’esprit que nous avons rencontré samedi le Collectif pour réaffirmer ce que nous leur avions déjà dit », précise le président de l’Exécutif.
 
Les propositions de l’Exécutif
Gilles Simeoni a commencé par réaffirmer au Collectif la nécessaire mise en place de sa politique en matière de déchets et ses phases incontournables : « Nous avons redit notre volonté de faire de 2020 l’année de généralisation du tri à la source et du porte à porte. Notre plan d’envergure a été validé par les parties prenantes. Nous avons rappelé notre engagement à mettre les moyens, notamment financiers, en investissement et en fonctionnement, au soutien de cette politique. Nous avons déjà proposé des conventions à toutes les intercommunalités, notamment à la CAB (Communauté d’agglomération de Bastia) et à la CAPA (Communauté d’agglomération du pays ajaccien), notamment sur le tri des biodéchets. Nous avons déjà des éléments de contractualisation. Nous avons invité le Collectif à nous revoir sous quinzaine pour leur présenter des engagements de contractualisation ». L’Exécutif entend ainsi prouver qu’il prend sa part d’efforts et que l’île entre réellement dans une logique de basculement vers le tri à la source, une logique d’adhésion et de réussite du modèle qu’il a défini.
 
Des sites de sur-tri identifiés
Sur la création d’autres centres de traitement des déchets, Gilles Simeoni s’est voulu là-aussi rassurant : « C’est une question à traiter à moyen terme. Il faut au minimum 3 ans pour mettre en place un nouveau centre. Nous avons rappelé au Collectif notre volonté de créer des centres de taille plus réduite au niveau de chaque intercommunalité. Là aussi, nous sommes en train de prospecter des sites. Nous avons des contacts très positifs qui s’inscrivent, bien sûr, dans le cadre d’un traitement sécurisé et de la généralisation du tri. Nous avons acté le principe de deux usines de sur-tri, une à Ajaccio et l’autre à Bastia. A Ajaccio, le terrain est identifié. Dans la région bastiaise, nous avons le choix entre deux solutions qui offrent des conditions juridiques, environnementales et politiques sécurisées. Ce sont deux sites sur lesquels nous travaillons. Ces usines sont importantes pour la cohérence d’ensemble ».
 
Le recours à l’exportation
Dernière inquiétude du collectif : quelle solution proposer en cas d’excédent prévisible d’ordures ménagères résiduels en 2020 et 2021 ? Et quelle garantie l’Exécutif peut-il donner pour que ces surplus n’atterrissent pas à Viggianellu ? « Avec François Sargentini, nous avons acté la possibilité à titre temporaire et transitoire de mettre en œuvre une exportation dans une philosophie globale qui soit en conformité avec ce nouveau système que nous voulons construire dans des conditions juridiques, financières et écologiques sécurisées. Nous avons dit au Collectif que nous travaillons sur des pistes et que nous reviendrons, très rapidement, vers lui pour lui en faire part. Nous allons nous rencontrer à nouveau pour préciser le calendrier ». L’Exécutif sait qu’il doit donner des gages au Collectif pour avancer pas à pas vers le déblocage progressif et complet du site de Viggianellu. Il sait qu’il ne pourra pas le convaincre avec seulement des promesses. Et s’il met tout en œuvre pour faire sa part de chemin, il entend bien que tous les acteurs, y compris les citoyens et les intercommunalités, en fassent de même. « Le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas ou qu’on ne fait pas entrer sur le territoire », a-t-il déclaré lors du débat budgétaire à l’Assemblée de Corse. « C’est à ce prix-là qu’on sortira durablement de la crise ».
Affaire à suivre…
 
N.M.