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Vente du carburant à perte : Que pensent les pompistes corses de l'annonce faite par le gouvernement ?


David Ravier le Mercredi 20 Septembre 2023 à 16:22

L'autorisation de vente à perte du carburant, par le gouvernement, a suscité de vives réactions chez les pompistes corses



Crédit photo: Philippe HUGUEN / AFP
Crédit photo: Philippe HUGUEN / AFP
Pour lutter contre la flambée des prix, le gouvernement a proposé ce week-end une nouvelle idée : la possibilité pour les distributeurs de vendre le carburant « à perte », c’est-à-dire moins cher que son prix d’achat. Afin d'aider les pompistes indépendants, le gouvernement s'est engagé à instaurer des mesures de compensations. Ces mesures, destinées à lutter contre l'envolée des prix de l'énergie, n'ont été que peu appréciées par le groupe TotalEnergie et le secteur de la grande distribution. Hier, Patrick Pouyanné, le directeur général de TotalEnergie qui possède un tiers des 10 000 stations du pays, a indiqué qu'il refusait de vendre à perte ses carburants et qu'il "ne descendra pas plus bas" que le prix actuel de 1,99€ le litre fixé dans les stations-service de son groupe. Au niveau de la grande distribution, Intermarché, Carrefour et Leclerc ont également fait savoir qu'ils ne comptaient pas vendre à perte.

Un tarif plancher pour assurer leur survie

En Corse, la situation est similaire, avec des stations-service qui ne veulent pas, et qui surtout ne sont pas en mesure de descendre en dessous de 1,99€ le litre. "Les distributeurs Esso de l'île arrivent à vendre à ce prix-là, mais ils perdent beaucoup d'argent, souligne Antoniotti, le responsable du syndicat des distributeurs de carburant de Haute-Corse. C’est simple, sur l'ensemble de l'île, la moitié des stations-service se portent bien tandis que pour les autres, c'est catastrophique". Sur les 128 stations insulaires, la situation varie en fonction des aides destinés à passer cette mauvaise période, à l'image de TotalEnergie, qui peut s'appuyer sur la hiérarchie nationale, tandis que pour les autres, la situation est précaire et ne ferait que s'aggraver avec la vente à perte, comme l'affirme le syndicaliste, lui-même gérant de la station Vito de Ponte-Leccia. "Nous avons une aide conjoncturelle qui peut prendre fin à tout moment. Pour l'instant, nous avons le soutien de notre pétrolier, mais il ne pourra pas soutenir la vente à perte pour le réseau". A contrario, Serge Antoniotti assure que les stations du réseau Esso en Corse ne reçoivent aucun soutien et prédit mêmes que certaines "vont sûrement fermer ou devoir changer de marque, ce qui est une catastrophe pour les gérants de la compagnie". 

La situation fragile des stations insulaires ne date pas d'hier. L'année dernière, lorsque les prix ont commencé à grimper à cause de la guerre en Ukraine, le groupe TotalEnergie a accordé une remise de 5, puis de 10 centimes par litre de carburant. Sur l'île, les stations Vito ont pu s'aligner sur le géant pétrolier pour rester compétitives, mais pas les autres. "Le réseau Esso n'a pas pu suivre, ce qui a conduit à des fermetures et des licenciements", déplore Serge Antoniotti, qui ajoute que "sur les deux euros que coûte le carburant à la pompe, il ne nous reste rien, sachant que les taxes représentent à elles seules la moitié du prix". Pour autant, bien que la situation soit compliquée, le responsable du syndicat des distributeurs de carburant de Haute-Corse ne s'inquiète pas trop de l'adoption de la vente à perte chez les pompistes insulaires, car selon lui, l'île ne "possède pas de grandes surfaces" commerciales similaires à celles que l'on peut retrouver sur le continent. 

Pour rappel, la vente à perte est interdite en France depuis 1963 et, bien que cette idée soit loin de faire l'unanimité, elle est sérieusement envisagée par le gouvernement pour faire face à l'inflation.